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Une présidence danoise sous le signe du pragmatisme

À l’issue du premier conseil des ministres européens de l’Agriculture sous présidence danoise, le ministre Jacob Jensen et le commissaire Christophe Hansen ont défendu devant la presse, le 14 juillet dernier, une approche conjuguant allègement réglementaire, soutien à la compétitivité des filières et adaptation aux nouvelles réalités géopolitiques.

Temps de lecture : 5 min

Pour sa première prise de parole dans ce format, le ministre danois de l’Agriculture, Jacob Jensen, a livré un message qu’il a voulu pragmatique : « simplifier la vie des agriculteurs et des acteurs de la filière agroalimentaire ».

Cap sur la simplification

La présidence danoise entend faire de la simplification législative une priorité opérationnelle, sans pour autant renoncer aux objectifs climatiques ni à l’exigence de durabilité. « Une réglementation de meilleure qualité, plus simple, mais aussi plus efficace », a-t-il martelé, en appelant à un usage plus stratégique des outils disponibles pour faire de l’agriculture européenne un modèle compétitif, y compris face à des géants agricoles comme les États-Unis.

Le commissaire Hansen a salué cette orientation, espérant que les mesures de simplification en cours de négociation pourront se traduire concrètement dès 2026 sur les exploitations. Un vœu largement partagé par les États membres, alors que les agriculteurs sont soumis à une pression croissante, tant économique que réglementaire.

Le double défi des relations commerciales : Ukraine et États-Unis

La conférence a également mis en lumière deux dossiers brûlants aux implications commerciales majeures : la coopération renforcée avec l’Ukraine et la montée des tensions avec les États-Unis.

Sur le premier point, l’accord de principe révisé entre la commission et l’Ukraine, entré en vigueur début juin, marque une étape importante. Présenté comme un compromis « équilibré », il vise à soutenir l’économie ukrainienne dans le contexte de l’agression russe, tout en préservant les intérêts agricoles européens. « Il est essentiel d’offrir à l’Ukraine un cadre commercial stable, en tenant compte de sa candidature à l’UE », a souligné Christophe Hansen.

L’accord prévoit un accès encadré au marché européen, conditionné à des engagements de réciprocité de la part de Kiev, notamment sur les normes de production, le bien-être animal et l’usage des phytopharmaceutiques. Les quotas sur le blé, par exemple, ont été modérément rehaussés, passant de 1 à 1,3 million de t, bien loin des niveaux atteints lors des pics des importations autonomes. « Il s’agit de montrer notre soutien à l’Ukraine, tout en assurant une protection réelle à nos producteurs », a précisé le commissaire.

À l’opposé, les relations commerciales transatlantiques suscitent davantage d’inquiétudes. L’annonce, la semaine précédente, de droits de douane de 30 % par l’administration Trump sur certains produits européens a jeté un froid. Si la commission espère encore un accord négocié, elle se dit prête à activer des contre-mesures dès la fin juillet, en cas d’impasse. « Les deux parties ont à perdre dans une telle escalade », a averti le commissaire Hansen, qui en appelle à la responsabilité commune.

Souveraineté protéique et durabilité : une stratégie de long terme

Autre pilier du conseil, la question de la souveraineté en protéines végétales, pour l’alimentation humaine comme animale, est revenue avec insistance dans les discussions. Face à une dépendance persistante vis-à-vis des importations, notamment de soja, la commission a détaillé sa stratégie pour renforcer l’autosuffisance protéique de l’UE.

Les États membres sont invités à activer, dans leurs plans stratégiques de la Pac, des mesures de soutien couplées, des interventions sectorielles et des aides environnementales en faveur des cultures de légumineuses et protéagineuses. L’objectif : atteindre 7 millions d’ha cultivés dans les prochaines années. Cette relocalisation des cultures permettrait à l’Europe de mieux faire face aux aléas géopolitiques, climatiques et commerciaux.

Le développement de protéines « alginées » (issues d’algues) a également été évoqué comme piste d’innovation, dans le cadre d’une stratégie de diversification. Le tout dans une logique de durabilité assumée. « Il nous faut un système plus résilient, plus diversifié et plus écologique », a insisté Hansen.

Une conjoncture tendue, mais une agriculture résiliente

Malgré ces perspectives structurelles, la situation conjoncturelle du secteur agricole reste délicate. Si les récoltes céréalières s’annoncent bonnes, ce qui pourrait stabiliser les prix, d’autres filières affichent des signes de fragilité. Le lait, la viande bovine et le vin voient leurs prix s’effriter dans un contexte de baisse de la consommation et d’exportations incertaines, notamment vers les États-Unis.

La commission prévoit de publier sous peu ses perspectives à court terme, tandis qu’un « paquet de simplifications » est attendu avant la fin de l’année pour répondre aux attentes du terrain. Il inclura notamment une accélération de la mise sur le marché des produits de biocontrôle. Toutefois, Christophe Hansen a reconnu la difficulté actuelle : « On retire des produits phytosanitaires sans alternatives disponibles, ce qui pénalise les agriculteurs. Il faut leur donner les moyens de protéger leurs cultures. »

Enfin, la question des engrais biosourcés, issus notamment des effluents d’élevage, a été évoquée comme levier stratégique pour réduire la dépendance aux importations. Le comité Nitrate devrait statuer rapidement sur leur encadrement.

« Il n’y a pas de vache sur la glace »

La conférence de presse s’est conclue dans une tonalité plus légère, Jacob Jensen offrant aux journalistes étrangers un aperçu de la culture danoise à travers quelques dictons agricoles. « Il n’y a pas de vache sur la glace », a-t-il annoncé. Une manière de signifier qu’il n’y a pas de danger immédiat.

Mais derrière l’image, le ministre danois a clairement voulu signifier que la vigilance restait de mise, tant les équilibres agricoles européens sont fragiles.

Marie-France Vienne

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