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Uniquement pour cause d’utilité publique !

La rumeur circule que notre commune souhaiterait créer un nouveau sentier de 2 mètres de large sur 2km en plein milieu de parcelles agricoles. Personne ne nous a jamais contactés à ce sujet. La commune peut-elle nous exproprier pour cela ? Comment devons-nous réagir ?

Temps de lecture : 4 min

L’expropriation est réglée dans notre Constitution et le Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme.

L’article 16 de la Constitution stipule que nul ne peut être privé de sa propriété sauf pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité.

L’article 1 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme dit, entre autres, que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens et que nul ne peut être privé de sa propriété excepté pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

L’expropriation offre donc aux pouvoirs publics la possibilité d’obtenir, mais uniquement pour des motifs d’utilité publique, la disposition de biens, en particulier immobiliers, qui ne peuvent être acquis par les voies normales du transfert de propriété.

La notion d’utilité publique

La notion d’utilité publique n’est pas définie par un texte légal et, elle évolue au fil des années et en fonction des besoins publics. Par exemple, l’extension des aéroports, la suppression de passages à niveau, ou la construction d’écluses évoluent sans cesse. Il ne faut cependant pas confondre « l’intérêt public » avec « l’intérêt de tous les citoyens ». En effet, une expropriation peut avoir lieu pour satisfaire les intérêts d’une partie de la population, par exemple, pour l’agrandissement du domaine d’une université qui ne profitera qu’à une minorité de citoyens. Ce sont les administrations qui décident s’il y a réellement utilité publique ou non.

En tant que propriétaire, vous aurez la possibilité de faire des remarques et contester l’utilité publique du sentier que la commune veut tracer.

Enquête publique

Dans la procédure administrative, l’Administration informe, par envoi recommandé avec accusé de réception, les titulaires des droits sur le bien immobilier à exproprier, tels qu’identifiés dans le dossier d’expropriation, de son introduction.

Sous leur entière responsabilité et sans que la légalité de l’arrêté d’expropriation ne puisse être mise en cause pour cette raison, les titulaires des droits qui ont reçu l’information en adressent, sans délai, une copie aux tiers qui détiennent un droit personnel ou réel sur le bien immobilier.

Dans les trente jours de la réception de l’envoi par l’Administration, les titulaires de droits sur le bien immobilier à exproprier peuvent adresser leurs observations écrites à l’Administration. Toute observation envoyée au-delà de ce délai n’est pas prise en compte. Il est clair que vous devez à ce moment fortement contester l’utilité publique de ce sentier en argumentant qu’il est superflu et inutile.

Contrôle par le juge

Lorsque la cession amiable ne réussit pas, l’expropriant dépose au greffe du tribunal de première instance (lié à la situation des biens) une requête unilatérale afin de lancer la procédure judiciaire en expropriation. Le juge contrôlera alors la demande en expropriation.

L’arrêté d’expropriation doit être motivé en la forme et cette motivation doit être adéquate. Le juge juridictionnel n’a pas mission de remplacer l’autorité administrative et son pouvoir d’appréciation est limité : vérifier si l’auteur de l’acte est ou non resté dans la limite de son pouvoir d’appréciation et a fait une exacte application de la notion constitutionnelle et légale d’utilité publique.

S’agissant du contrôle de la proportionnalité de la mesure d’expropriation, seule l’erreur manifeste d’appréciation peut être sanctionnée. Le contrôle du juge est à cet égard marginal : il vérifie si l’autorité expropriante a justifié les raisons pour lesquelles il n’y a pas d’autre moyen raisonnablement admissible d’arriver au même résultat mais n’a pas à s’immiscer dans l’appréciation des considérations – financières ou techniques – de l’autorité administrative.

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