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« Seuls des tubercules

de qualité permettent

d’accroître la rentabilité »

Depuis la fin des années ‘60, la famille Van Puymbrouck

cultive des pommes de terre. D’abord à Kieldrecht, pour

la vente au détail ; ensuite à Tourinnes-Saint-Lambert,

à destination de l’industrie. Mais un seul objectif l’a

toujours animée : produire des tubercules d’une

qualité exemplaire, dans le respect de ses clients.

Temps de lecture : 8 min

Originaire de Kieldrecht, commune de Flandre-Orientale située à quelques kilomètres à peine de la métropole anversoise, la famille Van Puymbrouck se voit contrainte de quitter sa ferme en raison de l’extension du port d’Anvers, à la fin des années ‘70.

Après avoir visité une vingtaine d’exploitations en Wallonie, la famille jette son dévolu sur une ferme située à Tourinnes-Saint-Lambert, en Brabant wallon. Elle s’y installe en août 1980, reprenant ainsi quelques têtes de bétail Blanc-bleu-belge inscrites au herd-book et une quarantaine d’hectares de cultures.

Petit à petit, la famille prend possession des lieux et, en 1991, Jean-Pierre Van Puymbrouck rejoint ses parents sur l’exploitation. Dès 1994, ils se lancent, ou plutôt se relancent, dans la culture de la pomme de terre. « Mes parents avaient stoppé cette activité en quittant Kieldrecht mais dans l’idée de la relancer un jour ou l’autre, pas de l’abandonner définitivement. Quand on a le virus de la pomme de terre, impossible de le perdre ! », se souvient-il.

Trois variétés « à frites »

Aujourd’hui, Jean-Pierre, sa femme et ses parents cultivent 640 ha, dont 280 sous forme de contrats annuels. Sur leurs terres, on retrouve des betteraves, des chicorées, des pommes de terre, du froment, de l’escourgeon, de l’avoine de printemps (pour la multiplication) et de l’orge de brasserie (pour la multiplication, également). L’élevage BBB a quant à lui été abandonné en 2011.

Concernant la pomme de terre en particulier, la famille s’est spécialisée dans les variétés dites « à frites ». Cette année, la surface dédiée à cette culture a été répartie entre trois variétés : Royal (45 % de la surface), Innovator (42 %) et Markies (13 %). « Travailler avec plusieurs variétés nous permet d’étaler les récoltes mais aussi de lisser les risques », explique l’agriculteur.

Le choix des variétés se fait en totale collaboration entre la famille Van Puymbrouck et son unique acheteur, McCain, avec qui elle est sous contrat exclusif depuis 1998. « Avoir un seul partenaire est un gage de confiance et de transparence, notamment lorsqu’il est plus difficile d’honorer les contrats… Ce qui, cette année, sera le cas pour certains agriculteurs. » En effet, Jean-Pierre et bien d’autres font face à une chute de rendements allant jusqu’à 40 voire 50 % sur certaines parcelles, en raison de la sécheresse qui a frappé la Belgique ces derniers mois.

À cette baisse de production, s’ajoute une réduction de la taille des tubercules. Habituée au calibre 40 mm et plus, la famille stockera, cette année, des pommes de terre d’un calibre 30 mm et plus.

La qualité, à la plantation comme à la récolte

Quand vient le moment de la plantation, étape ô combien cruciale, trois équipes se relayent 24h/24 autour de la planteuse. Ainsi, il est possible de tirer pleinement profit des conditions climatiques, lorsque celles-ci sont optimales. Mais la saison commence quelque semaine auparavant, par la livraison des plants. Ceux-ci sont analysés méticuleusement par l’agriculteur : « Il en va de l’avenir même de la future récolte. Nous ne pouvons accepter la moindre négligence ».

Au champ, la famille opte depuis toujours pour un inter-rang de 90 cm. « Il s’agit d’un choix logique », explique-t-il. « Les variétés que nous cultivons, et plus particulièrement la Royal, produisent des tubercules de grande taille. Un tel inter-rang nous permet d’avoir des buttes suffisamment larges pour les recouvrir entièrement de terre et réduire les risques de verdissement. » En outre, la planteuse est dotée d’un dispositif de création de micro-digues entre les buttes, afin de réduire les problèmes d’érosion et éviter les coulées de boue.

Pour la récolte, les Van Puymbrouck disposent depuis cette année d’une arracheuse Ploeger AR-4BX. Cette machine 4 rangs, peu courante dans le paysage agricole wallon, répond à plusieurs critères qu’ils s’étaient fixés. D’une part, elle est équipée de chenilles. D’autre part, sa trémie est de grande capacité et son canal d’arrachage affiche la même largeur sur toute la longueur de la machine. « Ainsi, le tamisage est meilleur et les tubercules subissent moins de chocs », estime Jean-Pierre.

Quatre bennes Dezeure, identiques les unes aux autres pour faciliter les opérations de chargement et déchargement, l’accompagnent durant l’arrachage. Toutes sont équipées de matelas, de brise-chute et de bâche à repliage hydraulique afin de maintenir la qualité des tubercules durant la vidange de la trémie et le transport vers la ferme, où ils sont entreposés.

