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Viable ou à risque :

où se situe mon exploitation ?

La Direction de l’Analyse économique agricole – Spw Agriculture, Ressources naturelles et Environnement – a mis à jour une méthode de repérage et de prévision d’appartenance d’une exploitation à une classe de viabilité donnée et ce, au départ des données disponibles dans les résultats comptables de l’exploitation.

Temps de lecture : 6 min

La viabilité économique des exploitations agricoles est une préoccupation primordiale pour les agriculteurs, pour leurs partenaires professionnels et les décideurs politiques.

L’étude réalisée par la Direction de l’Analyse économique aborde la viabilité des fermes uniquement sous l’angle économique ; d’autres éléments, par exemple sociaux, environnementaux… ne sont pas considérés. En outre, l’analyse porte sur l’exploitation agricole et les moyens qu’elle dégage et non ceux du ménage qui y vit.

Il est important de prendre en compte cet aspect car dans de nombreuses exploitations, l’un ou les deux conjoints dispose(nt) d’une source de revenus extérieurs. En Wallonie, plus du quart des exploitants le sont à temps partiel et deux exploitants sur trois n’ont pas de conjoint au travail dans l’exploitation.

On pourrait donc très bien observer des situations dans lesquelles une exploitation n’est pas viable économiquement, alors que l’exploitant et sa famille ne connaissent aucune difficulté financière.

De même, le fait qu’une exploitation se trouve caractérisée par un bon niveau de viabilité ne signifie pas automatiquement que l’exploitant n’est pas face à des difficultés financières si les dépenses privées de la famille sont anormalement élevées.

Selon leur résultat économique, leur capacité à rémunérer la main-d’œuvre et leur endettement, les exploitations du réseau concerné par cette étude ont été classées dans des groupes de risque croissant à l’aide d’un outil statistique.

L’examen des données permet d’analyser l’influence de l’orientation technico-économique de l’exploitation, de sa taille mais également des éléments extérieurs tels que les conditions de marché de certaines années. La figure illustre de cette manière que les exploitations à orientation « viandeuse » sont plus souvent dans une situation économique précaire, en comparaion avec les autres.

Les « mauvaises » années (prix et/ou rendement très bas) se distinguent par une proportion plus élevée d’exploitations à risque.

En pratique, une formule utilisable pour sa propre situation…

La méthode de classification, nécessitant un logiciel statistique, est performante mais n’est guère utile pour celui qui souhaite, au départ des données comptables d’une exploitation, savoir dans quel groupe de viabilité elle se situe. Une relation a donc été établie entre l’appartenance à un groupe à risque et les valeurs de certains ratios économiques. Pour ce faire, des ratios ont été calculés et les plus discriminants permettant de séparer les exploitations supposées viables et de celles « à risque » ont été sélectionnés. Signalons que les valeurs de ces ratios sont exprimées en % et que certains ont été bornés.

L’équation de classement obtenue est la suivante : 5,256 – 0,141 Rte + 0,0093 Rcr – 0,016 Rpa – 0,112 Rrf, où :

– le Ratio du taux d’endettement Rte exprime la dépendance de l’exploitation vis-à-vis des sources externes de financement. Ces éléments proviennent du bilan de l’exploitation. Plus ce ratio est élevé, plus le montant relatif des dettes est important. L’endettement est souvent considéré comme un moteur de rentabilité à condition toutefois que son coût reste inférieur à la rentabilité économique ;

– le Ratio de capacité de rémunérer la main-d’œuvre non salariée (familiale) Rc : après avoir pris en compte les obligations financières et la part autofinancée des investissements, le solde disponible devrait être suffisant pour rémunérer la main-d’œuvre non salariée. Si c’est bien le cas, ce ratio prendra une valeur proche ou supérieure à 100 % ;

– le Ratio du poids de l’annuité Rpa donne une indication sur la possibilité de couvrir l’annuité des emprunts grâce à l’excédent brut dégagé par l’exploitation et dont on a déduit une rémunération calculée pour les non-salariés (main-d’œuvre familiale) ;

– le Ratio de rentabilité financière Rrf indique la capacité de l’exploitation à générer un résultat au départ du capital propre investi. Il représente en quelque sorte le taux d’intérêt qu’obtient le chef d’exploitation en plaçant ses fonds propres dans son outil de production. Il est lié au taux de rentabilité économique.

Une série d’éléments

Les éléments composant ces ratios proviennent des résultats comptables et du bilan, parfois adaptés pour s’approcher du calcul des ratios utilisés dans les entreprises en général et non spécifiquement agricole :

L’excédent brut d’exploitation représente la différence entre les produits (aides comprises) et les charges réellement payées hors amortissements et intérêts. Attention, pour cette étude, on y incorpore le solde TVA si l’exploitation est au régime agricole.

La rémunération brute de la main-d’œuvre non salariée est calculée en multipliant le nombre d’heures prestées par un montant de l’ordre de 10 €/h.

Le résultat courant est le résultat d’exploitation, c’est-à-dire l’excédent brut d’exploitation dont on déduit la rémunération brute de la main-d’œuvre non salariée et la dotation aux amortissements, dont on déduit les intérêts bruts (subventions éventuelles non déduites).

Le disponible de l’exercice est l’excédent brut dont on déduit l’annuité des emprunts et les montants investis sur fond propre pour l’exercice considéré.

Le remboursement des emprunts (annuité) représente les montants de remboursements en capital et en intérêts des financements professionnels liés à l’exploitation.

Les dettes à long et court terme correspondent à la moyenne du solde des emprunts (court et long terme) à l’inventaire d’entrée et de sortie. On retrouve ces valeurs dans le bilan.

L’actif net moyen est la moyenne arithmétique des valeurs de l’actif, hors capital circulant, à l’inventaire d’entrée et à l’inventaire de sortie. Cette valeur se calcule aisément au départ du bilan de l’exploitation.

Le capital propre représente les fonds propres de l’exploitation repris dans le bilan comptable et dont on a déduit le montant du capital circulant.

… et son interprétation

Lorsque le résultat de l’équation est positif, l’exploitation est supposée viable. À l’inverse, un résultat négatif indique un risque pour l’exploitation. Toutefois, pour des résultats de l’équation compris entre -0,5 et 0,5, la probabilité de classer l’exploitation dans un groupe ou l’autre est proche. En d’autres mots, la probabilité de mal classer l’exploitation devient plus importante.

En procédant de la même façon, il a été possible d’établir une équation de prédiction qui permet de déterminer dans quel groupe à risque l’exploitation sera versée l’année prochaine, pour autant que les conditions de marché restent semblables.

En ce qui concerne les équations établies tant pour le reclassement que pour la prédiction, les ratios liés à l’endettement tels que le taux d’endettement, le poids de l’annuité et la durée de remboursement de la dette sont très discriminants. L’endettement des exploitations est donc un paramètre essentiel dans l’analyse de la viabilité des exploitations.

L’étude complète est téléchargeable sur le portail de l’agriculture wallonne en suivant le lien : https ://agriculture.wallonie.be/prix-et-economie-agricole

D’après O. Miserque

et J.-M. Marsin

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Direction de l’Analyse économique agricole, Spw Arne / Demna

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