Les pouvoirs des plantes

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Ainsi, la crise du Covid-19 a placé sous le feu des projecteurs la grande famille Artemisia des armoises. Leurs multiples vertus sont détaillées dans des publications et forums sur Internet. L’armoise annuelle chinoise est fort citée, sans oublier notre « banale » armoise vulgaire, qui pousse le long des talus : une herbacée aux effluves entêtants, bien utile autrefois dans les marinades de viandes faisandées pour en masquer le goût trop prononcé. Une autre Artemisia célèbre n’est autre que l’absinthe, cette sulfureuse fée verte qui faisait tourner la tête des poètes au 19e siècle. Ses puissants effets hallucinogènes étaient provoqués par la thuyonne, laquelle est pourtant bénéfique pour soigner la dysenterie et la malaria. Molécule ambivalente s’il en est une, à l’image des opiacés du pavot somnifère, question de dosage et d’utilisation ! L’absinthe fut interdite de consommation, vu les ravages qu’elle provoquait, ce qui jeta un discrédit durable sur les armoises. Mais les Artemisia opèrent un retour en grâce depuis quelques années, car leurs vertus bien contrôlées apportent des solutions à qui sait les utiliser avec mesure. Les heurs et bonheurs de ce végétal fort prisé, soulignent à quel point les plantes possèdent d’immenses pouvoirs, parfois fort méconnus et mal employés…

Certaines nous nourrissent ; d’autres nous fournissent de quoi nous vêtir, de quoi nous chauffer, nous confectionner des outils, construire nos habitations ; d’autres encore soignent nos maladies, nous entraînent dans des paradis artificiels ou attisent chez nous des fonctions particulières, au risque de nous empoisonner si elles sont mal employées… Que ferions-nous sans les plantes ? Que serions-nous ? Nous n’existerions même pas ! Le monde végétal mérite l’infini respect du genre humain : respect de notre berceau, de notre source de vie, de notre partenaire. Respect aussi de notre adversaire, quelquefois. Les agriculteurs ressentent au fond d’eux-mêmes cette reconnaissance, de manière naturelle, sans le crier sur tous les toits comme les écologistes et autres donneurs de leçons. Entre les végétaux et nous, l’histoire d’amour dure depuis plus de dix mille ans, sans que le mariage ait jamais été totalement consommé. Nous sommes liés au monde végétal par des relations complexes, tantôt surtout de parents-enfants, tantôt parfois de patrons-employés ou même de maîtres-esclaves.

Nous connaissons bien mal les plantes, au final, mais une chose est certaine : nous leur devons tout ! Si elles n’avaient envahi les terres émergées voici des centaines de millions d’années, notre atmosphère serait irrespirable et notre monde n’aurait pu accueillir la vie telle que nous la connaissons. Une plante, c’est magique ! Avec un peu d’eau, du gaz carbonique et la lumière du soleil, sa chlorophylle synthétise du sucre et capte de l’énergie en rejetant de l’oxygène. L’homme a bâti son empire sur cette réaction chimique : la photosynthèse. Il s’est nourri des végétaux, et d’animaux qui eux-mêmes consommaient des herbes, des fruits, des céréales. Il a cuit ses aliments en brûlant du bois ; il s’est construit des cabanes ; grâce au charbon tiré de forêts enfouies durant des millions d’années, il a fondu les métaux et fabriqué des voitures, des avions, des tracteurs, lesquels à leur tour fonctionnent grâce aux carburants fossiles, résidus de toutes ces plantes qui ont poussé sur Terre voici des éternités.

La biomasse terrestre d’aujourd’hui est composée à 82 % de végétaux, contre un centième de % pour le genre humain ! Jusqu’à présent, les hommes n’ont rien inventé de mieux pour capter le carbone de ce fichu CO2 qui étrangle la Terre d’une écharpe bien trop chaude, par notre faute. Les plantes ont sur nous un droit de vie et de mort ! Arbres immenses dans les forêts ou herbes folles au bord des champs, les plantes sauvages ou cultivées recèlent chacune d’incroyables pouvoirs, souvent méconnus. Nous autres agriculteurs cultivons ces trésors, et touchons chaque jour du doigt leur merveilleuse magie…

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