Accueil Voix de la terre

ABS, ACS, même combat!

La mode est aux acronymes. Pour le commun des mortels, ABS rappelle le système d’assistance au freinage des voitures. Pour les agriculteurs flamands, c’est l’Algemeen Boeren Syndicaat. Pour les wallons, c’est tout simplement l’Activité Biologique du Sol.

Temps de lecture : 3 min

Les activistes de l’agribashing ont répandu la «fake news» selon laquelle nos sols seraient morts, faute aux agriculteurs. N’importe quoi, mais cela laisse des traces.

D’un autre côté, l’ACS, c’est l’Agriculture de Conservation des Sols, avec un C comme dans Carbone et dans Couvert. Tout évolue, même les terminologies. Avant, on parlait plutôt de TCS ou TCSL comme Techniques Culturales Simplifiées ou Sans Labour. Au XVIIe siècle, Jean de la Fontaine évoquait dans une fable «Le laboureur et ses enfants» le labour comme un labeur. Il n’y avait pas d’outil pour un réel retournement de sol.

Demain, on parlera sans doute de plus en plus d’agriculture régénératrice. Le sujet fut étudié au Centre wallon de recherche agronomique par Christian Roisin. C’est aussi la raison d’être de l’association Greenotec. Et l’homme qui incarne le mieux la démarche, depuis des décennies, est Frédéric Thomas.

Les circonstances, aiguisées par l’amitié, m’ont permis de le rencontrer récemment. «Trop cool!» comme disent les jeunes.

A l’heure où, trop souvent, le dogmatisme prend le pas sur la technique, avec Frédéric Thomas, j’ai vécu tout le contraire. Homme de terrain, évoluant avec son temps, il démontre combien l’agriculture a une place à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique. Gérer le travail du sol et maximaliser les couverts végétaux sont les deux mamelles de son raisonnement, pourrait-on dire en paraphrasant le roi Henri IV.

De fait, maximaliser la photosynthèse, c’est cultiver du carbone. L’associer aux argiles, c’est le stocker à plus long terme et améliorer la fertilité du sol via la CEC (Capacité d’Échange Cationique) du fameux CAH, «Complexe Argilo-Humique». En clair, il faut trouver un équilibre entre la vie microbienne qui consomme du carbone et l’argile qui le retient.

Pour ce faire, deux axes: le travail du sol sans excès et l’azote sans abus, mais en sachant qu’il est l’incontournable partenaire du carbone dans tout cycle de vie.

Mettre le couvert (végétal), c’est éviter que la terre se réchauffe et se dessèche trop vite et, finalement, mieux retenir l’eau dans le sol. «Cultiver le soleil pour récolter de l’eau», résume Frédéric Thomas.

Le maillon faible est souvent l’azote à trouver en suffisance. Les légumineuses ont leur limite. L’élevage le concentre et le transforme mais ne le crée pas. L’industrie le transforme aussi, mais en consommant de l’énergie fossile. Tout est alors question de «retour énergétique sur investissement».

Le résultat est sans appel: c’est le bilan énergétique par tonne de matière sèche produite qui est déterminant. Avec Frédéric Thomas, il n’est pas question de YNIAKA. Il est question d’observations et de raisonnement.

Vu sous cet angle, l’agriculture raisonnée peut être fière de ses résultats. Une agriculture trop extensive, consommatrice de terres, n’est pas l’idéal pour la planète.

Évidemment, il faut toujours plus de temps pour faire bouger les dogmes que les techniques mais ce sont rarement les dogmes qui nourrissent…

JMP

A lire aussi en Voix de la terre

Paysages en pays sage

Voix de la terre Il n’aura fallu que cinq jours ! Lundi matin, l’énorme vieille ferme dressait encore ses murs orgueilleux au milieu du village, défiant le temps et les saisons depuis trois cents ans. Vendredi soir, elle n’était plus là, tout simplement ! Disparue, envolée, comme si elle n’avait jamais existé. Un bulldozer, deux pelleteuses, ainsi qu’une noria de très gros tracteurs attelés de bennes, ont tout rasé et enlevé en quelques dizaines d’heures. Sur le terre-plein ainsi dégagé, sera bientôt construit un complexe de vingt appartements. L’un après l’autre, les derniers témoins de la vie agricole d’autrefois disparaissent des paysages intérieurs de nos localités.
Voir plus d'articles