Les sclérotinioses, soyons attentifs!
De très nombreuses cultures maraîchères peuvent être attaquées par Sclerotinia sclerotiorum ou par Sclerotinia minor. Après cet été chaud et sec, n’imaginons pas qu’ils se soient endormis. Plusieurs facteurs sont favorables à leur reprise dans les prochaines semaines.
Les espèces de Sclerotinia
Les dégâts
Le climat belge convient parfaitement aux deux espèces de Sclerotinia: la température y est souvent un peu sous les 20ºC, les précipitations et l’humidité sont importantes. Nous avons été plutôt épargnés en été, l’automne peut redevenir favorable à ces champignons.
Parmi nos légumes, la plupart sont concernés exceptés les Alliums. Mais les dégâts sont les plus importants en laitues, en chicorées frisées, scaroles, chicon et en haricots. Tous peuvent être contaminés directement au départ du sol, les haricots peuvent aussi être contaminés lors de la floraison, via les pétales.
Les dégâts peuvent être considérables, et s’étendre très rapidement lorsque la température est optimale (serres en automne ou printemps, couches de chicons…). De plus, la pourriture peut s’étendre durant le stockage des légumes pour autant que la température dépasse 4ºC.
La lutte
Les sclérotes et le mycélium présents dans les débris de culture assurent la transmission de la maladie d’une culture à l’autre. Les sclérotes présents dans le sol peuvent être attaqués naturellement par des moisissures communes (Trichoderma, Gliocladium…) ou parasités spécifiquement par plusieurs organismes (Coniothyrium minitans, Sporidesmium sclerotivorum, Teratosperma oligocladum). Des centres de recherches ont pu déterminer que des fongicides anti Sclerotinia apportés dans le sol avaient un effet inhibiteur sur ces moisissures auxiliaires. Cela a joué sur la relative diminution d’efficacité de fongicides constatée dans les décennies précédentes. Des fongicides du sol qui furent utilisés contre Sclérotinia ont montré leurs limites pratiques. Ce fut le cas de benzimidazoles (methyl thiophanate, etc.) et c’est le cas de dicarboximides (iprodione, etc.). Leur emploi peut encore s’envisager, mais dans une stratégie incluant d’autres moyens de lutte.
Notons que seules les interventions préventives sont réellement efficaces. Quand une plante est contaminée, nous ne pouvons pas la guérir.
Les mesures préventives
Les mesures prophylactiques font intervenir des principes agronomiques généraux et l’hygiène d’exploitation. Les céréales ne sont pas sensibles à Sclerotinia et permettent de couper la rotation maraîchère. En théorie, nous devrions essayer de cultiver au maximum trois cultures sensibles à Sclerotinia par dizaine d’années, mais c’est pratiquement impossible dans les petites fermes maraîchères. Si des dégâts importants de sclerotinioses sont déplorés dans une parcelle, nous devons tenter de ne pas y cultiver de cultures sensibles durant quatre années.
La fumure azotée raisonnée permet d’éviter une luxuriance excessive de la végétation, elle-même favorable au maintien d’une importante humidité au sol. La minéralisation des matières organiques avec libération d’azote pourrait reprendre avec l’arrivée des pluies.
Sous abri, l’aération est déterminante pour diminuer la durée de présence d’un film d’eau sur les feuilles des plantes sensibles. Dans le même raisonnement, du moins de l’automne à mi-printemps, l’irrigation par aspersion sera programmée en milieu de journée pour que les plantes aient le temps de sécher avant la nuit. Ne pas hésiter à donner un petit coup de chauffage pour aider à sécher les plantes.
Si nous devions déplorer l’apparition d’un foyer de quelques plantes atteintes, il est vivement conseillé d’enlever celles-ci avec soin et précaution, de les évacuer hors de la zone de production, et d’assurer leur destruction ou désinfection. Cette précaution vaut en particulier pour les débris végétaux portant déjà des sclérotes. Ceci est possible tant que le nombre de foyers reste limité.
La lutte biologique
La lutte biologique par application de micro-organismes antagonistes microbiens concerne Corrithyrium minitans, aussi bien vis-à-vis de Sclerotinia minor que S. sclerotiorum. Il s’agit d’un parasitisme. C. minitans émet des suçoirs qui pénètrent dans l’organisme cible. L’inoculum primaire de l’agent pathogène diminue en densité. L’efficacité globale dépend de la densité en sclérotes de départ. Si elle est très élevée, le traitement devra être renouvelé pour la culture suivante. La lutte biologique avec Contans (Coniothyrium minitans) à raison de 2 à 4 kg de produit commercial par ha pour traiter le sol à une profondeur de 5 à 10 cm donne de bons résultats. Nous pouvons déjà appliquer préventivement le produit dès la destruction des résidus de la culture précédente. En cas de très fortes attaques, un seul traitement ne suffira pas, il faudra intervenir sur plusieurs cultures successives. Il est homologué en toutes cultures, y compris sur racines de chicons.
Serenade Aso (Bacillus subtilis) est homologué contre Sclerotinia en laitues de plein air à raison d’une à cinq applications à intervalles de 5 jours entre les stades 3 feuilles étalées et taille typique (environ 17 feuilles).
Amylo-X WG (Bacillus amyloliquefaciens plantarum) est homologué en plusieurs cultures sous abri.
La lutte chimique
La lutte chimique est envisageable également en culture conventionnelle, en mettant en œuvre des produits suivants leur homologation et les cultures concernées. Tous les produits ne sont pas utilisables sur toutes les cultures.
Plusieurs produits associant boscalid et pyraclostrobine ou cyprodinil et fludioxonil, ainsi que des produits de la famille des BCM et des produits basés sur iprodione ou fludioxonil ou fluopyram ou encore des produits incluant difeconazole, azoxystrobine ou isofetamide peuvent s’employer sur de nombreuses cultures différentes, avec des différences entre les produits, à vérifier au cas par cas sur www.fytoweb.be.