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Advienne que pourra !

Temps de lecture : 3 min

Je connaissais plus ou moins cette anomalie congénitale relativement rare qui frappe parfois certains nouveau-nés. Je savais que c’était un trou, une fente plus ou moins importante dans le palais qui handicapait très fortement l’enfant au moment de la tétée, le lait repassant par les narines ou dans la trachée, provoquant à l’occasion une infection pulmonaire.

Jamais, je n’aurais imaginé que cette anomalie était aussi connue dans le monde animal, ce qui au fond n’est pas étonnant, puisque les causes sont les mêmes. Plusieurs explications sont données par des experts comme la prise de médicaments, vermifuges ou autres non adaptée à la jument gestante. Une infection virale ou bactérienne ou encore, une mauvaise répartition chromosomique au moment de la formation des cellules. Les 40 premiers jours de la gestation étant les plus sensibles à ces anomalies.

Comme pour me punir de mon ignorance, voilà que cette anomalie frappe un de nos poulains.

« Princesse » est la première pouliche de cette année. Sa maman a déjà mis au monde plusieurs poulains, quant à l’étalon, il est connu depuis longtemps pour sa bonne et saine fertilité. C’est avec plusieurs jours de retard que Princesse arrive, elle est fine, menue, mais bien vive. Elle se met rapidement debout et prend sa première tétée tout aussi rapidement. Le veto passe pour les premiers soins et dès le lendemain « Princesse » profite de la prairie avec sa mère. Nous avions bien remarqué son petit nez tout collant et blanc de lait, mais on la croyait goinfre, tétant plus qu’elle ne pouvait avaler. On en riait, la comparant à un enfant mangeant une tartine au chocolat s’en mettant plein le nez et les joues.

Nos naissances s’enchaînaient, Princesse ne quittait plus Roméo le seul poulain mâle de cette année. Après avoir remarqué une stagnation dans l’épanouissement de la pouliche, le lait rejeté par les narines, la respiration un peu plus bruyante, il fallait bien se rendre à l’évidence, Princesse avait un problème ! Une endoscopie mit en avant une fente plus ou moins importante dans le palais, anéanti par cette nouvelle que nous ne comprenions pas du tout. Nous mettons tout en œuvre pour que nos chevaux se trouvent dans un environnement sain, notre priorité est leur santé et leur bien-être, alors que s’est-il passé ?

Notre véto, nous rappelant que c’est ça une anomalie, une erreur de la nature, un accident, nous proposa trois solutions.

La première est l’opération qu’il s’empresse de ne pas recommander, car elle est non seulement très onéreuse, mais surtout très aléatoire avec une issue souvent dramatique.

La deuxième est « l’euthanasie » rapide, immédiate, afin de ne pas s’investir émotionnellement plus longtemps, sachant le devenir incertain de la pouliche. Mais qui a le droit de prendre la vie d’un être bien vivant, heureux et sans souffrance sous prétexte nous humains, d’éviter de souffrir.

Et la troisième, ne rien faire et advienne que pourra. Bien entendu, nous en sommes restés sur cette dernière. Princesse à bientôt quatre mois, elle mange son picotin, boit à l’abreuvoir et continue à faire ses pitreries dans la prairie avec son copain Roméo. Elle est câlinée par tous et chaque jour qui passe est un pied de nez à son destin présumé. Nous savons que cette fente ne se refermera pas comme par magie et que nous devons nous attendre au pire, mais on passe beaucoup de temps auprès d’elle, car elle est exceptionnelle. Nous profitons de son enthousiasme et son désir de vivre sa vie de poulain au maximum !

Marie-Christine

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