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Le Jardin des Sens à Bornival: parce que les fleurs peuvent avoir un rôle et du goût !

Bruxelloise pure souche, c’est à Bornival, village nivellois, que Marguerite de Crayencour a posé bêche, brouette et râteau. Elle y cultive non pas des légumes, mais bien des fleurs et pas simplement pour faire joli. Ses fleurs on les admire, on les hume, on les savoure et elles nous font du bien.

Temps de lecture : 6 min

Juriste de formation, Marguerite s’essaie au Barreau mais prend vite conscience que ce cadre ne lui convient pas : «J’étais malheureuse et j’avais besoin de me sentir vivante, de travailler avec mon corps, de retrouver un peu de beauté et de nature ». Le déclic, elle l’a réellement lors d’une visite de la ferme française du Bec Hellouin en Normandie, une microferme expérimentale fonctionnant selon les principes de la permaculture. «Je suis tombée sous le charme du concept et j’ai compris que c’était ce que je voulais dans ma vie. J’avais envie d’être productrice de matière première et plus uniquement consommatrice. L’idée a fait son chemin. J’ai aussi lu l’homme sans argent de Mark Boyle qui m’a pas mal inspiré ».

De juriste à productrice de fleurs

Lorsqu’elle perd son emploi, Marguerite se dégotte un woofing (le gîte et couvert en échange de petites tâches) dans une ferme en autonomie alimentaire. «Je me suis sentie un peu tarte dans cette environnement qui n’était clairement pas le mien à la base mais, ça m’a convaincu que c’était ce que je voulais faire. J’ai donc postulé au Crabe à Jodoigne qui propose, entre autres, des formations professionnelles en agriculture biologique. Malheureusement, mon projet n’étant pas encore bien concret, on m’a conseillé de me représenter l’année d’après ».

Marguerite décide donc de peaufiner son projet et de se former via le voyage. Elle fait plusieurs stages en Belgique, en Amérique du Sud et enfin dans le Valais, en Suisse où elle s’occupe d’un potager pour un restaurant et travaille en partenariat avec une productrice de plantes aromatiques et médicinales. «J’ai découvert qu’on pouvait cultiver des fleurs. Jusque-là, je pensais que vivre en agriculture, c’était soit faire de la grande culture, soit du maraîchage en petites surfaces ».

À son retour et avec cette découverte dans le coin de la tête, elle postule à nouveau au Crabe avec pour ambition de réaliser des potagers chez les particuliers : «C’était compliqué pour moi de me projeter agricultrice sur mon propre terrain. Cet objectif me semblait inatteignable. J’ai donc décidé de proposer mes services aux gens qui n’avaient pas le temps de s’y mettre. Néanmoins, au fur et à mesure de ma formation, je me suis orientée vers les plantes aromatiques et médicinales (PAM)».

La jeune femme termine son année d’étude chez « Un brin de campagne », producteurs de PAM à Tintigny : « C’était magique, j’ai adoré et ça m’a définitivement convaincue mais, j’avais encore un réel besoin de formation. J’ai appris qu’il existait une spécialisation théorique et de terrain sur la production et la transformation alimentaire et cosmétique des PAM dans le Jura. Il ne me restait plus qu’à économiser pour pouvoir me l’offrir ». Pour ce faire, elle travaille plusieurs mois chez un traiteur qui lui propose de revenir chez lui à son retour de formation.

«Je pensais que vivre en agriculture, c’était soit faire de la grande culture, soit du maraîchage en petites surfaces… Mais non !»

Des soutiens précieux

« Lorsque je suis rentrée de mes 7 mois de stage, Jean-Michel Loriers (JML Concept) m’a à nouveau engagée et il m’a aidé à développer mon projet. J’ai eu la chance de trouver un terrain non loin du boulot, situé en zone Natura 2000, laissé libre par un maraicher et prêté gratuitement par les propriétaires. À partir de 2018 et pendant presque deux ans, j’y ai développé le jardin des sens et la culture de fleurs comestibles en parallèle de mon boulot à temps plein chez JML. Ce dernier a été mon premier client et sa confiance a été précieuse car j’ai pu tester mon produit en direct et voir son évolution de la cueillette à l’assiette, en passant par le transport et la tenue en frigo».

