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Soyez vigilant : achetez

un bovin, pas une maladie !

Tout au long de sa carrière, un éleveur peut être amené

à acheter des bovins nés sur d’autres exploitations. Bien que paraissant anodin, cet acte accroît en réalité les risques d’introduction d’un pathogène dans son propre élevage. Plusieurs

mesures préventives permettent d’éviter pareille situation.

Temps de lecture : 7 min

L’achat de bovins constitue un risque majeur d’introduction de pathogènes au sein d’un élevage. Trop fréquemment, il arrive qu’un éleveur pense n’acheter qu’un animal alors qu’il acquiert, par la même occasion, l’une ou l’autre maladie pouvant affaiblir ou décimer son cheptel.

Pour protéger son troupeau, éviter tout achat est le plus facile. Ce conseil est toutefois difficilement applicable en pratique. « Des règles de biosécurité doivent alors être appliquées et respectées », insiste Julien Evrard, vétérinaire à l’Arsia.

Éviter l’introduction et la propagation des pathogènes

« La biosécurité regroupe toutes les mesures prises pour réduire le risque d’introduction d’une maladie dans l’élevage, d’une part, et la propagation de la maladie au sein du troupeau, d’autre part », poursuit-il. Plus les mesures de biosécurité sont efficaces, moins les pathogènes sont présents. Ce qui s’accompagne de nombreux bénéfices pour l’éleveur : augmentation de la production, diminution de l’utilisation d’antibiotiques, hausse du prix de vente des animaux… En outre, de nombreux plans de lutte, tel celui contre le BVD, s’appuient sur le respect de mesures de biosécurité.

Les règles de biosécurité s’articulent autour de cinq principes. Premièrement, il convient de séparer les animaux infectés des animaux risquant de l’être. « Tant les contacts directs qu’indirects doivent être évités. » Les mesures prises pour se préserver de l’arrivée et de la propagation des pathogènes diffèrent d’une maladie à l’autre, en fonction de leurs caractéristiques et du statut de la ferme.

Il est ensuite conseillé de prioriser les mesures biosécuritaires. « Il faut agir dans le bon ordre, en ciblant d’abord les comportements présentant le plus de risques (achat, transport…). Ce n’est qu’après que l’on travaille sur les comportements moins dangereux. »

En troisième lieu, il faut agir de manière à réduire la pression d’infection. « Toutes les mesures prises, même les plus petites comme le lavage de main, vont avoir une influence positive. Appliquées correctement, elles permettent notamment de bloquer le cycle d’infection et de soulager le système immunitaire des animaux. »

L’éleveur doit en outre adapter les mesures à la taille de son exploitation et au nombre d’animaux présents. Plus la ferme est grande, plus les mesures biosécuritaires doivent être importantes. De même, plus le cheptel est grand, plus la pression d’infection est importante.

Enfin, il est recommandé de surveiller la fréquence de répétition des risques. « Des petits risques peuvent rapidement être assimilés à un risque majeur s’ils se répètent considérablement. »

Être vigilant avant l’achat et durant le transport

Plus d’une quinzaine de maladies ayant un impact économique majeur peuvent passer d’un élevage à l’autre lors d’un achat de bovin : IBR (rhinotrachéite infectieuse bovine), BVD (diarrhée virale bovine), Mortellaro (aussi appelée dermatite digitée), mammite, paratuberculose, tuberculose, néosporose, besnoitiose… Julien Evrard conseille donc d’agir à trois niveaux : avant l’achat, lorsque l’animal est encore chez le vendeur ; durant le transport ; et après l’introduction dans son élevage.

Avant l’achat :

Idéalement, le nombre d’individus achetés doit être limité au strict nécessaire, afin de réduire les risques. Il convient également de minimiser le nombre d’origines différentes, c’est-à-dire de traiter avec le moins de vendeurs possible.

« Privilégiez des animaux sans descendance », recommande-t-il encore. En d’autres mots, optez pour une génisse plutôt qu’une multipare, pour une vache vide plutôt que pleine et pour un taureau vierge plutôt que non-vierge.

