Accueil Bovins

L’industrie laitière met l’accent sur la durabilité et la résilience

Depuis un certain nombre d’années déjà, l’industrie laitière a initié des projets pour introduire et encourager le recyclage de l’eau. Elle se trouve devant le défi important de garantir les strictes normes de sécurité alimentaire, tout en favorisant la durabilité et la résilience du secteur. Lors de son assemblée générale, la CBL (Confédération belge de l’industrie laitière) est revenue sur l’importance de ces notions, ainsi que sur les chiffres économiques de l’année 2017.

Temps de lecture : 7 min

C’est avec le sourire que Renaat Debergh, administrateur délégué de la CBL, présente les chiffres du marché laitier belge et international. L’industrie laitière a en effet réalisé de solides prestations en 2017 : le chiffre d’affaires a progressé de plus de 10 % à 5,5 milliards d’euros. Le nombre de travailleurs a augmenté pour la deuxième année consécutive avec une hausse de 2 %. Les investissements demeurent à un haut niveau, et notre pays a produit pour la première fois plus de 100.000 tonnes de fromage, dont deux tiers de mozzarella !

Les exportations de produits laitiers ont progressé de 23 % à 3,3 milliards d’euros. Cela signifie que 60 % du chiffre d’affaires est réalisé à l’exportation. Les exportations vers les pays hors Union Européenne progressent. Cependant, plus de 80 % des produits laitiers exportés sont destinés aux États membres de l’UE. Après l’Algérie, l’Indonésie et la Chine sont les principales destinations en dehors de l’UE.

L’optimisme de mise pour 2018 ?

« Suite à une forte amélioration de la situation du marché, l’industrie laitière belge a pu payer aux agriculteurs sur l’ensemble de l’année 2017 un prix du lait de 36,9 euros/100 litres, soit une hausse de 31 % par rapport à 2016. », présente Renaat Debergh. « Le prix du lait de 2017 est donc bien remonté après deux années catastrophiques. Les coûts ayant aussi évolué favorablement, 2017 a été une bonne année pour les producteurs laitiers sur le plan de la rentabilité. Après un moins bon début en 2018, le marché laitier a évolué de façon nettement positive ces dernières semaines, ce qui incite à un optimisme modéré pour l’ensemble de l’année 2018. » Reste à espérer que cet optimisme soit suivi d’une réalité sur le marché.

De son côté, Luc Van Impe, président de la CBL, le répète à l’envie : pas d’industrie laitière sans producteurs laitiers, et inversement. « Nos sorts sont étroitement liés, d’où l’importance d’une bonne collaboration interprofessionnelle. » Le regard tourné vers l’avenir, il désire parvenir à une évolution de la production laitière, en la rendant plus durable et résiliente.

Mais sans en oublier l’intérêt des éleveurs. « Avec la disparition des quotas, nos producteurs laitiers ont reçu une possibilité d’entreprendre. Et ils ont saisi ces opportunités. De plus, de nombreuses entreprises ont adapté début 2018 le rapport de valeur matière grasse/protéine pour le prix du lait en faveur de la matière grasse du lait. Le signal du marché est donc transmis aux producteurs laitiers. »

Transition vers plus de durabilité

Et si la durabilité est au cœur des discussions, elle prend place à différents niveaux. Luc Van Impe nous apprend ainsi que le nombre d’initiatives de durabilité des exploitations auditées a augmenté de 9,4 à 13,8 entre 2014 et 2017. De même, alors que 22 % de celles-ci produisaient leur propre énergie durable en 2014, ce chiffre a augmenté à 28 % en 2017.

Entre 2006 et 2017, la consommation de carburant par 1.000 litres de lait collecté a reculé de 12 %. Du côté de la transformation du lait, c’est surtout le recyclage de l’eau qui est à l’honneur. En 2017, les entreprises laitières ont recyclé 28 % de l’eau contre 18 % seulement en 2014 ! Les entreprises de poudre de lait montrent l’exemple en récupérant l’eau de condensation et recyclent près de 50 % du total. Moyennant la résolution d’un nombre non négligeable de problèmes techniques et la maîtrise des coûts, il sera possible à terme de parvenir à des entreprises de poudre de lait neutres en eau, ce qui serait un exemple idéal d’économie circulaire.

