chevaux puissants ont regagné en
visibilité, pour le plus grand bonheur de leurs amoureux de toujours. Parmi eux, Louis-Philippe Borremans, tombé dans la marmite quand il était petit et aujourd’hui président des Écuries du Hainaut.
« L’année passée, une vingtaine de juments sont venues pour un accouplement. À Soignies, il y a encore pas mal d’éleveurs de trait belge. Par ailleurs, je ne travaille qu’en saillie naturelle, pas en insémination, par facilité », raconte le Hennuyer.
Outre les mâles, l’éleveur possède également sept juments dans sa ferme située à Soignies, dont trois qui, à l’heure où vous lirez ces lignes, auront probablement pouliné. En attendant le jour J, elles restent paisiblement dans leur stabulation, juste en face des Blonde d’Aquitaine, les autres pensionnaires de l’exploitation. Pour qu’elles soient en pleine forme pour accueillir leur nouveau-né, elles peuvent profiter de leur foin à volonté et d’une ration complémentaire de concentrés de 2 à 3 kg par jour. « Toutefois, lorsque c’est la belle saison, elles sont tout le temps en prairie ».
De Soignies… à la Pologne
Ensuite, lorsque les poulains auront vu le jour, l’éleveur choisira lesquels il gardera chez lui, principalement des femelles, et ceux destinés à d’autres contrées, parfois bien éloignées des nôtres.
Calme, heureusement ! Vu leur morphologie, mieux vaut avoir affaire à des animaux à sang froid. D’ailleurs, outre leur tempérament, les qualités d’un cheval de trait belge sont sa hauteur au garrot, sa musculature importante, une bonne profondeur au niveau de la sangle afin de pouvoir ingérer suffisamment de nourriture et avoir la force nécessaire pour travailler. En outre, il doit posséder des membres sains, plus légers que ce qui était recherché autrefois. L’objectif est de limiter les maladies et d’assurer la longévité des animaux.
Enfin, pour savoir s’il correspond aux critères de la race, voici l’astuce de Louis-Philippe Borremans : lorsque vous observez un étalon, faites un carré avec vos doigts. Il faut que son corps puisse rentrer dedans. Bref, il doit être bien compact.
De plus, si vous vous demandez comment reconnaître un cheval de trait belge d’un ardennais, c’est simple : fiez-vous à sa taille. Les premiers sont plus grands que les seconds.
La transmission du virus…
Toutes ces caractéristiques, le passionné d’équidés peut les citer par cœur. Logique, puisque les chevaux, il les côtoie depuis bien longtemps. Un amour équin hérité de son père, Stany Borremans, vétérinaire pour gros animaux. Ce dernier a racheté la ferme en 1996 avec son épouse, médecin. C’est ainsi que les bêtes sont arrivées dans l’exploitation de Soignies, comme Alpha, leur première jument.
Malheureusement, il y a 25 ans, le papa décède, et les trois garçons aident leur maman à gérer le site. Puis, Louis-Philippe rencontre une autre personne qui changera sa vie : Jules Duret. Également éleveur de trait belge, il lui transmettra le virus.
« Il nous a vendu Marquise qui avait des origines et avec laquelle nous avons pu élever. Lorsque mon père n’était plus là, j’ai passé toutes mes vacances chez lui. Il m’a appris à apprécier ces animaux, à les faire travailler et à sélectionner les meilleurs », se souvient-il.
Après Gamin, en 2004, naît Ariane, la première avec laquelle il participe à des concours et qu’il attelle. « Elle vit toujours, elle a maintenant 22 ans ». Vient aussi Bourvil, son étalon admis, avec lequel il commence à proposer des saillies. Peu à peu, sa passion prend racine…
Le jeune homme réalise un bachelier en agronomie à Ath. Il se lance aussi, avec succès, en politique, puisqu’il siège comme échevin de l’agriculture durant six ans à Soignies. Aujourd’hui, celui qui a plus d’une corde à son arc poursuit sa carrière dans l’agriculture et travaille dans l’alimentation animale.
Un job qu’il parvient à conjuguer avec sa vie à la ferme. Une vie bien remplie, puisqu’il y cultive 66 ha, de quoi être en autonomie fourragère tant pour ses vaches allaitantes que pour ses chevaux.
À la campagne, comme à la ville
Appréciés par les éleveurs, jeunes comme Louis-Philippe Borremans (33 ans) ou plus âgés, ces animaux ne sont pas que beaux… Ils représentent aussi un outil de travail non négligeable.
D’ailleurs, ils font de plus en plus d’adeptes. En effet, peu à peu, ces chevaux (re)trouvent leur place en maraîchage, en débardage, dans les vignes… et même en ville ! « Il y a six ans, le ministre Borsus a instauré des primes à destination des communes pour encourager leur utilisation. À Soignies, nous avons, par exemple, réalisé le ramassage des sapins et la tonte des Ravel. Puis, nous profitons des activités locales pour les mettre en avant. Ils gagnent, dès lors, en visibilité et suscitent à nouveau l’intérêt du public, comme nous l’avons constaté au salon Agridays à Tournai. Puis, certains fermiers arrivant à la pension qui en avaient autrefois, décident d’en reprendre, parfois par nostalgie », indique le passionné avant de compléter : « Ce que j’aime réellement avec ces chevaux c’est le rendu qu’ils donnent lors des cortèges, par exemple. Cependant, il faut également montrer leurs différentes utilisations possibles ».
La preuve : dans son exploitation, Louis-Philippe n’hésite pas à joindre l’utile à l’agréable. Les jeunes chevaux sont attelés pour la première fois à un an. À deux ans et demi, ils doivent être prêts pour intégrer ensuite les cortèges dès leur troisième année. « Je m’en sers, notamment, pour remonter des bois ou rouler la terre avant les semis… Travailler dans les champs leur permet de se familiariser au mieux. En effet, on ne débarque pas au milieu d’une ville avec un chariot, sans qu’il ait eu un bon apprentissage au préalable ».
Si ses chevaux sont mis sous les feux des projecteurs lors d’activités folkloriques, comme la Ducasse d’Ath, ils prennent également part aux concours équins. Des compétitions wallonnes qui gagnent en excellence… Dans la province du Hainaut, où une dizaine y sont organisées, les participants se montrent de plus en plus prometteurs. « 70 à 80 % des traits belges viennent du nord du pays. Et selon les Flamands, la qualité de nos compétitions égale, voire dépasse, la leur pour les jeunes chevaux », se réjouit Louis-Philippe.
Comme d’autres férus de la race, ce passionné espère que ces animaux resteront une fierté nationale et que tout un chacun pourra apprécier ses nombreuses qualités. « Il ne faut oublier que le cheval de trait a rapporté plus d’argent que l’industrie lourde dans les meilleures années de sa vie ». Bref, un héritage du passé prêt, à présent, à s’inscrire dans l’avenir.
