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Coup d’œil sur les différentes maladies du froment et recommandations générales de lutte

La protection contre les pathogènes susceptibles de nuire à la quantité et à la qualité de la récolte est une phase majeure de l’itinéraire cultural. Petit rappel avant « les hostilités ».

Temps de lecture : 9 min

Les froments sont susceptibles d’être attaqués par des maladies cryptogamiques au niveau de leurs racines (piétin-échaudage), tiges (piétin-verse), feuilles (rouilles, septoriose, oïdium) et épis (septoriose, fusariose). Celles-ci peuvent réduire la quantité de grains récoltés, soit de manière directe par la destruction des organes des plantes, soit de manière indirecte (piétin-verse) par affaiblissement des tiges et risque accru de verse. Certains de ces pathogènes provoquent également une diminution de la qualité sanitaire de la récolte, comme les fusarioses qui produisent des mycotoxines pouvant se retrouver sur les grains.

Chaque pathogène possédant un cycle biologique propre, l’importance relative des différentes maladies dépend fortement des caractéristiques de la parcelle et des conditions climatiques. D’où la difficulté d’optimaliser la protection des céréales sur la base des seuls conseils généraux tels que ceux diffusés chaque semaine par le Cadco. Et la nécessité pour tout céréaliculteur de les interpréter sur le terrain en fonction des conditions phytotechniques de ses propres parcelles et de ses observations personnelles.

Le piétin-verse, rare dans nos régions

Les impacts de cette maladie sur le rendement ne sont clairement perceptibles que lorsque la maladie cause la verse de la culture, ce qui fut rarement observé ces dernières années. Les conséquences des lésions de la base de la tige qui ne causent pas la verse, sont par contre beaucoup plus sujettes à controverse.

Quel que soit le produit utilisé, le contrôle du piétin-verse est d’autant meilleur que le traitement est réalisé tôt après le stade épi à 1 cm (31). Les traitements appliqués à ce moment ont une efficacité qui dépasse rarement les 50 %. Lorsqu’ils sont réalisés après le stade 2e nœud (32) leur efficacité diminue rapidement.

En Belgique, les traitements spécifiques contre le piétin-verse ne sont pas recommandés. Sauf cas extrêmes, la lutte contre cette maladie ne doit être envisagée que comme un effet additionnel d’éventuels traitements visant principalement les maladies foliaires. Des niveaux de 20 à 30 % de plantes touchées au stade épi à 1 cm peuvent être considérés comme des seuils de risque. La charge en céréales au cours des dernières années, la phytotechnie et la connaissance du comportement de la parcelle au cours des années antérieures sont également des critères non négligeables.

Le piétin-échaudage, lié au sol

Le piétin-échaudage est une maladie des racines qui peut provoquer un échaudage des plantes en fin de saison. La maladie se conserve dans le sol.

Les risques de développement de cette maladie sont principalement liés à la quantité d’inoculum dans le sol, donc à la charge en céréales au cours des dernières années. La mise en culture d’une jachère modifie également les équilibres biologiques en faveur du piétin-échaudage.

Le premier moyen de lutte contre le piétin-échaudage? Diminuer la charge en céréale sur la parcelle concernée, via une rotation adéquate.
Le premier moyen de lutte contre le piétin-échaudage? Diminuer la charge en céréale sur la parcelle concernée, via une rotation adéquate. - M. de N.

La lutte contre cette maladie passe d’abord par une rotation raisonnée. En cas de risque, le traitement des semences avec du silthiopham (Latitude) permet une bonne protection, même si celle-ci n’est toujours que partielle. Aucun produit n’est actuellement agréé dans notre pays pour lutter contre le piétin-échaudage en cours de végétation.

Toujours plus complexe, la rouille jaune

La rouille jaune peut provoquer des dégâts très importants à la culture. Son développement est lié à des conditions climatiques particulières (printemps doux, couvert et humide). La rouille jaune est une maladie dont les premiers symptômes s’expriment souvent par foyers (plages circulaires dans la parcelle). Ceux-ci peuvent être visibles au cours de la montaison et sont à l’origine de l’épidémie généralisée qui peut suivre. Si les conditions climatiques sont favorables, l’extension de la maladie peut être très rapide.