Les fleurs sont cueillies en frais, placées en petites boites et livrées le jour-même. Elles sont souvent consommées de suite mais peuvent tenir quelques jours au frigo.
Les fleurs sont cueillies en frais, placées en petites boites et livrées le jour-même. Elles sont souvent consommées de suite mais peuvent tenir quelques jours au frigo. - Collection privée

Dans l’assiette mais aussi la tasse

Moutarde, bourrache, bleuet, thym citron, capucine, cosmos, pensées, agastache… toutes ses fleurs, et parfois mêmes leurs feuilles, peuvent être cueillies en frais et venir décorer vos assiettes et parfumer vos plats le jour même.

Les fleurs fraîches, c’est bien, mais ça ne dure qu’un temps: « J’ai réfléchi ma production sur la saisonnalité et l’année. Afin d’avoir toujours quelque chose à proposer, j’ai développé d’autres gammes ». En 2019, Marguerite installe un séchoir dans son appartement afin d’y faire sécher les aromatiques. Elle propose des infusions de verveine et romarin qui font rapidement le bonheur de son entourage.

Le jardin lui prenant de plus en plus de temps, Marguerite envisage donc d’y passer à mi-temps pour ne pas perdre le contrôle mais, la pandémie précipite un peu les choses et elle s’y retrouve à temps plein. «La situation est un peu compliquée et les ventes ne reprennent que depuis peu mais cela m’a permis de me consacrer à 100% à mon projet et de penser à de nouveaux produits ».

« J’aime que mes fleurs aient un rôle et soient utiles au corps. »

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Du savon, des baumes et des huiles par infusion solaire

Elle étend sa gamme d’aromatiques et d’infusions et décide de travailler sur les cosmétiques. « Une fois séchées, les fleurs sont mises à infuser dans l’huile de jojoba, d’olive ou de tournesol durant 6 semaines dans la serre. Grâce à la chaleur du soleil et de manière très douce, la plante transfère son parfum et ses propriétés médicinales à l’huile ». Avec cette nouvelle matière première, Marguerite réalise des savons, des baumes ou des huiles pour le corps de lavande, calendula, rose de Damas ou encore camomille noble. Elle a récemment acquis un alambic et commence à distiller afin de lancer une gamme d’eaux florales (romarin, rose, bleuet, lavande, camomille noble…). «Le semis et la récolte doivent quand même se faire. En prévoyant un peu plus, je peux mettre d’autres produits en transformation et les terminer et les vendre en saison creuse. J’aime aussi l’idée que toutes ces gammes soient représentatives du « Jardin des sens » : on a la vue, le goût et l’odorat avec les fleurs, le goût et l’odorat avec les infusions, l’odorat et le toucher avec les cométiques… et puis pour l’ouïe, il y a les oiseaux du jardin! ». Marguerite aime que ses fleurs puissent avoir un rôle et être utiles au corps. « Elles ne sont pas uniquement de la déco sur une table, on peut les intégrer dans nos habitudes et nos soins ».

Marguerite travaille en partenariat avec plusieurs restaurants dont JLM concept (évidemment) et Tero (Bierges et Bruxelles). Elle approvisionne aussi Brufresh Food qui livre les restaurants bruxellois intéressés à vélo. Les infusions et produits cosmétiques sont quant à eux disponibles via son webshop.

D. Jaunard

Cosmos, Capucines, Fenouil, Pensées, Sauges, Bourraches, Thym, Origans, Mauves, Coriandre, Tagètes, Roses Anciennes, Calendula, Camomilles, Lavandes ... sont autant de plantes cultivées par Marguerite que vous pouvez retrouver dans votre assiette, en infusion ou produit de soin.
Cosmos, Capucines, Fenouil, Pensées, Sauges, Bourraches, Thym, Origans, Mauves, Coriandre, Tagètes, Roses Anciennes, Calendula, Camomilles, Lavandes ... sont autant de plantes cultivées par Marguerite que vous pouvez retrouver dans votre assiette, en infusion ou produit de soin. - Collection privée

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