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Qui veut faire l’ange…

Difficile d’y échapper ! Depuis quelques semaines, le football a envahi l’espace médiatique et focalise l’attention générale, quand les Diables s’en mêlent sans trop s’emmêler les crampons. La Coupe du Monde de foot, la plupart des gens en sont fous, mais quelques rares sujets se foutent complètement de regarder tous ces bipèdes ingambes courir dans tous les sens derrière un ballon. Ces illuminés-là préfèrent voir courir en toute liberté des quadrupèdes, leurs amis à quatre pattes, et tiennent absolument, déraisonnablement, à protéger les animaux domestiques. Contre qui ? Contre quoi ? Les abattoirs restent leurs cibles privilégiées, jusqu’à présent…

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Ainsi, ce jeudi 5 juillet, des activistes français, défenseurs des animaux, ont libéré un cochon dans le « couloir de la mort » de l’abattoir de Tielt, une des multiples places fortes de cet « ami des animaux » d’un autre genre, notre brave et adulé Louis Verbist. Une vidéo très drôle circule sur le Web, avec un beau gros pépère tout rose emporté dans les bras du commando, bras suffisamment costauds, ceci dit, pour maintenir un cochon stressé qui risque de mordre de gratitude ses sauveteurs !

Ce genre d’opération-coup de poing recueille un maximum de sympathie auprès des internautes. Malgré tout, -grâce soit rendue au foot –, son impact médiatique aura été de faible ampleur. Ces zozos risquent cependant de faire des émules, ou de donner des idées stupides à des personnes naïves trop bien intentionnées, désireuses de secourir des animaux prétendument malheureux. Imaginez un instant de découvrir un beau matin vos vaches égayées dans la nature, libérées de leur étable ou de leur prairie aux barrières ouvertes… Ils appellent de tous leurs vœux un retour à la nature pour nos animaux domestiques, un retour à la vie sauvage, comme si celle-ci offrait une assurance « bien-être » à leurs protégés à quatre pattes. Cette façon de considérer notre activité, cette défiance grandissante vis-à-vis de notre manière d’élever les animaux, doit nous interpeller et activer notre conscience, quant à l’impact de nos activités sur le monde animalier en général. Quelle pression exerçons-nous ?

Ainsi, je me suis souvent demandé quel poids nous représentons dans la masse des êtres vivants de la Terre. Des scientifiques se sont amusés à calculer la part de chaque groupe dans la biomasse mondiale, laquelle est évaluée à quelque 540 milliards de tonnes, exprimées en masse sèche de carbone. Sans surprise, le règne végétal (450) pèse à lui seul 5 fois autant que tous les autres. Viennent ensuite les bactéries (70), les champignons (12). Les êtres humains ne représentent que 0,06 milliard de tonnes de carbone, tandis que l’ensemble des animaux domestiques pèsent tout de même 0,1 milliard de T, contre seulement 0,01 pour les animaux sauvages, mammifères et oiseaux !

Les humains ne sont que poids plume sur l’échelle de pesée de la vie, ainsi que la masse de son bétail. Mais celle-ci est dix fois plus importante que la masse des animaux sauvages. Depuis dix mille ans, les agriculteurs-éleveurs ont bien travaillé, serions-nous en droit d’affirmer, tandis que nos détracteurs nous accuseraient plutôt d’avoir contribué au déclin des espèces naturelles, au même titre que d’autres activités polluantes. Que répondre à cela ? Selon les positions occupées par chacun, le débat est sans fin et s’enlise dans un dialogue de sourds, un match avec prolongations et tirs au but sans qu’il y ait jamais un vainqueur.

Les défenseurs des animaux, dans l’absolu, ont des raisons respectables à faire valoir. Ils réclament davantage de bien-être et de considération pour toutes les espèces animales, sauvages ou domestiques. Mais les animaux de nos fermes, sélectionnés par nous pour leur placidité, leur rendement en viande ou en lait, dépendent entièrement des soins que nous leur prodiguons. S’ils relâchent le cochon de Tielt dans la nature, il mourra de faim, de maladie, périra misérablement dans un coin ou finira sous la dent d’un prédateur. S’ils le recueillent chez eux, ils seront obligés, eux aussi, de l’enfermer dans une loge et de le nourrir de je-ne-sais-quoi. Ces anges salvateurs finiront peut-être par le zigouiller et le manger, qui sait ?

Comme disait Pascal : « L’homme n’est ni ange, ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange, fait la bête, (…) jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il est un monstre incompréhensible. Que l’homme maintenant s’estime à son prix. »

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