Accueil Elevage

Transport des animaux : «un rapport qui concerne agriculteurs et citoyens»

La commission d’enquête du parlement européen sur la protection des animaux pendant le transport, créée afin d’évaluer la situation actuelle en la matière, avait approuvé son rapport final en décembre 2021. Celui-ci a été voté à une large majorité le 20 janvier dernier.

Temps de lecture : 5 min

Cette commission avait constaté des manquements systématiques à l’application des règles existantes sur la protection des animaux pendant le transport et formulé des recommandations en vue de la révision des règles prévue en 2023.

Pour la présidente, l’écologiste luxembourgeoise Tilly Metz, il s’agissait de la dernière chance de montrer à la commission et aux États membres « quel type de système nous voulons : un système industriel où les animaux vivants sont transportés à l’autre bout du monde dans des conditions horribles ou des systèmes alimentaires régionaux durables où les animaux sont élevés et abattus à des distances raisonnables ».

Flux massifs d’animaux à la frontière bulgaro-turque

M. Metz dénonce les durées de transport souvent trop longues, les animaux trop jeunes pour voyager en toute sécurité, avec un manque d’eau ou de nourriture adéquate, et des problèmes de stress thermique, en raison des températures élevées que connssaient la plupart des pays pendant les mois d’été. Lors des débats, elle a évoqué le flux massif d’animaux vivants à la frontière bulgaro-turque, un problème auquel les autorités bulgares ne peuvent pas faire face seules, précisant que « très peu d’animaux exportés proviennent en fait d’exploitations bulgares ». Pour elle, « les États membres doivent se coordonner davantage et mieux en matière d’autorisations et de contrôles des transports d’animaux vivants ».

Le rapport plaide notamment pour limiter la durée des trajets pour les animaux destinés à l’abattoir à 8 heures, mais avec des possibilités d’exemptions. Les eurodéputés soulignent qu’une grande partie des problèmes actuels en la matière résultent de différences d’interprétation et invitent donc la commission, qui prépare pour fin 2023 des propositions de révision de la législation européenne sur le bien-être animal, « à établir des normes claires, mesurables et quantifiables lors de la révision du règlement, afin de parvenir à une application harmonisée dans toute l’UE, ainsi que des indicateurs innovants de bien-être animal ».

Les députés souhaitent que la commission fixe, « en s’appuyant sur des études scientifiques évaluées par les pairs, des limites de durée de voyage pour toutes les espèces animales et tous les âges, en particulier pour les animaux non sevrés », et interdise « le transport d’animaux très jeunes (bovins, ovins, caprins ou porcins et équidés domestiques) d’un âge inférieur à 35 jours ».

Ils se prononcent également pour limiter à 4 heures le transport des animaux gestants dans le dernier tiers de la gestation. Parmi leurs autres recommandations, les parlementaires insistent sur le renforcement des procédures d’autorisation et l’agrément des moyens de transport, sur l’amélioration des contrôles et du recueil de données.

Des clauses miroirs également dans le transport

Le parlement plaide également pour des obligations en matière de température pendant le transport et exige des dispositions particulières concernant le transport maritime. Il demande enfin « le respect obligatoire des normes de l’UE en matière de protection et de bien-être des animaux, y compris pour les importations en provenance de pays tiers, afin de garantir la compétitivité des producteurs européens ».

Des initiatives citoyennes comme « End the Cage Age » ont eu un impact sur les travaux de la commission et « ces demandes des citoyens ont été prises en compte », même si Tilly Metz concède qu’« il y a encore matière à amélioration concernant les recommandations ». Elle estime que « pour de nombreux citoyens, la motivation première pour réclamer des règles plus strictes et plus de sanctions est une préoccupation éthique, une volonté de voir la souffrance animale évitée ou du moins réduite. Donc pour eux, toute amélioration serait positive, en plus de la réduction des risques pour la santé publique et des préoccupations environnementales ».

Pour l’écologiste, le rapport ne concerne pas seulement les citoyens, car les agriculteurs bénéficieraient également d’un système plus juste et plus transparent qui « récompenserait les systèmes soucieux du bien-être animal avec un soutien public généreux ». De nombreux agriculteurs, selon elle, déplorent le manque de transparence et de contrôle qu’ils rencontrent dans le système actuel. La plupart d’entre eux s’occupent des animaux élevés ou nés dans leur ferme, « mais ils ne savent souvent pas quel sort les attend après les avoir vendus ».

Les ONG jugent la proposition encore trop timide

Ces propositions ont néanmoins été jugées insuffisantes par plusieurs ONG (Compassion in World Farming, Four Paws…) qui ont présenté, le 13 janvier dernier, une pétition soutenue par 900.000 signataires appelant à clairement interdire l’exportation d’animaux vivants en dehors de l’UE, le transport d’animaux non sevrés et à fixer une durée maximale de transport sur de longues distances de 8 heures pour les bovins, porcins et ovins adultes et de 4 heures pour les volailles et les lapins.

Quant au Copa-Cogeca, il a estimé que « toute révision de la législation doit protéger les animaux, s’appuyer sur des données scientifiques et être plus facile à mettre en œuvre ». Il a également insisté sur la nécessité de solutions pratiques en précisant que « l’imposition d’exigences supplémentaires, surtout si elles sont uniquement de nature bureaucratique, ne permettra pas d’améliorer la situation, mais aura une incidence majeure sur les exploitations de petite taille et sur l’autosuffisance de certaines régions spécifiques ».

Marie-France Vienne

A lire aussi en Elevage

Comité du Lait : 60 bougies marquées par un passage de flambeau

Bovins C’est une nouvelle page qui s’écrit pour le Comité du Lait (CdL). Cette Asbl, qui fête ses 60 ans d’existence, est à présent dirigée par Jean-François Heymans. Le docteur en médecine vétérinaire succède donc à Emile Piraux qui a consacré presque 40 ans de sa carrière à faire de notre lait, un produit fiable et d’excellente qualité.
Voir plus d'articles