Les facteurs à bien anticiper pour réussir son installation en maraîchage
Chaque année, des vocations émergent au sein de candidats issus du monde rural ou citadin pour s’installer en maraîchage. Parfois, il peut même s’agir d’une reconversion professionnelle. Mais quelles sont les difficultés lorsqu’on se lance dans ce secteur ? Quels sont les éléments à prendre en compte ? Du choix du terrain à l’organisation des tâches, en passant par la gestion financière et des machines, le futur maraîcher devra anticiper plusieurs facteurs pour être sûr de ne pas faire fausse route.

Le Sillon Belge du 28 novembre abordait la question de l’organisation de la main-d’œuvre au sein de la ferme maraîchère. C’est important, bien sûr, puisque nous savons tous combien les activités en maraîchage sont chronophages, bien plus encore qu’en grandes cultures. Et lorsque l’on souhaite s’installer dans ce secteur, d’autres difficultés sont à prendre en considération. Si des reportages de fermes, maraîchères ou d’autres, permettent de concrétiser les images que nous pouvons nous faire, ils permettent aussi de mettre en évidence l’importance de travailler en lien avec d’autres personnes. Qu’ils soient commerciaux ou coopératifs, ces liens font partie de la réussite.
Par ailleurs, il n’existe pas de métier facile et sans risque. Lorsque c’est possible, essayons de nous engager dans une activité qui nous plait, les inconvénients de la profession seront plus légers à accepter.
De plus, les chiffres statistiques indiquent un manque de production de légumes frais en Wallonie. Toutefois, ne nous imaginons pas qu’il suffise de s’installer pour réussir. De nouvelles fermes maraîchères naissent chaque année, mais d’autres cessent leurs activités…
Rationaliser le temps de travail
La charge de travail dépend de l’organisation de l’entreprise, bien sûr. Nous observons des besoins de l’ordre de 2.500 heures par ha et par an pour une organisation individuelle. Avec 10 % de la surface sous serre maraîchère et de la vente directe ou par paniers, les besoins en surface d’une famille de maraîchers peuvent approcher les 1,5 ha à 2 ha, c’est un ordre de grandeur. N’oublions pas que les besoins en travail sont plus conséquents d’avril à novembre. La période hivernale peut, elle, être mise à profit pour l’entretien des structures et des machines, pour les formations ou encore pour organiser la communication auprès de la clientèle.
Les pointes de travail saisonnières sont importantes et sont liées aux plantations, aux désherbages surtout, et aux récoltes. Nous avons intérêt à en tenir compte en privilégiant les investissements permettant de réduire ces besoins saisonniers.
L’organisation et les machines
De bons semoirs et de bonnes planteuses pour une implantation précise et à bon écartement permettent de gagner du temps et de réduire les surfaces nécessaires. Le semoir doit être suffisamment lourd pour assurer une bonne implantation des semences et un bon plombage de la ligne de semis. Au début des activités, la location auprès d’un confrère est l’une des solutions.
Pour les plants à repiquer, il ne faut pas nécessairement tous les produire soi-même. Pas mal d’espèces demandent des apports importants en chaleur, les machines de production des mottes sont coûteuses si elles ne servent que peu d’heures par an. D’autre part, l’élevage des plantules nécessite une attention et un savoir-faire aigus.
Avec notre météo, plusieurs machines doivent être disponibles très rapidement pour maîtriser au mieux l’enherbement : bineuses précises, herses de plusieurs types pour les cultures implantées et aussi pour les faux semis.
En période de pluies répétées, nous n’avons parfois qu’une journée convenable pour réussir un désherbage mécanique. Rater cette opportunité peut amener un travail considérable de rattrapage. La combinaison avec le désherbage thermique est souhaitable. Si les services d’entrepreneurs sont accessibles rapidement, c’est probablement la meilleure solution pour disposer de machines performantes. Dans le cas contraire, l’achat en commun ou seul sont d’autres solutions. En tout cas : n’attendons pas d’être débordés pour faire nos choix.
Disposer de récolteuses spécialisées pour une large gamme de cultures est impossible. Nous devons choisir à la fois les cultures que nous produisons et les machines nécessaires pour réduire les besoins en main-d’œuvre.
L’achat en commun de matériel et la rationalisation de la production en se limitant à quelques espèces maraîchères sont donc deux manières de mieux gérer sa ferme maraîchère et d’optimaliser les charges financières et de ressources humaines. En théorie, cela paraît évident.