Stocker et livrer jusqu’à 17.000 t

Au sein de l’exploitation, le premier bâtiment de stockage a vu le jour en 1998, après que la famille ait visité des dizaines d’installations. « Auparavant, le stockage se faisait de manière plus précaire, dans les anciens bâtiments de la ferme. Ces visites nous ont permis de choisir l’infrastructure qui correspondait le mieux à nos critères, en combinant les diverses technologies que nous avons pu voir en conditions réelles d’utilisation. »

Depuis, de nouvelles cellules ont été construites. Aujourd’hui, la famille dispose d’une capacité de stockage longue durée de 15.000 t, auxquelles s’ajoutent 2.000 t dédiées au stockage à court terme. Ainsi, l’entièreté de la récolte peut être entreposée sur place.

Parmi les nouvelles cellules, certaines peuvent également accueillir des céréales, quand le besoin s’en fait sentir. Pour éviter toute contamination des grains, les pommes de terre qui sont conservées dans ces cellules « mixtes » ne sont pas traitées au chlorprophame.

L’ensemble des installations se trouve sur caillebotis intégral, pour une circulation homogène de l’air dans les tas. La ventilation mêle quant à elle automatisation, via un pilotage par sondes de température et ordinateur, et économie d’énergie. En effet, les ventilateurs disposent d’un mode économique leur permettant de tourner à 80 % de leur puissance maximale, du moins en année « normale ».

Très attentif à la qualité de ses pommes de terre, Jean-Pierre prélève des échantillons tout au long de l’arrivée des bennes et ce, à intervalles réguliers. Les analyses réalisées, combinées à ses schémas de stockage, lui permettent d’avoir une vue complète sur l’état des tubercules entreposés, quel que soit leur emplacement dans le hangar.

Le transport des pommes de terre vers l’usine de transformation est quant à lui organisé par la société McCain elle-même. « Les livraisons ont lieu 7j/7 et sont organisées selon les besoins de l’usine mais sans nuire aux voisinages de la ferme », insiste-t-il. C’est pourquoi les chargements n’ont lieu qu’entre 7h et 22h, après un second passage des tubercules au déterreur (le premier ayant lieu lors de l’entreposage).

Pas moins de 70 % des livraisons annuelles sont effectuées durant les mois de mai, juin et juillet.

En toute autonomie

Sur leur ferme, les Van Puymbrouck travaillent en toute autonomie. Ainsi, des travaux de préparation des terres aux récoltes, en passant par les semis, les plantations et les traitements phytosanitaires, l’entièreté des opérations est réalisée par les membres de la famille, ou un de leurs employés. À une exception près : la récolte des chicorées et betteraves est confiée à une entreprise de travaux agricoles. De manière exceptionnelle, généralement en cas de surcharge de travail, l’un ou l’autre indépendant est également appelé en renfort.

« Travailler ainsi nous permet de planifier au mieux les différentes opérations, notamment en fonction des conditions climatiques », poursuit l’agriculteur. Cette autonomie est d’autant plus importante que la famille intègre 480 ha de culture de printemps dans sa rotation. L’organisation est essentielle pour aborder au mieux cette période de travail intense.

De même, l’exploitation héberge son propre atelier où sont menés les entretiens et réparations. Dans les semaines à venir, un nouvel employé devrait d’ailleurs le rejoindre, afin de réaliser ces opérations encore plus rapidement et efficacement. Toujours par souci d’efficacité, Jean-Pierre mise beaucoup sur la formation des chauffeurs qui constituent son équipe, dont certains sont présents depuis 10 ans déjà.

Les efforts payent !

Pour le futur, la famille Van Puymbrouck souhaite stabiliser la surface dédiée aux pommes de terre à son niveau actuel et compte miser davantage encore sur la qualité des récoltes, un domaine dans lequel elle excelle. « Travailler sur la qualité permet d’ajouter de la valeur aux tubercules, jusqu’à 20 €/t de bonification après contrôle à l’usine », détaille Jean-Pierre.

En pratique, McCain analyse la qualité des pommes de terre en prélevant un échantillon dans chaque camion entrant à l’usine. En fin de saison, les résultats des analyses effectuées sont regroupés afin d’évaluer la qualité globale des livraisons. Et le travail mené par la famille d’agriculteurs paye. En effet, ils sont chaque année classés parmi les 20 meilleurs partenaires de McCain, Belgique et France confondues. Ils se sont également vus récompensés du Belgian Potato Quality Award en 2004.

Jean-Pierre poursuit : « Si un jour nous changeons de variété, quelles qu’en soient les raisons, nous poursuivrons nos efforts. Seuls des tubercules de qualité permettent d’accroître la rentabilité de la culture, grâce aux bonus que nous nous efforçons d’obtenir au quotidien. Nous avons d’ailleurs abandonné la Bintje car elle ne correspondait pas aux niveaux de qualité que nous recherchions ».

Quant à l’installation d’un système d’irrigation, ce n’est pas à l’ordre du jour malgré les épisodes de sécheresse répétés que nous connaissons ces dernières années. « À l’heure actuelle, je ne pense pas que ce soit rentable, bien que je n’aie pas de chiffre exact en tête. À mon sens, c’est un investissement qui en vaut la peine pour autant qu’on ait des légumes dans sa rotation, ce qui n’est pas notre cas », termine Jean-Pierre.

J.V.

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