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Le conflit Russie-Ukraine a de graves répercussions sur les marchés agricoles

L’invasion russe en Ukraine n’est pas sans conséquence sur les marchés agricoles, en particulier au niveau des céréales et intrants agricoles. Les marchés de la pomme de terre sont également « hésitants ».

Temps de lecture : 4 min

La Russie se classe au deuxième rang des pays exportateurs de blé, l’Ukraine au quatrième rang, représentant ensemble un tiers des exportations. Plus que de simples pays producteurs, ces deux pays sont devenus le grenier à blé des pays importateurs. Plusieurs régions du monde sont par conséquent dépendantes de cette production, comme le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Le blé est donc aussi devenu un enjeu de cette guerre.

Approvisionnement compliqué

« Dans le contexte actuel, des perturbations sont à craindre dans les différents flux de marchandises si les bateaux ne peuvent plus quitter les ports ukrainiens et si les marchandises ne peuvent plus être acheminées vers ceux-ci », souligne Fegra, la Fédération du négoce en grains. Des arrêts de chargements ont d’ailleurs été constatés dans des ports ukrainiens de la mer Noire et dans certains ports russes.

« Une forte augmentation des délais de livraison, de fortes hausses du coût du fret maritime et des assurances, voire des perturbations dans les opérations de paiement sont à prévoir », alerte encore Fegra. L’origine ukrainienne étant indisponible pour le marché mondial pour une durée indéterminée, les opérateurs tentent de transférer leurs positions sur d’autres origines (Europe de l’Ouest, USA). L’Afrique du Nord, un des plus gros acheteurs, risque de se rabattre sur les ports européens, entraînant une diminution des stocks européens et une pression accrue sur les prix.

Des impacts sur les intrants

Le lancement des hostilités a fait fortement progresser les cours des céréales qui ont connu une volatilité extrême ces derniers jours. Au 28 février, acheteurs et vendeurs étaient en retrait, attendant que la situation s’éclaircisse. Les marchés financiers restent ouverts mais ce sont principalement les fonds d’investissement qui les font tourner et qui prennent les matières premières comme valeur refuge.

La récolte de blé dans l’hémisphère sud (Argentine et Australie) a été bonne. Des incertitudes pèsent sur le maïs et le soja qui sont actuellement récoltés et doivent être récoltés au Brésil et en Argentine en raison de la sécheresse. Les conditions climatiques seront donc déterminantes pour limiter l’impact de la guerre en Ukraine sur les prix.

Par ailleurs, la Russie, c’est aussi 25 % des exportations mondiales de pétrole, 35 % des importations européennes en gaz, 40 % des exportations mondiales de nitrate d’ammoniaque, 17 % de phosphate et 20 % de potasse. « Des répercussions importantes sont attendues sur la fabrication d’engrais, et par conséquent sur le coût de production des céréales. À cela s’ajoute aussi la problématique des coûts des aliments pour animaux », poursuit encore Fegra.

Des craintes pour le maïs

De son côté, la Confédération européenne de la production de maïs constate une volatilité extrêmement importante sur le marché du maïs. Après l’invasion, les cours de l’échéance mars à Chicago ont atteint jusqu’à 283 $/t avant de refluer du fait de liquidations importantes de positions par les opérateurs dans ce contexte d’incertitude géopolitique majeure. « De ce fait, les cotations doivent être analysées avec précaution ces temps-ci », précise-t-elle.

La guerre perturbe le marché du maïs du fait de la position de l’Ukraine comme 4e  exportateur de maïs au monde. Outre, les bouleversements logistiques rapportés par Fegra, la Cepm craint qu’un conflit durable vienne perturber les semis au printemps pour la campagne 2022/23.

Et la pomme de terre ?

Les marchés de la pomme de terre ont réagi avec hésitations à la situation internationale. Selon Boerenbusiness, cité dans le message de la Fiwap du 1er  mars, la Russie représente de 5 à 7 % de l’export européen de produits transformés, soit entre 6.000 et 10.000 t par mois de frites et autres produits. Un volume non négligeable, mais qui a priori serait facilement absorbé par la demande intense d’autres régions telles que l’Asie.

Néanmoins, la demande industrielle temporise les acheteurs de pommes de terre qui ont pu se couvrir ces dernières semaines puisque la hausse des prix a libéré de l’offre conséquente (à 20,00 €/q et plus selon variété et qualité). Ils peuvent donc se permettre d’être attentistes et font livrer ces volumes en complément des contrats de mars. La hausse continue des prix de l’énergie et des coûts de transport et des incertitudes qui accompagnent la crise viennent renforcer cette temporisation.

D’autre part les usines continuent de tourner au maximum pour répondre aux besoins toujours très élevés des marchés mondiaux en produits finis. « Les inquiétudes résident plutôt dans l’expansion éventuelle du conflit qui rendrait inaccessibles d’autres marchés », souligne encore la Fiwap.

Par ailleurs, les cours élevés du maïs et des céréales offrent des alternatives rentables de culture. « Cela ne facilite pas la signature des contrats actuellement en discussion entre acheteurs et producteurs de pommes de terre », constate-t-elle.

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