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L’ébourgeonnage des jeunes caprins nécessite de suivre certaines règles pour être réussi et sans douleur pour l’animal

« Si les cornes sont des éléments naturels de défense, leur présence dans les troupeaux caprins n’est pas sans risque. L’ébourgeonnage des jeunes caprins limite non seulement les risques de blessure entre animaux, mais facilite aussi leur accès à l’alimentation et le travail de l’éleveur. Toutefois, l’intervention nécessite le respect de certaines règles afin qu’elle soit réussie et sans douleur pour l’animal », a ainsi débuté Béatrice Mounaix, de l’Institut de l’Élevage, dans le cadre d’une conférence sur le sujet au Space, en septembre dernier.

Temps de lecture : 7 min

«  Bien ébourgeonner les jeunes caprins, c’est s’assurer de travailler dans les meilleures conditions, pour l’éleveur comme pour l’animal. »

Mme Mounaix : « Cette pratique a beau avoir du sens, elle reste douloureuse. Raison pour laquelle il existe un guide des bonnes pratiques qui préconise 6 grands points à respecter. »

Intervenir le plus tôt possible

Mais avant de l’aborder, l’important est de pouvoir intervenir au bon âge, soit le plus tôt possible. Et référer au schéma du développement de la corne du veau (cf. Fig. 1), car il n’en existe tout simplement pas pour les chevreaux (le principe reste identique).

Fig. 1: développement de la corne chez le veau. RMT BEA
Fig. 1: développement de la corne chez le veau. RMT BEA

« Au départ le bourgeon cornual est un amas de cellules qui va contribuer au développement de la corne. Celui-ci est libre dans la peau et, au fur et à mesure du développement de la corne, il va non seulement produire du tissu osseux mais aussi le rattacher aux os du crâne. Dans un même temps, on assiste à l’ouverture du sinus de la corne sur le sinus frontal. » L’ébourgeonnage consiste donc à couper l’irrigation de ce bourgeon pour l’empêcher de se développer. Intervenir plus tard, une fois la corne en développement reviendrait à parler d’écornage.

« Chez les bovins, à partir de deux mois, le développement de tissu osseux commence. La corne est alors rattachée au crâne avec les sinus en communication. Intervenir à ce moment est donc plus long, plus compliqué et le risque d’infection plus grand. Il est donc conseillé d’intervenir en veaux sous 4 semaines »

En regard à ce qui précède, chez les caprins, le développement de la corne est beaucoup plus rapide. Il est en effet conseillé d’intervenir de 2 à 5 jours après la naissance pour les mâles et entre 3 et 7 jours pour les femelles. Selon l’Association nationale interprofessionnelle caprine (Anicap), l’idéal est d’intervenir après 48h de manière à s’assurer une bonne vigueur des chevreaux.

Les bonnes pratiques

en six points clés

Six bonnes pratiques ont été définies de manière à faciliter l’ébourgeonnage ave un fer, limiter le risque de douleur supplémentaire et diminuer les risques infectieux et de repousse.

1) Bien maintenir l’animal

Pour bien travailler, il faut bien maintenir le chevreau / la chevrette pour éviter qu’il ne bouge de manière à bien positionner le fer à écorner et ainsi le faire de façon rapide facile et efficace.

On peut le faire via des équipements de contention ou les maintenir avec les mains. l’idée est de limiter le stress de l’animal et empêcher les mouvements de tête.

L’Anicap précise de ne pas trop appuyer sur le chanfrein pour ne pas gêner la respiration.

À noter qu’un animal sédaté n’a pas besoin d’être maintenu

2)  T ondre le bourgeon

« C’est peu être un peu nouveau pour les éleveurs caprins mais il est conseillé de tondre la zone du bourgeon cornual afin de bien déterminer où se situe l’amas de cellules et ainsi bien visualiser ses contours pour ensuite bien positionner le fer.

Tondre permet également de limiter le dégagement de fumée et l’encrassement du fer.

3) Cautériser le bourgeon

Ébourgeonner ou cautériser le bourgeon implique de brûler les vaisseaux sanguins qui alimentent le bourgeon cornual. Pour ce faire, positionner le fer à la perpendiculaire du crâne autour du bourgeon cornual en appliquant une pression légère et constante.

Notons qu’un fer suffisamment chaud permet de limiter à 3 ou 4 secondes d’applications avec moins de risque de complication.

Sur les animaux très jeunes, il est inutile d’enlever le cornillon après cautérisation

L’Anicap met en garde ! La faible épaisseur du crâne des caprins entraîne un risque important de méningite si l’intervention est mal réalisée !

