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Programme de distribution de fruits, légumes, lait dans les écoles : «Former à l’importance de l’agriculture»

Le parlement vient de faire le bilan de l’exécution du dispositif scolaire de distribution de fruits et légumes, de lait et de produits laitiers dans les écoles entre 2017 et 2022. Une expérience remarquable, malheureusement mise à mal par un budget insuffisant et victime de tracasseries administratives.

Temps de lecture : 5 min

En cours depuis 2017, le programme européen de distribution de lait, de fruits et de légumes dans les écoles, accompagné d’une mesure éducative, vise à promouvoir auprès des élèves un comportement alimentaire plus sain, mais aussi à améliorer leurs connaissances sur les produits et les filières agricoles et agroalimentaires.

Mais cinq ans après l’entrée en vigueur de ce règlement, les résultats sont en-dessous des attentes initiales en raison d’une sous-utilisation budgétaire, des marchés publics organisés à l’échelle régionale ou même nationale au détriment des petits producteurs, de la charge administrative trop importante pour les écoles.

20 millions d’écoliers bénéficiaires entre 2017 et 2019

Et pourtant, ce programme permet la diffusion et un accès gratuit à une alimentation durable pour tous les enfants, quel que soit leur statut socio-économique.

L’eurodéputé socialiste belge Marc Tarabella en est le rapporteur. Voici quelques jours, il a expliqué devant ses collègues, en s’appuyant sur les conclusions d’un document produit par le service de recherche du parlement européen (EPRS), tout le potentiel de ce programme mais aussi les écueils dans sa mise en œuvre.

Il faut savoir que de 2017 à 2019, environ 20 millions d’écoliers ont pu en bénéficier. Cela ne représente toutefois que 20 % du nombre d’enfants âgés de 3 à 18 ans. « Ce chiffre est descendu à 16 millions en 2020 et 2021, la crise sanitaire les ayant éloignés des bancs d’école, mais cinq ans après l’entrée en vigueur de ce règlement, force est de constater que le programme est loin d’être un succès dans tous les États membres » a déploré M. Tarabella.

Entre 2017 et 2021, ce sont tout de même près de 240.000 tonnes de fruits et légumes frais et 580 millions de litres de lait qui ont été distribués dans les écoles en Europe. En Belgique, chaque année, environ 420.000 écoliers ont pu bénéficier du programme.

Le budget européen consacré à ce programme est de 250 millions € par année (un peu moins de 5 millions € pour la Belgique) pour la période 2017-2023.

L’étude de l’EPRS en révèle toute son importance puisqu’il ressort des témoignages des parties prenantes que les États membres n’auraient pas pu réaliser à eux seuls ce qui a été accompli par le programme en cours.

Les recommandations de Marc Tarabella

« En permettant une large diffusion et un accès gratuit à une alimentation saine et durable pour tous, le programme offre une belle opportunité de s’aligner sur les objectifs du Pacte Vert » a développé l’eurodéputé belge avant de souligner que l’étude avait pointé « quelques obstacles à son bon fonctionnement ».

Sans surprise, il pêche par son budget « pas assez important », sa couverture, ou encore les méthodes de distribution parfois trop complexes, faisant que certaines écoles finissent par renoncer.

À la lumière des conclusions tirées par l’EPRS, Marc Tarabella a formulé quelques recommandations afin d’améliorer le fonctionnement de cette initiative.

A commencer par une augmentation progressive de son budget actuel « qui ne représente pour le moment… qu’un seul fruit par semaine par enfant » a illustré le parlementaire qui a souligné que certains Etats membres n’utilisaient par contre pas le budget disponible, raison pour laquelle il s’est montré favorable à une redistribution au bénéfice de ceux qui l’utilisent bien.

Les pays baltes, l’Allemagne et certains pays de l’Est de l’UE présentent des taux de dépenses élevés. Par exemple, la République tchèque a utilisé 86 % des fonds en 2018 et 2019, et 87 % au cours de 2019 et 2020. Le pourcentage de fonds utilisés dans le reste des États membres varie (25 % au Portugal, 37 % en Belgique, 75 % en Italie).

« Par les temps qui courent, il n’y a rien de pire qu’un budget intéressant qui n’est pas utilisé » a glissé M. Tarabella.

Bio et locavorisme

L’élu socialiste souhaite par ailleurs qu’une part minimale de 10 % du budget soit dévolue à la mise en œuvre de mesures éducatives telles que des visites à la ferme « permettant aux enfants de retisser des liens entre la production et la consommation et d’expérimenter en direct le rôle essentiel joué par les agriculteurs ».

M. Tarabella souhaite également que les produits faisant l’objet d’une distribution soient non transformés, de préférence bio et en provenance de l’UE. À ces critères d’éligibilité, il ajoute leur saisonnalité, variété et disponibilité. « Priorité doit être accordée aux circuits courts reflétant, autant que faire se peut, les habitudes alimentaires et les types de culture de la région dans lesquels ils sont distribués ».

Lorsque les produits locaux ne sont pas disponibles pour des raisons géographiques, il convient de donner la priorité aux fruits et légumes provenant de la zone la plus proche où ils sont cultivés. Pour la même raison, lorsqu’un pays de l’UE ne dispose pas de fruits et légumes de saison locaux, l’approvisionnement doit provenir d’un autre État membre.

Enfin, il préconise de bannir les produits contenant du sucre, du sel, des graisses ajoutés ou des édulcorants. La future mise en œuvre devrait se focaliser sur les crèches, les écoles maternelles et primaires « car il est primordial pour les enfants de prendre de bonnes habitudes dès le plus jeune âge ».

Lourdeur de la charge administrative

La charge administrative est le principal obstacle au bon fonctionnement de ce programme. Un renforcement de la numérisation au niveau des écoles, des fournisseurs de denrées alimentaires, des administrations locales, pourrait constituer une piste.

Mais aussi faciliter les procédures dans l’attribution des marchés en respectant en toute occasion les critères de l’offre économiquement la plus avantageuse tout en veillant à ce que les grands fournisseurs ne puissent occuper une position prédominante au détriment des petits agriculteurs.

Former les enseignants à l’importance de l’agriculture

Pour plusieurs eurodéputés, on a trop souvent tendance à oublier que l’éducation à l’alimentation saine est un premier pas vers une bonne formation de consommateurs qui sont attentifs à leur santé.

Et l’un d’eux de répéter toute l’importance d’inviter les élèves et étudiants dans des coopératives afin qu’ils voient l’origine des produits qu’ils consomment. « Il faut former les parents, les enseignants à l’importance de l’agriculture et associer les petits agriculteurs ».

Marie-France Vienne

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