La résistance variétale est en général assez bonne et suffit à protéger la culture vis-à-vis de la maladie. Mais il faut être prudent : le champignon présente une grande diversité de races.

La maladie n’était habituellement pas présente chaque année. L’arrivée de la race Warrior en 2011 en Europe a cependant changé les choses. La rouille jaune sévit maintenant annuellement depuis 2014 chez les variétés les plus sensibles. La commercialisation de celles-ci a fortement diminué à la suite de ces années à forte pression. De sorte qu’aujourd’hui aucun traitement systématique n’est recommandé.

Il est conseillé de surveiller les cultures dès la sortie de l’hiver. Pour les variétés les plus sensibles, un traitement au redressement (stade 30) peut être nécessaire pour juguler la maladie. Pour les variétés moins sensibles, la surveillance reste nécessaire mais dans la mesure du possible, aucun traitement ne devrait être envisagé avant le stade 2e nœud (32). La plupart des triazoles (epoxiconazole, tebuconazole, prothioconazole, cyproconazole) utilisées à dose correcte sont efficaces contre la rouille jaune. L’association d’une strobilurine à une triazole permet d’obtenir une efficacité supplémentaire.

L’oïdium, spectaculaire mais…

Très connu parce que facilement reconnaissable, l’oïdium est détecté presque chaque année. En Wallonie, très rares sont cependant les situations où la maladie s’est véritablement développée ces dernières années. Une conduite mesurée de la culture (fumure et densité de culture raisonnées) demeure certainement un moyen prophylactique très important pour diminuer les risques de développement de l’oïdium.

L’oïdium est spectaculaire et incite facilement à intervenir tôt avec un traitement fongicide spécifique. La plupart du temps de telles interventions se révèlent inutiles. Un traitement contre cette maladie ne doit être envisagé que lorsque les dernières feuilles complètement formées sont contaminées. Il faut suivre l’évolution de la maladie. L’oïdium qui reste dans les étages inférieurs ne doit pas être traité.

La lutte préventive contre l’oïdium  commence par une conduite raionnée de la culture: fumure et densité de semis et de population.
La lutte préventive contre l’oïdium commence par une conduite raionnée de la culture: fumure et densité de semis et de population. - M. de N.

Le manque de maladie n’a pas permis d’acquérir beaucoup d’expérience propre concernant l’efficacité des produits. Des quelques essais ainsi que d’autres constatations faites par ailleurs, il ressort que les substances actives les plus efficaces sont le cyflufenamide ≈ la metrafenone ≥ le fenpropidine ≈ fenpropimorphe ≈ la spiroxamine ≈ le quinoxyfen. Notons que la pyriofenone n’a pas encore pu être éprouvée contre l’oïdium.

L’utilisation de fongicides, lorsqu’elle s’avère nécessaire, gagne à être préventive. Les s.a. les plus efficaces seront préférées en cas d’intervention spécifique, mais des problèmes de résistance sont possibles. Les strobilurines ne peuvent par contre plus être conseillées contre l’oïdium, ce champignon étant maintenant résistant à cette famille chimique.

La septoriose : gare à l’ascenseur !

À la fin de l’hiver, la septoriose est presque toujours présente sur les feuilles les plus anciennes. Ce sont les cultures bien développées avant l’hiver, c’est-à-dire semées tôt, qui sont souvent les plus affectées par la maladie au printemps: d’une part, leur développement a permis une infection plus efficace des contaminations primaires au cours de l’automne et de l’hiver et, d’autre part, la maladie a eu plus de temps pour s’y multiplier. Le repiquage de la maladie sur les feuilles supérieures sera d’autant plus efficace durant la montaison que l’inoculum est abondant et que les conditions climatiques sont humides.

Ce n’est que lorsque la maladie parvient sur le feuillage supérieur que les dégâts peuvent être sensibles.

La pression de septoriose observée dans une parcelle doit être interprétée en fonction de la variété, du contexte cultural et des conditions climatiques.
La pression de septoriose observée dans une parcelle doit être interprétée en fonction de la variété, du contexte cultural et des conditions climatiques. - M. de N.

Les variétés présentent des sensibilités assez contrastées vis-à-vis de cette maladie, mais aucune n’est totalement résistante.

La pression de septoriose observée dans les champs doit être interprétée en fonction de la variété, du contexte cultural et des conditions climatiques.