« Nous prenons également notre responsabilité sociétale sur le plan de la santé. », continue le président. « Je fais ici explicitement référence à l’engagement par l’industrie laitière dans le cadre de la convention de la ministre de la Santé publique Maggie De Block à réduire de 8 % les sucres ajoutés dans une série de catégories de produits laitiers d’ici 2020, avec 2012 comme année de référence. Une série d’entreprises parviennent déjà à produire via des procédés innovants des boissons lactées, des boissons chocolatées et autres, sans utiliser de sucres ajoutés ni d’édulcorants artificiels. »

Un nouveau système de payement à venir ?

Enfin, Luc Van Impe a abordé le sujet du système de payement à la qualité. « La CBL y a travaillé et a présenté une proposition à nos partenaires, les organisations agricoles. Nous espérons pouvoir réaliser une importante avancée et présenter aux régions une proposition commune d’ici début septembre. Moyennant les adaptations nécessaires, notamment pour répondre aux besoins divergents de différentes entreprises laitières, il doit être possible de maintenir un système collectif simplifié qui offre la possibilité à l’industrie de tirer parti de nouvelles opportunités. En outre, un cadre législatif uniforme dans les deux régions est hautement souhaité. »

Tournée vers l’avenir, la CBL a donc donné la parole à René Poismans, directeur du cra-w (Centre wallon de recherches agronomiques) pour obtenir son optique à long terme de l’agriculture. Après avoir présenté sa vision des fermes du futur, que nous vous avions déjà relayée (voir Le Sillon Belge nº3810 du 30 mars 2018), il est revenu sur les différentes attaques qu’a à subir le lait de la part du grand public.

Gérer les mauvaises images de l’élevage

Que ce soit au niveau de la qualité alimentaire du lait, de son impact sur le climat et l’environnement, ou de la gestion du bien-être animal, nombreuses sont les images peu flatteuses qui circulent. Si elles ne reflètent pas la réalité, on ne peut pour autant les ignorer, et il faut donc tout de même les gérer. « C’est le rôle des chercheurs bien sûr, mais aussi des producteurs, et même des consommateurs avertis, car la recherche n’a un impact que sur le long terme. », explique René Poismans.

Il a souligné l’importance de la résilience de la production laitière, et la nécessité d’en réduire le risque. Notamment, disposer d’alternatives de valorisation afin de réorienter sa production dans les mauvaises périodes s’avère essentiel, selon le directeur du cra-w. Minimiser les coûts fixes en restant maître de son volume de production et gérer les coûts variables sont d’autres voies à suivre. À ce sujet, l’alimentation est la grande variable d’ajustement. « L’achat externe est une exposition supplémentaire au risque, donc pour réduire le risque, il faut réduire les imports et favoriser l’autonomie alimentaire. »

Le bien-être de l’éleveur avant tout

René Poismans est ensuite revenu sur la durabilité, en mettant en évidence qu’il n’existait pas toujours d’indicateurs de mesures pour prouver facilement cette notion. Un indicateur important selon lui est pourtant le bien-être de l’éleveur, car l’amélioration de sa qualité de vie ne peut qu’améliorer la pérennité du secteur.

Le directeur du cra-w a également effectué quelques rappels concernant le sujet préféré des médias, à savoir les émissions de méthane des bovins. En effet, si des améliorations à ce niveau sont déjà apportées en nombre, notamment via l’alimentation et la génétique, il ne faut pas perdre de vue la globalité du propos. Car chaque modification implique différents impacts, dont certains peuvent être négatifs sur la quantité de méthane émise. « L’important est donc de trouver l’optimum entre les effets positifs et négatifs, ce qui peut se faire via les recherches, moyennant un peu de temps… »

Pour conclure, René Poismans insiste sur la diversité qui existe dans notre agriculture. « Il ne faut pas chercher une solution unique pour un système qui dispose de différents modèles de production. Il existe plusieurs solutions alternatives en fonction du modèle, et celles-ci peuvent être apportées sur le long terme grâce à la recherche, mais il est nécessaire de se pencher dessus tout de suite. »

A lire aussi en Bovins

Viande bovine: stabilité des prix et hausse de la demande

Bovins En Europe, la proximité entre le Ramadan et Pâques a permis de soutenir la demande de viande. Même si les abattages ont diminué, les prix sont ainsi restés stables, et ont même augmenté dans certains pays, pour les différentes catégories de bovins. Pour les vaches réformées, là aussi le marché se maintient, alors qu’on assiste à une diminution du cheptel dans l’Union et à une faiblesse de l’offre.
Voir plus d'articles