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Un nouveau bail à ferme

en vigueur le 1er janvier 2020

Les dernières modifications majeures apportées à

la loi sur le bail à ferme datent de 1969. Si les textes ont

connu quelques aménagements en 1988, depuis, plus rien !

Alors que le système actuel ne satisfait ni les bailleurs, ni les

preneurs… C’est dire si la réforme officialisée ce 28 février par

les ministres Collin et Crucke était attendue par toutes les parties.

Temps de lecture : 6 min

Plus de 70 % de la surface agricole utile wallonne sont soumis au régime du bail à ferme. Toutefois, le système en vigueur ne correspond plus à la situation actuelle. Les relations entre propriétaires et preneurs ont évolué, le prix des terres aussi. Et nombreuses sont les tentations de contourner la loi. Réformer le système était essentiel. Encore fallait-il trouver un consensus satisfaisant toutes les parties concernées.

De longues négociations

Pour y parvenir, le ministre wallon de l’Agriculture, René Collin, a entamé une série de discussions avec les représentants des bailleurs et des preneurs. Une première rencontre, en décembre 2017, a permis de définir les grandes orientations à intégrer dans la nouvelle mouture de la loi sur le bail à ferme.

Un an plus tard, le contenu de la réforme a reçu l’accord de toutes les parties prenantes (syndicats agricoles, organisation de propriétaires et plate-forme du foncier agricole). « Les attentes des signataires différaient. Certains souhaitaient aller plus loin sur quelques points, ou moins loin sur d’autres. Mais tous étaient conscients de la complexité de trouver l’accord idéal », explique le ministre.

Le 20 décembre dernier, le texte a été accepté en deuxième lecture par le Gouvernement wallon. Il a ensuite pris la direction du Conseil d’État, pour avis. Les différentes corrections demandées ont été effectuées, permettant au Gouvernement d’adopter le texte en troisième lecture ce 28 février.

La réforme

Désormais, les baux seront écrits et enregistrés, garantissant une date de début et de fin de contrat (des dispositions transitoires s’appliqueront aux baux en cours). Ils seront accompagnés d’un état des lieux, confié éventuellement à un expert.

Les échanges de parcelles devront obligatoirement être notifiés aux propriétaires concernés. « L’objectif n’est pas d’empêcher cette pratique mais bien de favoriser de saines relations entre le propriétaire et l’occupant effectif de la parcelle. » La sous-location demeure légalement interdite. En cas de non-respect de la loi, des sanctions sont prévues.

La réforme prévoit la fin du droit de préemption pour les agriculteurs âgés de plus de 67 ans bénéficiant d’une pension de retraite et sans repreneur sérieux. Il sera également mis fin aux cessions privilégiées abusives.

Des dispositions quant au congé donné à un preneur pensionné sont également prévues afin que le bailleur retrouve plus facilement la libre disposition de son bien dans ce type de situation.

Le propriétaire pourra donner un congé pour vendre une partie de la parcelle louée libre de droit. « Cette disposition concernera au maximum une surface de 2 ha ou 10 % de la surface louée. »

Deux nouveaux baux

De nouvelles dispositions concernent la durée des contrats. Il est ainsi mis un terme au caractère infini du bail. Le bail classique, liant preneur et bailleur pour 9 ans, ne pourra être renouvelé que trois fois.

Par ailleurs, la réforme introduit deux nouveaux types de baux : le bail de courte durée et le bail de « fin de carrière ».

Le bail de courte durée sera conclu pour une période de cinq ans. Son but : couvrir des situations particulières comme la liquidation d’une succession ou la sortie d’une indivision.

Le bail de « fin de carrière » permet aux deux parties de poursuivre d’un commun accord au-delà du troisième renouvellement, jusqu’au moment où le preneur atteint l’âge de la retraite.

Favoriser l’accès à la terre aux jeunes agriculteurs

Les baux de carrière et de longue durée seront soutenus, notamment via des incitants fiscaux en matière de droit de succession et de donation. « Afin de favoriser l’accès à la terre des jeunes agriculteurs, des avantages additionnels sont prévus si le preneur à moins de 35 ans lors de la conclusion du bail », précise le ministre wallon des Finances, Jean-Luc Crucke.

Ces avantages prennent la forme d’une réduction sur les droits de donation et de succession dus sur les terres soumises au bail à ferme. Cette réduction dépend du type de bail concerné et de la surface des terres :

dans le cas d’un bail de longue durée, conclu pour une durée de 27 ans :

– si le preneur a moins de 35 ans, 55 % de réduction sur les 4 premiers hectares faisant l’objet du bail transmis et 30 % de réduction pour une transmission au-dessus des 4 ha non inclus ;

– si le preneur a plus de 35 ans, 45 % de réduction sur les 4 premiers hectares faisant l’objet du bail transmis et 20 % de réduction pour une transmission au-dessus des 4 ha non inclus ;

dans le cas d’un bail de carrière, se terminant à la pension à 67 ans :

– si le preneur a moins de 35 ans, 75 % de réduction sur les 4 premiers hectares faisant l’objet du bail transmis et 50 % de réduction pour une transmission au-dessus des 4 ha non inclus ;

– si le preneur a plus de 35 ans, 65 % de réduction sur les 4 premiers hectares faisant l’objet du bail transmis et 40 % de réduction pour une transmission au-dessus des 4 ha non inclus.

L’octroi de ces avantages fiscaux est conditionné à la conclusion d’un bail via un acte authentique. Celui-ci doit ensuite être transmis à l’Observatoire foncier.

Afin de fixer dans la loi ces diverses modalités, un avant-projet de décret modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe en vue de soutenir la réforme du bail à ferme, présenté conjointement par les deux ministres, a été adopté par le Gouvernement en troisième lecture. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2021, après son approbation par le parlement.

Avec des clauses environnementales

René Collin poursuit : « Quel que soit le type de bail choisi, le propriétaire pourra ajouter une clause de lutte contre l’érosion ».

Les pouvoirs publics (communes, cpas, fabriques d’église…) auront également la possibilité d’ajouter des clauses environnementales dans les baux. Celles-ci pourront favoriser les produits locaux, l’agriculture biologique, le maraîchage… « Les pouvoirs publics ont une responsabilité supplémentaire vis-à-vis de l’environnement. Cela se traduira dans les contrats de bail. »

D’ici moins d’un an

La nouvelle loi sur le bail à ferme sera analysée en Commission parlementaire le 18 mars prochain. Elle sera soumise au Parlement de Wallonie dans le courant du mois d’avril. Son entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2020.

« La réforme du bail à ferme est stratégique pour l’agriculture wallonne et son modèle familial. Elle facilitera l’accès des jeunes à la terre et harmonisera les relations entre bailleurs et preneurs », conclut René Collin.

J.V.

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