Accueil Archive

La mâche ne supporte pas l’« à peu près » !

La mâche agrémente la 4e gamme de septembre à juin, mais aussi aujourd’hui la période estivale avec ombrage partiel. Elle concerne alors des exploitations hautement spécialisées. À côté de cela, les fermes maraîchères diversifiées peuvent fournir le commerce de proximité avec un produit frais qui reste très apprécié de l’automne au milieu du printemps.

Temps de lecture : 9 min

Dans le marché saturé en permanence de produits frais de très haute qualité, les exigences commerciales de la mâche se sont adaptées. Cette culture est désormais conduite avec une technicité élevée. Une des grandes modifications fut le recours beaucoup plus fréquent à la plantation de plantules sur mottes au lieu du semis direct. Enfin, les critères qualitatifs élevés ont amené l’abandon progressif de culture de plein air et sous chenilles, au profit des cultures protégées sont tunnels maraîchers et cultures sous ombrages pour l’été.

La mâche est aussi particulière en ce sens que les frais de récolte constituent l’essentiel du coût de production. Si les prix sont trop bas, le maraîcher peut facilement abandonner la culture et en faire un engrais vert.

La culture

La place dans la rotation est celle d’une culture intermédiaire ou dérobée. Dans les fermes maraîchères diversifiées, la rotation de trois ans est respectée facilement, vu les surfaces en jeu. Dans les établissements spécialisés, la désinfection (vapeur) permet la maîtrise de l’enherbement et de maladies telluriques.

Le sol

C’est le maintien de fraîcheur sans asphyxie qui est le principal critère pour la mâche. Lors de la préparation du lit de semis ou de plantation, il n’est pas souhaitable de travailler le sol en profondeur. Un sol bien ferme et non foisonné convient le mieux. Pour les semis de fin d’été, la réalisation de faux semis permet de réduire les populations d’adventices à cycle court comme le mouron blanc, les galinsoges et le pâturin annuel.

Le semis

Valerianella locusta regroupe des variétés à grosses graines (300 à 500 graines/g) et à petites graines (700 à 1.000 graines/g). Les variétés à grosses graines donnent un feuillage plus ample, plus précocement, mais qui tient moins bien après récolte. La 4e gamme lui redonne un certain intérêt. Les variétés à petites graines sont le standard pour le marché du frais avec leur bonne tenue dans le rayon de présentation, la Verte de Cambrai est la référence historique citée dans les catalogues des semenciers.

La semence ne germe pas bien la première année après sa récolte, la période de dormance est assez longue. Par contre, elle conserve bien sa faculté germinative lors des 4 à 5 années suivantes.

Les sélectionneurs nous proposent maintenant des variétés adaptées à chaque période de l’année. Les qualités attendues sont la résistance aux maladies, la couleur du feuillage, la précocité.

Les semences de première année après la récolte lèvent mal, celles de 2e jusque 5e année ne posent pas ce problème. Le semis en place est utilisé en plein air et sous tunnel dans les fermes non spécialisées. Le plant en motte se généralise plus ou moins partout, même s’il revient plus cher. Les lignes sont généralement distantes de 15 cm pour permettre une certaine aération des plantes. Pour les semis directs, les graines sont enfouies de 1 cm et bien plombée (roue plombeuse derrière le soc semeur ou roulage de la surface).

Le semis en planches de 1,35 à 1,5 m d’axe en axe est commode pour l’entretien et les récoltes. La densité de plantation espérée sera de l’ordre de 180 à 200 plantes /m² de serre occupée ou 200 à 240 sur la sole nette (sans tenir compte des sentiers) pour les variétés à grosses graines. Elle sera du double pour les variétés à petites graines. Lors de plantation en mottes, on peut tendre vers une augmentation de la population finale, les risques de pertes par jaunissement des feuilles de la base étant moins importants.

La densité de semis ou plantation

Les centres de recherche appliquée s’intéressent beaucoup à cette question. Pour des récoltes effectuées lorsque les feuilles atteignent 7 cm, exigence de la 4e gamme, de bons résultats sont obtenus avec des densités de 550 à 750 graines par m². La densité est donc double de celle recommandée pour le marché du frais et ses 160 à 210 plantes/m². Les lignes sont écartées de 15 cm.