Les premiers pas…
En souhaitant s’installer, le candidat maraîcher ne part pas de rien. Il a ses atouts, ses bagages de connaissances. La démarche vers l’installation peut se faire progressivement en profession accessoire d’abord ou en passant d’emblée en fonction principale. Toutefois l’équilibre économique n’arrive pas nécessairement dès le début de l’activité, il se fera attendre quelques années, le plus souvent entre 5 et 10 ans.
Les atouts à mettre en évidence comprennent les liquidités, la disponibilité de terrains convenables, l’accessibilité pour la clientèle, les partenariats avec des structures complémentaires, la compétence, les connaissances.
Il peut être tentant de commencer très petitement. En soi, cela peut paraître raisonnable, néanmoins une certaine taille est nécessaire pour faire vivre une famille. Nous avons aussi besoin de surfaces libres, en sus des surfaces maraîchères, pour assurer une certaine rotation.
Parmi les atouts du candidat, l’aptitude à entretenir et réparer son matériel est importante comme en agriculture en général. Les machines sont coûteuses, en les entretenant bien, nous pouvons augmenter leur durée de vie et leur valeur de revente. Les protéger des intempéries est une autre priorité.
Par ailleurs, la capacité de gestion n’est pas innée. Des formations sont organisées régulièrement par les services officiels et les organisations agricoles. Celles-ci sont requises pour espérer l’accès à certaines aides publiques.
Le rôle de conseiller du comptable est essentiel. Avec son regard extérieur tout en connaissant bien l’entreprise permet d’éviter bien des écueils.
Enfin, gérer, c’est prévoir. La gestion de la production implique la planification des travaux de A à Z, avec les quantités de légumes souhaités pour chaque période de production, le calendrier des semis, les surfaces requises pour chaque légume, un plan permettant la rationalisation de l’accès aux différentes parcelles.
La gestion financière permet la planification des dépenses et des investissements. Elle concerne des matières un peu différentes, mais elle est très comparable à la gestion financière des fermes d’élevage et de grandes cultures. À nouveau, des formations performantes sont dispensées chez nous.
Le plan des parcelles et le registre de production sont nécessaires pour permettre la traçabilité. Les informations sont disponibles sur plusieurs sites officiels, dont celui de l’Afsca. N’hésitons pas à questionner également les unités locales de contrôle de la même agence.
Choisir la localisation
Nous n’avons pas toujours le choix du site de production. Bien que le nombre de fermes soit en diminution alarmante, la terre reste rare et son accès malaisé.
La conséquence est qu’il faudra souvent patienter qu’une opportunité apparaisse, que ce soit en faire-valoir direct (achat) ou indirect (location).
La localisation est importante. L’idéal est d’être proche de son habitation pour la surveillance (arrosages, fermeture des serres, etc.)
La qualité des sols est aussi à prendre en compte. Bien qu’elle puisse être améliorée pour sa composition chimique et le drainage, ces réalisations sont coûteuses et peuvent être amorties sur la durée d’occupation. La composition physique, la planéité et l’orientation sont plus compliquées à modifier…
Les maraîchers doivent également tenir compte des possibilités d’approvisionnement en eau et en énergie pour assurer les irrigations et le chauffage en cas d’élevage des plantules sur place.
Nous sommes parfois amenés à étudier les possibilités d’emploi en maraîchage d’une parcelle abandonnée depuis plusieurs années. Avant d’aller plus loin dans les démarches, il est nécessaire de connaître les raisons de cet abandon. Toutes les situations sont possibles, depuis un manque de fertilité ou une susceptibilité aux inondations ou la sécheresse jusqu’à une pollution historique du site. Il y a heureusement des cas plus simples avec une possibilité réelle de cultures maraîchères après avoir pu maîtriser l’enherbement. Notons que le travail de décompaction et de désherbage peut prendre une année.
Pour bien s’informer
Le portail de l’agriculture wallonne du service public de Wallonie donne des renseignements sur le parcours d’installation en agriculture ou en horticulture. Les demandes de permis, l’inscription à la banque carrefour des entreprises et à une caisse d’assurance sociale y sont expliquées. D’autres démarches suivent l’installation, comme la demande d’un numéro de partenaire et les formalités administratives.
Le régime de TVA peut être choisi via les informations disponibles au service public fédéral des finances et également avec l’aide d’un comptable.