
Jacques Delors impulsa aussi la mise en chantier de l’union économique et monétaire qui aboutira à la création de l’euro. Au niveau agricole, il revendique la paternité de la célèbre réforme de la Pac, dite Mac Sharry (du nom du commissaire de l’époque), qui a constitué un tournant majeur pour cette politique phare depuis sa mise en place dans les années 1960. Il faut dire qu’à l’époque, l’Europe se retrouvait en pleine crise de surproduction. Le surplus est exporté à prix cassés. Les marchés mondiaux s’en trouvent déstabilisés. Il fallait donc radicalement revoir la copie. La réforme visait alors à axer davantage la Pac sur le marché. L’Exécutif a cherché à diminuer son poids budgétaire en baissant les prix garantis et en compensant cela par des paiements directs aux producteurs, proportionnels à la taille des exploitations. La réforme Mac Sharry a aussi voulu trouver un accord avec les partenaires commerciaux dans le cadre de l’Uruguay Round (négociations commerciales internationales du Gatt, de 1987 à 1994). En baissant les prix garantis, et par là même les subventions aux exportations et la préférence communautaire, la nouvelle Pac permettait de mieux se conformer aux règles du commerce mondial.
Qu’il s’agisse de l’euro, du marché intérieur, d’Erasmus, ou encore de la liberté de circulation et d’établissement dans l’UE, toutes ces réalités positives qui coulent de soi pour nous, résultent en grande partie des actions engagées durant son mandat de président long de dix années. Bien au-delà d’un vaste espace mercantile, Jacques Delors considérait l’Europe comme une aventure humaine qui transcende les intérêts particuliers. Une philosophie qui avait motivé sa dernière grande prise de parole quand il avait appelé, en mars 2020, les dirigeants européens à un sursaut de solidarité pour faire face à la pandémie qui frappait alors l’UE. Il nous tenait à cœur, au Sillon Belge, de saluer la mémoire de ce grand visionnaire.