La sensibilité à la température

La germination se passe au mieux dans la fourchette de température du sol de 12 à 15ºC. Au-delà de 20ºC, la germination est capricieuse ; en culture estivale, les bassinages et l’ombrage permettent d’améliorer la situation. Début avril, dès que les températures remontent, la mâche tend à monter à graines. La résistance de la plante au froid est un facteur variétal et est meilleure encore pour les plantes qui n’ont pas atteint la maturité.

La fumure

Les exportations sont faibles, les reliquats de cultures précédentes suffisent généralement. Pour un calcul précis du bilan de la fumure, nous pouvons considérer qu’avec un rendement de 1 kg de mâche par m², les exportations sont de l’ordre de 40 unités d’azote, 22 de P2O5, 65 de K2O et 18 de MgO.

La culture en plein air…

Encore réalisée en culture complémentaire dans les fermes maraîchères très diversifiées, la culture de plein air présente l’avantage d’une occupation du sol peu encombrante après une récolte laissant le sol libre. Nous pouvons semer en place à partir de mi-août à mi-septembre pour récolter 35 à 55 jours plus tard.

… ou sous tunnel maraîcher

La mâche est cultivée en tunnels maraîchers, mais elle est en concurrence d’occupation de sol avec d’autres cultures possibles en hiver. Le choix de l’élevage en mottes permet de réduire le temps net en serre de production tout en facilitant la question du désherbage.

Soins…

Irrigation par aspersion ou brumisation maintiennent la culture en croissance en continu. Les apports répétés et fréquents d’eau sont requis pour un bon développement de la culture. Il faut proscrire les apports massifs qui provoquent une stagnation d’eau en surface et favorisent les maladies.

Quant au désherbage, les binages permettent dans une certaine mesure de limiter l’enherbement. Le napropamide (Devrinol, Naproguard) est homologué sur mâche de plein air à raison d’une seule application par 12 mois, en préémergence.

… et conduite culturale

La culture est de moins en moins pratiquée en plein champ, vu l’évolution du marché. Les maraîchers qui la pratiquent veillent à irriguer dès que les pluies se font attendre. Le tour d’eau est court et les doses sont faibles, 15 à 20 mm par passage tout au plus. Le semis direct est réglé pour permettre un éventuel binage entre les lignes. La plantation est commode mais est coûteuse pour le plein champ. La pose de voiles de forçage ou bâches perforées en fin d’année permet d’améliorer la qualité.

En culture sous tunnel maraîcher (couverture PE + EVA, en général), la culture souffre moins du vent, de la pluie battante ou de la grêle, au profit de la qualité et donc on économise le travail de parage à la récolte. Petits comme grands tunnels conviennent bien d’octobre à mars.

En avril et mai, la couverture plastique des abris temporaires ne doit pas donner d’effet de serre, mais simplement protéger la culture du vent et de la pluie battante. En cas d’emploi du tunnel classique en cette période, on peut blanchir les parois pour limiter la hausse diurne de température. De juin à septembre, un endroit protégé du soleil est requis, par exemple un tunnel couvert d’une simple couverture d’ombrage.

La récolte

La date de récolte est fonction du compromis entre la taille – et donc le poids de rosettes par m² – et le jaunissement des feuilles de la base. Les barquettes de 100 g sont groupées en colis de 2 kg par exemple. La mâche est vendue lavée et parée, mais en vente directe, le lavage n’est pas systématique.

La récolte est de l’ordre de 0,8 à 1,0 kg/m² en frais et en culture sous abris. En culture de plein air, la récolte est de l’ordre de 0,5 kg/m². Lorsque la production est destinée à la 4ème gamme, les exigences d’absence de feuille jaunie amène à récolte plus tôt et donc avec moins de production par m² : 0,5 kg/m² environ.

Mais ce qui compte vraiment, c’est le poids récolté par personne, parce que c’est le poste main-d’œuvre qui représente la part la plus importante du prix de revient. Comme ordre de grandeur, nous pouvons considérer que 10 kg de récolté et paré par heure de travail et par personne est un beau résultat.

