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Retour en grâce ?

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L’hiver livre ces jours-ci ses combats d’arrière-garde. Il s’époumone force 10 et ses giboulées déboulent par vagues d’assaut sur nos plaines et nos collines. Mais il a beau tempêter, il n’arrêtera pas le printemps en route ! Les oiseaux le proclament chaque matin à tue-tête et les prairies reverdissent à vue d’œil. Hyper-connectés avec la nature, les agriculteurs sont aux premières loges pour admirer ce renouveau et s’en réjouir. Ce contact direct, cette immersion complète, personne ne peut les dénier, ni nous les contester. Ce paramètre fondamental, les défenseurs de l’environnement semblent enfin l’avoir intégré dans leur esprit obtus. Depuis quelques mois, une aura de sainteté, certes encore évanescente, s’est mise à briller au-dessus de nos têtes. De nouveaux concepts, -agro-écologie, agroforesterie, agro-environnement… –, se dessinent une place au soleil et enthousiasment nos amis écologistes. Après des décennies de dénigrement intensif, assistons-nous à un timide retour en grâce ? Nous revenons de loin, et le chemin est encore long à parcourir avant d’être tout à fait réhabilités, si nous le sommes jamais…

Somme toute, la protection de l’environnement est une préoccupation récente dans notre société. Elle est apparue dans les années 1960, après la mise en garde de scientifiques comme Rachel Carson aux États-Unis, laquelle avait tiré la sonnette d’alarme face aux excès monstrueux de pesticides utilisés en agriculture. L’écologie est devenue depuis lors une science à part entière, et ses études ont tout de suite pointé du doigt l’agriculture, coupable de détruire les écosystèmes naturels. « La forêt précède les hommes, le désert les suit ! ». Comme dans la fable de Lafontaine, les animaux malades de la peste ont eu beau jeu de crier ’’Haro’’ sur le baudet-paysan, dans un vaste amalgame où les agricultures de tous types étaient fourrés dans le même sac de nœuds, qu’elles soient familiales, industrielles, coutumières ou paysannes.

Tout est (ou était) de notre faute : la perte de biodiversité, la disparition des flores et faunes sauvages, la pollution des nappes phréatiques, le réchauffement de la planète et autres catastrophes écologiques. L’agriculture était LE problème. Puis l’Esprit Saint semble être descendu sur les défenseurs de la nature : ceux-ci ont concédé, vers l’an 2000, que nous étions une partie du problème, mais que nous possédions des solutions. La PAC a instauré l’Agenda 2000 et mis en place les MAE, puis, par le biais de la conditionnalité aux aides financières, a émis diverses directives pour intégrer l’agriculture dans sa volonté de protéger l’environnement. Depuis lors, ô miracle, nos vilipendeurs d’hier semblent s’apercevoir à quel point nous pouvons peser positivement sur l’avenir de la Terre.

C’est dingue ! Le grand écart est hallucinant. J’ai sous les yeux des articles d’un même organisme, les RNOB devenus Natagora. En 1998, l’un d’entre eux nous accuse des pires maux, que j’éviterai de mentionner ici, pour ne pas vous énerver. Mais dans le magazine Natagora de mars 2019, virage à 180º, on peut lire des textes consacrés au bienfait incommensurable des prairies, à la connexion étroite entre nature et agriculture, au rôle central des gens de la terre au sein des écosystèmes de nos campagnes. C’est une véritable déclaration d’amour ! En tout cas, cela y ressemble…

Selon les écologistes clairvoyants, nous avons été victimes de l’industrialisation de l’agriculture, au même titre que toutes les espèces naturelles impactées par les pratiques hyper-productivistes mises en place après la seconde guerre mondiale. Nous proclamions ce scandale depuis des lustres, mais les écolos restaient sourds et aveugles face à nos explications. Aujourd’hui, les gens de Natagora prennent notre défense, celle de l’agriculture paysanne s’entend. Ils vont même plus loin, quand ils affirment dans « Faut-il monétiser la nature ? », que nous remplissons dans les faits une mission d’intérêt public, et que nous méritons une juste rémunération, au même titre que d’autres services publics : l’enseignement, les soins de santé, la sécurité routière… Nous fournissons de la nourriture, nous soignons l’environnement et entretenons le milieu de vie élargi de millions d’individus. Nous stockons du carbone, et moyennant certaines pratiques, pourrions rapidement rendre à nos campagnes leur riche biodiversité d’avant l’industrialisation de l’agriculture.

L’argent public devrait être utilisé en ce sens, affirment-ils. L’ordre spontané du libéralisme, la liberté de tout détruire au nom du profit, notre société ne peut plus se payer le luxe d’y croire encore. Il faut replanter des haies vives, favoriser l’agro-écologie, s’inscrire dans un processus écosystémique où tous les paramètres (social, environnement, économie) interviennent de manière pondérée, avec au centre… l’agriculture !

Et bien dites donc ! Cette relecture de nos problèmes par les écologistes ressemble furieusement à un authentique retour en grâce ! Ou ne serait-ce là que des mots ? Après toutes ces tempêtes essuyées depuis des décennies, un renouveau printanier de l’agriculture est-il à nos portes, lui aussi ?

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