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L’horizon s’obscurcit pour nombre de substances

Lors de la sortie de l’édition 2020 du Libre Blanc des céréales, Charlotte Bataille (Cra-w) et Benoît Heens (Cpl-Vegemar) ont fait le point sur la révision des agréations des moyens de lutte disponibles contre les maladies cryptogamiques.

Temps de lecture : 6 min

Tout produit de protection des plantes est constitué d’une ou de plusieurs substances actives qui définissent son spectre d’efficacité. Depuis 2014, les dossiers d’homologation des substances actives de la famille des triazoles sont en cours de révision par les autorités européennes.

Révision des triazoles

La plupart des triazoles (sauf le cyproconazole) devaient arriver à expiration entre le 30 avril et le 31 août 2019, mais l’évaluation des dossiers par la Commission européenne a pris beaucoup plus de temps que prévu de sorte que les dates d’expiration de ces molécules ont été repoussées d’un an (tableau).

Le propiconazole, c’est fini !

Le premier triazole à avoir été révisé est le propiconazole. Le 28 novembre 2018, le non-renouvellement de l’autorisation de cette molécule a été annoncé par la Commission européenne. Tous les produits à base de propioconazole ne sont donc plus commercialisés et leur autorisation d’usage a pris fin le 19 mars dernier. Il en est donc fini des Barclay Bolt, Bumper 25 EC, Propi 25 EC, Bravo Premium, Septonil, Stereo, Armure, Bumper P, Propiraz EC, Alto Ultra, Apache, Cherokee et Inovor.

Comme indiqué ci-avant, en ce qui concerne le metconazole, le prothioconazole, l’époxiconazole, le tébuconazole, les dates d’expiration initialement en 2919 ont été reportées en 2020, vu le retard pris par l’évaluation de ces dossiers. Le report pourrait même courir jusqu’en 2021 !

Epoxiconazole : dernière saison d’utilisation en France, en accord avec Basf

L’Anses (Agence nationale française de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a devancé le processus européen d’évaluation des dossiers. Elle a conclu que l’epoxiconazole est bien un perturbateur endocrinien risquant de nuire de manière non négligeable à la santé des personnes exposées à celui-ci. Elle a donc décidé, d’un commun accord avec Basf, de retirer du marché français toutes les formulations contenant cette molécule. Septante-six produits au total sont concernés et ne pourront plus être utilisés à partir du 30 juillet de cette année sur le territoire français.

Les produits à base d’epoxiconazole demeurent autorisés en Belgique.

Révision des LMR du prochloraz et adaptation de ses usages

Concernant le prochloraz – qui est un imidazole –, tout comme les triazoles, le dossier en vue du renouvellement de son homologation doit être soumis au plus tard le 30 juin 2021. Si tel n’est pas le cas, la date d’expiration provisoire de son utilisation est fixée au 31 décembre 2023.

Entre-temps, suite à l’avis de l’Autorité européenne de la sécurité des aliments (identification de risques pour la santé des consommateurs), la Commission européenne a quelque peu revu les limites maximales de résidus (MMR) de cette substance active en décembre dernier, provoquant des modifications d’usage des produits comprenant ladite molécule.

Concrètement, les modifications d’usage concernent les produits suivants : Ampera, Bumper P, Kantik, Mirage 450 ECNA, Propiraz EC et le Sportak EW.

Afin d’éviter le dépassement des nouvelles LMR du prochloraz :

– tous les produits cités ci-avant ne peuvent désormais plus être appliqués en orge tant d’hiver que de printemps ;

– un délai de 14 jours doit être respecté entre deux applications d’Ampera en froment, seigle et triticale ;

– le Mirage 450 ECNA et le Sportak EW ne peuvent désormais plus être utilisés en avoine d’hiver ;

– le Mirage 450 ECNA et le Propiraz EC ne peuvent plus être utilisés en betterave sucrière et fourragère.

Pour tous les autres usages autorisés, aucune modification n’est à signaler.

Le fenpropimorphe : encore deux saisons et puis stop !

Dans le cas du fenpropimorphe, la firme détentrice de son homologation a décidé de ne pas défendre la substance active et donc de ne pas déposer de nouveau dossier d’agréation pour cette dernière.

En pratique, l’approbation du fenpropimorphe au niveau européen est donc maintenant expirée. Les autorisations pour les produits phytopharmaceutiques suivants sont retirées : Capalo, Corbel, Diamant, Opus Team et Palazzo. La mise sur le marché et le stockage par le détenteur sont encore autorisés jusqu’au 30 avril 2020. La mise sur le marché et le stockage par des revendeurs, conseillers agricoles… est encore permise jusqu’au 31 mars 2021. Enfin, l’utilisation de ces produits est encore autorisée jusqu’au 31 octobre 2021.

Fin d’agréation du chlorothalonil

L’année passée, le Livre Blanc relatait un changement dans les utilisations en céréales du Bravo à la suite de la révision de son dossier d’homologation par le Comité d’Agréation belge. En effet, ce produit phytosanitaire composé de chlorothalonil ne pouvait plus être appliqué sur froment qu’à partir du stade dernière feuille (39) à la dose maximale de 2 l/ha et à raison d’une seule application par an.

Entre-temps, la substance active en elle-même, le chlorothalonil – le fer de lance de la lutte contre les résistances en céréales grâce à son mode d’action multi-sites – était en cours de révision par les autorités européennes. Le 22 mars 2019, la sentence est tombée avec le non-renouvellement de l’agréation de cette molécule voté par la Commission européenne. En effet, cette substance active ne répondait plus au haut niveau de sécurité actuellement recherché par la législation européenne.

Les raisons du non-renouvellement sont multiples, mais le manque d’information au niveau des points toxicologiques et écotoxicologiques du dossier ainsi que deux points importants des conclusions de l’Efsa et de la Commission européenne sont à mettre en avant :

– les métabolites du chlorothalonil, produits lors de la dégradation de la substance active dans l’environnement, pouvaient potentiellement se retrouver dans les eaux souterraines en quantité supérieure à la limite autorisée (> 0,1 µg/l), ce qui aurait pu induire des risques pour la faune des cours d’eau mais aussi pour les consommateurs exposés à cette eau contaminée ;

– un changement de classification de la molécule de « suspectée d’être cancérigène » à « présumée cancérigène»  avait été proposé par l’Efsa conformément au règlement (CE) 1272/2008. Cette classification exclut automatiquement la substance active de tout renouvellement d’agréation sur le marché européen.

Conséquences pratiques

Le non-renouvellement de l’agréation du chlorothalonil au niveau européen engendre la déchéance des autorisations de tous les produits contenant cette molécule et ce, dans tous les pays d’Europe. De nombreux produits sont concernés en Belgique : Abringo, Amistar Opti, Balear, Barclay Chloroflash, Bravo, Bravo Xtra, Citadelle, Divexo, Life Scientific Chlorothalonil, Olympus, Panax, Perseo, Proceed, Pugil, Spirodor et Taloline...

La mise sur le marché et le stockage des produits par des revendeurs étaient autorisés jusqu’au 20 avril 2020. Tous ces produits perdront leur agréation le 20 mai prochain et ne pourront plus être utilisés à partir de cette date.

Cette année, il serait donc encore possible de traiter les cultures d’escourgeon au stade dernière feuille (39) avec ces produits. Ils pourront également être utilisés (sauf Bravo) en froment pour l’application en T1 (stade 2e nœud, 32).

Propos recueillis par M. de N.

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