La culture peut être conduite sur NFT, la récolte peut être mécanisée, notamment pour approvisionner la 4e gamme. Mais dans la grande majorité de nos fermes maraîchères wallonnes, elle est cultivée en pleine terre, sous abris ou non, et est récoltée manuellement.

Ravageurs et maladies

La mâche est sensible à la salinité, facteur fréquent d’échec dans les tunnels maraîchers lorsque la culture d’été a été trop peu irriguée. Cette culture est souvent la première à indiquer ce problème, avant les laitues ou d’autres plantes cultivées chez nous.

Faux-mildiou (Peronospora valerianellae) : des taches jaunes apparaissent sur les feuilles. Ensuite, du mycélium gris s’y développe. La maladie est favorisée par des densités de population trop importantes et des récoltes trop tardives. Certaines variétés sont résistantes à cette maladie. Plusieurs produits sont agréés.

Oïdium (Erysiphe polygoni) : des taches rondes blanches apparaissent sur les feuilles sur lesquelles apparaît ensuite le duvet blanc du champignon. Les conditions sèches et chaudes favorisent l’apparition de la maladie. Plusieurs produits sont homologués.

Phoma (Phoma valerianellae) : des taches noires évoluant en pourriture apparaissent sur la tige et les feuilles. C’est souvent le signe d’un problème de rotation mais aussi de qualité des semences et d’aération sous l’abri. Un sol gorgé d’eau favorise la maladie.

Pourriture grise (Botrytis cinerea) : des taches mycéliennes grises apparaissent sur la tige et les feuilles et provoquent leur pourriture. Elle apparaît quand les conditions de croissance ne sont pas idéales. Deux types de produits sont agréés en conventionnel : boscalid + pyraclostrobine et iprodione.

Sclérotiniose (Sclerotinia scerotiorum et S. minor) : un duvet blanc dense envahit la base des plantes et s’étend rapidement dans la population voisine. Ce champignon est présent en pas mal de sites maraîchers. Boscalid + pyraclostrobine est homologué en conventionnel, le Contans est utilisable en préventif et est accepté dans certains cahiers de charge bio.

Pourriture noire (Rhizoctonia solani) : les feuilles qui touchent le sol brunissent et pourrissent. Éviter la stagnation d’eau en surface du sol. Azoxystrobine et boscalid + pyraclostrobine sont homologués en conventionnel.

La mouche des semis : les larves de Delia platuraes rongent l’intérieur de la tige et la plante flétri. Les bonnes pratiques (éliminer les débris de culture, rotation) et les filets anti-insectes sont des méthodes de lutte.

La mouche mineuse (Liriomyza huidobrensis et spp.) : pique les feuilles et les larves creusent des galeries dans le parenchyme des feuilles. La lutte consiste à détruire les déchets de récolte et à surveiller les vols avec des panneaux englués jaunes dès la levée. Plusieurs produits sont agréés.

Chenilles défoliatrices font parfois des dégâts en automne. Bacillus thuringiensis ssp. kurstaki, deltametthrine, indoxacarb et spinosad sont homologues en mâche.

Bactériose : Acidovorax valerianellae provoque l’apparition de taches huileuses en bordure des feuilles. La maladie est surtout crainte lors de cultures répétées sur la même sole.

Pucerons. En cas de pullulation, les feuilles de mâche se crispent.

Limaces : classique. Voir aussi notre édition du 3 avril 2015.

F.

La Une

Entregreffages, sur-greffages et doubles greffages: des techniques qui ont leur intérêt au verger

Filière bois Si les fruitiers de nos vergers se composent le plus souvent d’un sujet porte-greffe auquel est greffée une variété fruitière, il arrive également que l’on ait recours à un entregreffe. Ce dernier permet, notamment, d’améliorer la compatibilité, de modifier la vigueur de la ramure ou encore d’adapter les arbres à un sol peu favorable. Le sur-greffage, lui, fait intervenir d’autres méthodes. Sur des arbres déjà en place, il permet de changer plus rapidement la charpente et la variété productrice de fruits.
Voir plus d'articles
Le choix des lecteurs