Le troupeau du vendeur doit être « sûr ». Il convient donc de favoriser les cheptels a priori sains plutôt qu’issus de régions à risques. « Les statuts IBR et paratuberculose constituent de bons indicateurs. Vérifiez-les ! » Le vétérinaire suggère encore de se tourner vers les petits troupeaux. « Ils présentent moins de risque que les cheptels plus grands. » Intéressez-vous aussi à l’historique du troupeau dans lequel vous choisirez un individu. « Pensez à demander conseil à votre vétérinaire ou marchand de bétail. Ils ne vous orienteront pas vers un élevage peu sûr »

Réaliser un examen clinique de l’animal avant son transport peut s’avérer utile. Une vaccination ou un traitement pourront être effectués, si nécessaire. « Toutefois, acheter un animal que l’on devra ensuite soigner n’est pas recommandé. »

Lors du transport :

Durant le transport, on évitera de mélanger des animaux d’origines différentes. De même, on utilisera un véhicule unique (si possible, celui de l’acheteur) qui sera nettoyé et désinfecté avant et après l’arrivée à la ferme. La distance séparant l’élevage du vendeur de celui de l’acheteur doit être minimisée autant que possible pour diminuer le stress des animaux.

Après l’achat, passage obligé par la quarantaine

Dès leur arrivée, les animaux acquis doivent être placés en quarantaine et observés. « La quarantaine doit être prise au sérieux », avertit le docteur Evrard. Et de détailler : « La séparation physique entre le troupeau et les animaux achetés doit être complète. De même, on veillera à terminer les soins par le local de quarantaine. Si un animal est porteur d’un pathogène, on évite ainsi sa propagation au reste du cheptel ».

Il conseille également de veiller à utiliser des vêtements et bottes différents, de se laver les mains et d’apporter une attention particulière au nettoyage et à la désinfection. Utiliser du matériel différent pour chaque catégorie de bovin est vivement recommandé. « Cela représente quelques frais, mais voir une maladie se propager dans le troupeau est bien plus coûteux… »

La quarantaine sera gérée selon le principe « All in/All out » : tous les animaux l’intègrent et la quittent en une fois. Hors de question de mélanger différents lots ! Et la durée ? Un minium de 21 jours est recommandé pour répartir le stress, réduire ou supprimer l’excrétion de certains pathogènes potentiellement présents et réaliser le diagnostique clinique. « Si l’on doit acheter des animaux, il faut s’y prendre bien à temps. Anticiper est essentiel. »

En outre, réaliser un diagnostic en laboratoire est préconisé. Les veaux issus de vaches achetées pleines sont aussi concernés par cette recommandation. La technique consiste à prélever un échantillon sanguin chez les animaux acquis et à y rechercher la présence de pathogènes ou d’anticorps produits suite à une contamination.

Établissez une convention de garantie sanitaire

Pour éviter l’introduction de pathogènes dans les élevages, l’Arsia a développé le kit « achat ». Celui-ci consiste à utiliser les échantillons sanguins (obligatoires) déjà réalisés dans le cadre de la lutte contre l’IBR pour dépister d’autres pathogènes (leptospirose, salmonellose, mycoplasmose, paratuberculose, néosporose et fièvre Q) (lire en page 16). Pour les individus importés de zones à risques (France, Espagne, Portugal, Suisse et Italie), rechercher la besnoitiose est vivement conseillé, d’autant plus que l’analyse est gratuite.

« Parlez-en à votre vétérinaire afin qu’il adapte la prise de sang aux analyses que vous souhaitez réaliser », précise Julien Evrard « À votre demande, des analyses supplémentaires peuvent être menées quant à la présence d’autres pathogènes. »

Les coûts de ce test sont relativement réduits. D’une part, parce que seules les analyses pertinentes sont réalisées (en fonction de l’âge et du sexe du bovin). D’autre part, en raison de l’intervention financière du Fonds de santé animale (pour tous les éleveurs) et de l’Arsia elle-même (uniquement pour les éleveurs cotisants).

Un kit « vente » est aussi disponible. Il consiste à contrôler l’état de santé des animaux avant qu’ils ne soient vendus, donc avant leur transport et leur introduction dans un nouvel élevage. « Pour l’éleveur qui souhaite valoriser son cheptel à la vente, ce kit lui permet de prouver l’état sanitaire de ses bovins aux potentiels acheteurs. » L’Arsia intervient dans son financement, contrairement au Fonds de santé animale.

Soulignons encore que l’Arsia a mis au point une convention de garantie sanitaire. Bien que non obligatoire, sa signature permet de garantir le retour du ou des bovin(s) dans leur élevage d’origine selon certaines maladies testées à l’achat. « La convention proposée est une base. Elle peut être adaptée en y ajoutant ou retirant des maladies, selon ce que conviennent l’acheteur et le vendeur. »

J.V.

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