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La grande Foire aux questions

Temps de lecture : 3 min

Noël en hiver, Toussaint en automne, Pâques au printemps, Libramont en été : le compte est bon ! La Foire nous revient fin juillet, rendez-vous immuable attendu des uns et des autres, des Huns et des hôtes, entre les foins et les moissons d’Ardenne, l’occasion d’arrêter la ronde infernale des semaines et des mois de labeur quotidien, l’opportunité de faire le point pour réfléchir, d’aller à la rencontre d’autres vérités, de poser et surtout de se poser les bonnes questions. Car Libramont, pour les agriculteurs, est avant tout une foire aux trop nombreuses questions ; j’y vais pour obtenir des réponses, et chaque année, les quelques rares obtenues me déçoivent par leur côté convenu, ronronnant, sans relief ni imagination. Tant de « pourquoi ? », tant de « comment ? »…

Pourquoi se poser tant de questions ? Il serait tellement facile d’avancer dans la vie sans s’interroger sans cesse, sur son passé, sur son présent, sur son avenir. En agriculture, de toute façon, d’autres se sont arrogés le droit de penser à notre place, de nous fournir clef sur porte des réponses standardisées, que l’on soit d’accord ou pas. Notre profession a été prise en main, -d’une poigne autoritaire et vigoureuse –, par la Politique Agricole Commune, et les paysans de 1960 jusqu’à nos jours se sont posés trop peu de questions. Ils avaient beaucoup trop de respect pour tout ce qui représentait l’Autorité, trop de confiance envers leurs « supérieurs », et n’appréhendaient en aucune façon le sort qui les attendait, le sort que nous subissons. La trop stricte éducation religieuse et leur atavisme inoxydable les rendaient aveugles et sourds, la plupart bien trop bons pour se poser les bonnes questions.

Pourquoi le monde paysan s’est-il effondré en l’espace de deux générations et a perdu 90 % de ses effectifs en moins de 50 ans ? Pourquoi les instances agricoles d’aujourd’hui prônent-elles hypocritement l’agriculture familiale à taille humaine, après l’avoir détruit avec application durant des décennies ? Pourquoi nos ministres belge et wallon de l’agriculture affirment-ils vouloir nous aider, une main sur le cœur, et de l’autre main, pourquoi laissent-ils des agences comme l’Arsia, l’Afsca, Protect’eau, etc, nous ensevelir sous des tonnes de paperasse et nous torturer par des règlements toujours davantage contraignants ?

Pourquoi Veviba sera-t-il sans doute repris par Verbist ? Pourquoi le marché de la viande est-il cadenassé par quelques rares opérateurs omnipotents ? Pourquoi nos prix de vente sont-ils si bas, et nos prix de revient sans cesse plus élevés ? Pourquoi se fiche-t-on de nous aussi ouvertement ? Sommes-nous condamnés à rester l’éternelle « variable d’ajustement » des marchés agro-alimentaires ? Et tous ceux qui profitent de nous, auront-ils un jour assez de franchise pour reconnaître leur peu de considération envers nous ?

Aurons-nous un jour le droit légitime de gagner notre vie, d’être payés au juste prix pour les efforts excessifs consentis tout au long de notre vie professionnelle ? Pourquoi la Foire de Libramont, année après année, sans trop s’en émouvoir, parle-t-elle d’une « agriculture en crise » comme s’il s’agissait d’un fait bien établi, dans l’ordre des choses et tout à fait normal ? Pourquoi sommes-nous sans cesse morigénés, sermonnés, infantilisés comme des gosses débiles auxquels il faut tout expliquer, et que l’on récompense avec des bonbons ?

Pourquoi l’agriculture est-elle folklorisée et sert-elle ici de produit d’appel ? Sommes-nous devenus à ce point anecdotiques, marginaux, drôles à observer ? Nous aime-t-on vraiment, comme on le lit partout ? Pourquoi laisse-t-on mourir la paysannerie sans lever guère plus que le petit doigt ???????

Je vous souhaite de tout cœur une agréable visite à Libramont, pour notre grande et formidable Foire aux Questions !! Belle moisson de non-réponses, comme chaque année !

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