À partir du stade 2e nœud (32), une intervention peut être nécessaire sur les variétés les plus sensibles qui ont été semées tôt. Dans ce cas, un traitement relais doit être envisagé 3 à maximum 4 semaines plus tard.

Lorsque la maladie est peu développée au début de la montaison ou que les conditions climatiques sont défavorables au repiquage de la maladie, le contrôle de la septoriose peut être obtenu par un seul traitement fongicide. Celui-ci est alors réalisé lorsque la dernière feuille est complètement développée (39).

La maitrise de la maladie repose principalement sur les triazoles et les SDHI. Ces derniers sont cependant plus efficaces que les triazoles seules.

Ces deux types de substances actives sont très souvent associés dans un même produit pour en augmenter l’efficacité et réduire le risque de résistance. Lorsqu’un traitement au stade 2e nœud (32) est nécessaire, l’utilisation des SDHI sera préférentiellement réservée pour le second traitement. Au stade 2e nœud, l’adjonction de chlorothalonil aux triazoles permet des solutions techniquement et économiquement intéressantes. Les strobilurines n’offrent plus une efficacité suffisante contre la septoriose mais apportent souvent une amélioration en association avec une triazole et/ou une SDHI.

Explosive, la rouille brune

La rouille brune ne se développe généralement qu’à partir de la fin du mois de mai. L’inoculum est aérien et sa multiplication au niveau de la culture est parfois très « explosive ». La rouille brune peut donc surprendre et causer des dégâts importants.

Les variétés présentent des sensibilités assez contrastées vis-à-vis de cette maladie, certaines sont particulièrement sensibles tandis que d’autres sont totalement résistantes. Sur les variétés sensibles, une protection fongicide doit impérativement être envisagée. Elle sera effectuée entre le stade dernière feuille complètement sortie (39) et l’épiaison (55).

La caracatère explosif de la rouille brune peut surprendre et s’avérer très pénalisant pour la récolte.
La caracatère explosif de la rouille brune peut surprendre et s’avérer très pénalisant pour la récolte. - M. de N.

Les strobilurines sont très efficaces sur rouille brune, de même que certaines triazoles (époxiconazole, tébuconazole, cyproconazole et prothioconazole). Le mélange de ces deux familles permet des solutions très efficaces. L’ajout de SDHI à ces mélanges est une très bonne solution contre la rouille brune. En cas de traitement unique entre le stade dernière feuille complètement sortie et l’épiaison, le choix se portera idéalement sur un mélange de strobilurine, SDHI et triazole.

La fusariose des épis : à anticiper !

La fusariose des épis peut être causée par deux types de pathogènes (Microdochium spp. et Fusarium spp.) qui n’ont pas les mêmes cycles de développement. Fusarium spp. est producteur de mycotoxines (DON) altérant la qualité sanitaire des grains. Microdochium spp. n’est pas toxicogène mais, tout comme Fusarium spp., peut être responsable de perte de rendement.

Une intervention fongicide contre la fusariose est plus efficace si elle est réalisée avant les pluies contaminatrices, du stade épi dégagé jusqu’à la floraison.
Une intervention fongicide contre la fusariose est plus efficace si elle est réalisée avant les pluies contaminatrices, du stade épi dégagé jusqu’à la floraison. - M. de N.

La maitrise de la maladie passe avant tout par des moyens prophylactiques qui sont principalement l’utilisation de variétés moins sensibles et le labour soigné avant l’implantation d’un froment après une culture de maïs ou de froment (source importante de Fusarium spp.).

Le contrôle de la maladie au moyen de fongicides est plus efficace lorsqu’il est réalisé avant les pluies contaminatrices, du stade épi dégagé jusqu’à la floraison. Les connaissances actuelles ne permettent cependant pas de prévoir correctement les niveaux d’infection par cette maladie.

Fusarium spp. peut être contrôlé au moyen de plusieurs substances actives : prothioconazole, tébuconazole et metconazole. En revanche, seul le prothioconazole est actif sur Microdochium spp. Les produits à base de prothioconazole sont à conseiller dans les situations à risque afin de contrôler à la fois Fusarium spp. et Microdochium spp.

D’après Le Livre blanc

, février 2017

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