Lors de cette session d’épreuves gastronomiques, j’ai eu aussi l’occasion de goûter des repas entièrement végétariens, et de les apprécier pour leur légèreté. Les enfants en raffolent ! J’ai été frappé par leur engouement pour les tapenades, les houmous, les burgers sans viande et ce genre de préparations. Devant un steak, du boudin ou du foie gras, ils font « Bèrk ! ». Devant du lapin, du poulet ou de l’agneau, ils se lamentent et vous regardent comme un assassin ! Une génération V (comme Virtuelle et Végétarienne) se profile à l’horizon, et rien ni personne n’arrêtera son émergence !
C’est assez drôle : dans nos pays occidentaux, les sociologues ont classé en XYZ les générations qui ont suivi le baby-boom d’après-guerre. La génération X rassemble les personnes nées entre 1960 et 1980, une période marquée par le déclin des anciennes valeurs (religion, famille, moralité…), et l’émergence d’une conscience écologique. La génération Y (1980-1995) a grandi devant les écrans : la télévision et les ordinateurs. La génération Z, celle des jeunes d’aujourd’hui, est appelée également « génération silencieuse » ; elle est hyper-connectée, noyée dans les réseaux sociaux et s’attache à construire un monde entièrement numérisé. Les YZ aiment voyager, se veulent écologiques, et fustigent volontiers leurs aînés d’avoir épuisé la planète avec une insouciance scandaleuse, ne leur laissant que des problèmes à résoudre.
Les générations XYZ nous laissent pantois, nous autres papy-boomers qui peinons à suivre et assimiler les nouvelles technologies. Les anciens modes de vie se sont éparpillés dans tous les sens ! Les dernières places fortes des vérités d’hier ont été conquises et investies par d’autres certitudes, qui ont pris force de loi dans le comportement de ces jeunes générations. Ainsi, en alimentation, la viande, autrefois garante de force et de santé, est devenue suspecte, voire criminelle, aux yeux de nos enfants…
J’exagère à peine ! Observez autour de vous, et vous serez sidérés par leurs propos, par la justesse de leurs arguments. On serait tenté de suivre leurs conseils ! Ils ont été biberonnés, éduqués, enseignés au végétarisme : à la maison, à la crèche, dans les écoles maternelles et primaires ! À huit ans, ils vous montrent des vidéos de L214, filmées dans les abattoirs, d’autres de Greenpeace, sans oublier « Demain » et surtout le terrifiant « Cowspiracy ».
La génération V s’est dessiné une vision très négative de l’agriculture d’élevage et de toute la filière agro-alimentaire. Les journées à la ferme, les classes vertes et autres espaces-calins lors des foires agricoles n’y changeront rien, au contraire ! Allez expliquer à un enfant que le lapin, le petit cochon ou le veau qu’on lui donne à caresser est destiné à être tué et mangé quand il sera grand… La génération V adore les animaux, oui, mais vivants ! Ils ne font pas de différence entre leur chat domestique et la poule vouée à servir de nourriture.
Restaurer l’image de marque de la viande parmi les enfants est devenu mission quasiment impossible. Les spots publicitaires débiles et sans imagination ne font pas le poids, face aux vidéos et aux innombrables sites Internet qui nourrissent l’imaginaire de la génération V. Un livre comme « La viande voit rouge », par sa brutalité, son langage univoque et son discours convenu, apporte plutôt de l’eau au moulin des végétariens, flexitariens et autres véganes.
Petit à petit, la consommation de viande s’effondre. Trop sûrs d’eux, les acteurs de la filière se sont contentés d’engranger leurs bénéfices et d’écraser les éleveurs, sans se remettre en question, sans s’adresser aux enfants dans leur langage pour assurer la promotion de leurs produits. Mais ne vous faites pas de bile pour eux ! Demain, au lieu de vendre de la bidoche ou de la malbouffe, ils commercialiseront des produits végétariens, tandis que les agriculteurs des régions d’élevage seront voués à… végéter dans la viande ou à végétaliser leur production.
Que sera le monde dans vingt, trente ans, quand la génération V aura pris les rênes de notre société ? Ni meilleur, ni pire, j’en suis persuadé. Je l’ai constaté : une Galette des Rois carotte et gingembre, ce n’est pas mauvais du tout ! Et devinez qui a trouvé la fève ? Un petit gars de la génération V…