4) Vérifier la cautérisation

Une cautérisation bien réalisée rime avec bourgeon isolé des tissus périphériques.

5) Désinfecter la plaie

Appliquer immédiatement un produit antiseptique en spray pour limiter les risques infectieux et refroidir les tissus cautérisés(effet rafraîchissant sur le moment probablement intéressant pour l’animal). À noter qu’il vaut mieux éviter l’aluminium tant il n’a pas d’action désinfectante.

6) Surveiller les animaux

Au vu de leur très jeune âge, il est important de surveiller les animaux dans les heures et les jours qui suivent. Quel est l’état de l’animal ? Comment récupère-t-il ? A-t-il retrouvé de la vivacité ? Normalement, la récupération doit être très rapide après l’intervention. Les chevreaux doivent être maintenus au repos sur une litière propre dans un endroit sec et chaud.

L’Anicap conseille de surveiller pendant 3 jours les animaux anorexiques ou manquants de coordination. L’administration rapide d’un antibiotique et d’un anti inflammatoire adapté peut sauver ces chevreaux.

L’ébourgeonnage des chevrettes et des boucs limite ces risques, facilite l’accès à l’alimentation et sécurise le travail de l’éleveur.
L’ébourgeonnage des chevrettes et des boucs limite ces risques, facilite l’accès à l’alimentation et sécurise le travail de l’éleveur. - Anicap

Prendre en charge

la douleur

La zone du bourgeon cornual étant très innervée, sa cautérisation est source de douleur, quel que soit l’âge auquel elle est réalisée. Ceci se traduit par des comportements d’évitement, des mouvements vigoureux, des pattes et des vocalises lors de l’application du fer.

Graph. 1: analyse de la douleur durant l’écornage chez le veau. D’après de Boyer des Roches, 2016.
Graph. 1: analyse de la douleur durant l’écornage chez le veau. D’après de Boyer des Roches, 2016.
Pour analyser la douleur pendant un écornage, le profil de cortisol durant l’intervention a été étudié chez le veau, soit le profil de la molécule synthétisée dans des situations de stress. On y distingue 3 composantes de la douleur. :

– le stress ressenti par l’animal lors des manipulations et de la contention ;

– la douleur aiguë de la brûlure des tissus lors de l’application du fer ;

– une inflammation des tissus cautérisés qui peut persister plusieurs heures après l’écornage.

Toutefois, il est possible de limiter la douleur que ce soit avant ou après l’intervention.

L’utilisation d’un sédatif évite le stress occasionné par les manipulations et limite la douleur ressentie par l’animal. Il entraîne une perte de conscience, entre 15 et 60 minutes, variable selon les animaux.

Après l’intervention, malgré l’absence de signes visibles pendant les heures suivant la cautérisation, l’inflammation locale générée justifie la prise en charge de la douleur chronique par des anti-inflammatoires administrés avant intervention.

Pour les chevreaux non sédatés, l’observation d’une modification du comportement, des mouvements d’oreille ou de la tête témoignent d’une douleur importante et imposent de revoir la procédure d’ébourgeonnage avant de mettre en place une sédation.

 Se faire accompagner par son vétérinaire

Les modalités de prise en charge de la douleur lors de l’ébourgeonnage sont réduites et certains produits sont à utiliser avec précaution, en respectant strictement les doses du fait de la sensibilité des caprins à certaines molécules.

Votre vétérinaire vous indiquera la prose en charge adaptée à votre situation ? Son accompagnement lors des premières séances d’ébourgeonnage sans douleur vous permettra de réaliser ensuite cette intervention seule, avec les produits qu’il vous aura prescrite.

 Les précautions à prendre lors du recours à la sédation

La sédation profonde, par exemple par injection intramusculaire de xylazine, peut faciliter l’organisation d’un ébourgeonnage sans douleur. Elle nécessite de peser chaque animal ou d’estimer son poids par ajuster la dose et éviter les risques de surdosage. La mise à la diète des animaux quelques heures avant est aussi recommandée. Attention à éviter le refroidissement rapide des animaux endormis et les risques de piétinement par les autres. La respiration est souvent irrégulière. La sédation groupée par 10 animaux est compatible avec la durée d’action du sédatif. L’utilisation d’anti-inflammatoires permet de prendre en charge la douleur persistante après l’intervention. L’anesthésie locale des nerfs cornuaux et en revanche un acte difficile réservé au vétérinaire.

Davantage d’infos sur www.idele.fr/

detail-article/lebourgeonnage-des-

jeunes-caprins ou sur www.anicap.org.

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