Les producteurs et les productrices de lait de l’EMB témoignent de leur grande incompréhension vis-à-vis de la dernière mesure annoncée par la Commission européenne. Celle-ci vise à surmonter la crise toujours croissante qui frappe le secteur laitier en subventionnant le stockage privé, sans adopter en parallèle des mesures de réduction du volume coordonnées au niveau européen.
« Par le passé, l’outil du stockage n’a pas été en mesure de juguler les crises, tout comme l’actuelle deuxième proposition de la Commission donnant l’autorisation aux organisations de producteurs et de productrices ainsi qu’aux organisations interprofessionnelles de planifier la production », estime l’organisation. Erwin Schöpges, son président, explique : « On ne pourra vaincre cette crise seulement si l’on réduit l’offre de lait cru, trop élevée actuellement, par le biais d’une réduction volontaire de la production coordonnée sur le plan de l’UE ».
« Ainsi faut-il que l’annonce actuelle du stockage privé soit assortie d’un programme de réduction volontaire de la production (avec plafonnement des volumes). En outre, les volumes stockés ne devraient pas excéder 45.000 tonnes pour le lait en poudre et 60.000 tonnes pour le beurre »
« La réduction volontaire des volumes a déjà fait ses preuves »
Sieta van Keimpema, vice-présidente de l’EMB, résume l’incompréhension des producteurs et productrices de lait européens à l’égard de la réaction de l’UE : « Pour nous, producteurs et productrices de lait, il est inconcevable que l’on retourne à de telles mesures. Les crises précédentes ont montré de façon factuelle que ces solutions n’ont pas un effet suffisant. Néanmoins, il est clair que la réduction volontaire des volumes, coordonnée sur le plan européen par la Commission, a déjà fait ses preuves en tant qu’outil de gestion de crise. C’est la raison pour laquelle ce dispositif doit être mis en œuvre, associé à un stockage privé plus strictement plafonné. »
Il faut toutefois qu’il soit activé promptement, sinon l’on risque de voir la crise s’aggraver et une réduction obligatoire des volumes devenir nécessaire. « Nous n’avons pas de temps à perdre, au contraire, il nous faut miser dès maintenant sur une stratégie de stabilité. D’ici quelques mois, le Brexit mettra lui aussi le secteur à rude épreuve. Si nous sommes trop affaiblis, la situation sera catastrophique », souligne-t-elle.
Agir maintenant
Étant donné que c’est l’excédent de lait, résultant d’un effondrement de la demande, qui tire les prix vers le bas, c’est là qu’il faut agir. Grâce à l’instauration d’une réduction volontaire des volumes au niveau européen, il serait possible de réduire de façon efficace la pression sur le prix du lait. « Afin de tenir le coup sur le plan financier, les producteurs et productrices doivent recevoir une compensation suffisante par litre de lait non produit », affirme Erwin Schöpges. À défaut de compensation, ce seront les éleveurs et les éleveuses qui devront assumer, seuls, la majeure partie des conséquences de la crise du Covid-19 au sein du secteur, ce qui leur sera tout simplement impossible au vu d’un marché laitier secoué par les crises.
Les producteurs et les productrices réclament la mise en place d’un programme de réduction volontaire de la production au niveau européen, et ce depuis le début de la crise du Covid-19. Selon
Erwin Schöpges, les producteurs et les productrices de denrées alimentaires, qui ont pourtant traversé plusieurs crises, n’ont manifestement pas été écoutés. « Les décideurs politiques sont désormais responsables de la future évolution négative des prix du lait. Quelles mesures ont-ils prévu dans un deuxième temps ? Car celles précédemment adoptées n’auront pas d’effet. » Le message du président de l’EMB aux responsables politiques est le suivant : « Si l’objectif est que le secteur retrouve une certaine stabilité, nous n’échapperons pas à une réduction des volumes coordonnée sur le plan européen. Agissez de façon responsable et agissez maintenant ! »
Elle ne prémunira pas des excédents
Elle n’agit pas au niveau des producteurs, c’est-à-dire là où survient la surproduction de lait. Ce sont des produits déjà transformés, des excédents de fromage, de lait en poudre et de beurre qui se retrouvent dans les stocks.
Elle fait durer les crises
Le stockage des produits laitiers excédentaires a une incidence sur le marché. En effet, ces denrées font aussi partie de l’offre (trop élevée). Dès lors, leur stockage tire le prix du marché vers le bas. Ainsi les crises ne sont-elles pas résolues, mais s’en trouvent même prolongées. Lorsque les produits stockés sont revendus a posteriori, cela entrave le redressement approprié des prix sur le marché.
Elle n’a pas fait ses preuves
Le stockage privé n’a pas fait ses preuves en tant qu’outil de gestion de crise de l’Union européenne. Malgré son entrée en vigueur en 2015-2017, la chute des prix sur le marché laitier s’est poursuivie de façon irrésistible. De plus, en 2016, les organisations de producteurs et les organisations interprofessionnelles furent déjà autorisées à planifier la production, sans que cela n’ait d’incidence sur la situation. En effet, le secteur ne dispose pas des structures requises et les acteurs concernés n’ont pas les fonds nécessaires pour mettre en œuvre une planification de la production efficace, permettant d’enrayer les crises.
L’outil de réduction volontaire des volumes au niveau européen est bien plus efficace
Lors de la précédente crise, nous avons perdu du temps précieux en raison des mesures décrites ci-dessus. Puis, fin 2016, le programme de réduction des volumes coordonné par la Commission européenne a finalement mis un terme à la déroute du prix du lait. À l’époque, le prix UE était remonté de ses cauchemardesques tréfonds, bien en deçà des 30 centimes, pour atteindre les 35 centimes par kilo de lait à l’été 2017.