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Quelques innovations prospectives à l’horizon 2038

Dans un rapport paru il y a quelques mois, à la demande de la Commission européenne,

des prospectivistes ont sélectionné et analysé la maturité d’une centaine d’innovations de rupture et leurs perspectives de développement à l’horizon 2038. En voici quelques-unes susceptibles

de concerner l’agriculture.

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Dans ce rapport, les experts ont analysé et noté la maturité de ces innovations au potentiel élevé sur une échelle de 0 à 5, en fonction de trois critères : leur maturité actuelle, leurs perspectives d’ici 20 ans, et le positionnement de l’UE dans le domaine. Parmi celles-ci, quelques-unes concernent assez directement l’activité agricole, soit pour y participer, soit pour la concurrencer.

Verticalité

L’agriculture verticale robotisée sous la forme de hangars étagés, éclairage led, univers contrôlé, récolte robotisée a atteint un stade avancé (3/5), notamment au Japon, remarquent les auteurs. Et le concept s’exporte déjà vers le Moyen-Orient, où il est perçu notamment comme une réponse aux problèmes hydriques. Aux États-Unis, deux start-up exerçant dans ce domaine (hors récolte robotisée), Aerofarms et Plenty, ont atteint chacune la valeur de 500 millions de dollars, selon le Financial Times. L’Union européenne serait en revanche mal positionnée sur cette technologie (2/5).

Feuillage artificiel

Moins mature (2 sur 5 ; 3 à l’horizon 2038) mais bien plus prometteuse, la « photosynthèse artificielle » consiste, comme son nom l’indique, à mimer la photosynthèse (eau + lumière + CO2 = O2 + glucides), grâce à des composants minéraux dérivés de silice, cobalt, potassium… À long terme, les auteurs de l’étude imaginent de « grandes fermes de feuilles artificielles » capables de stopper le réchauffement climatique plus efficacement que les feuilles naturelles, et de produire du carburant. L’Europe serait très bien positionnée sur cette technologie (4/5).

La 3D

L’impression 3D des aliments est une technologie presque mature (note 3 sur 5), selon les auteurs, et sur laquelle l’Europe serait en bonne position (4/5). Ils estiment que « presque l’ensemble des plats peuvent être imaginés dans une version imprimée », et vendus sous la forme de poudre, « imprimable » à domicile ou hors foyer. Le marché se situerait plutôt dans les restaurants gastronomiques, ou en restauration hospitalière, pour pallier les difficultés des patients à mâcher ou avaler.

Capteurs et plastiques biodégradables

L’UE est très bien placée dans la fabrication de bioplastiques, qui existe déjà à l’échelle industrielle (par exemple, les sacs plastiques). Parmi les ressources citées : maïs, riz, pommes de terre, fibre de palme, tapioca, fibres de blé, cellulose de bois et bagasse (sous-produit de la canne à sucre). Le rapport évoque également des recherches finlandaises sur des procédés de production permettant d’obtenir des précurseurs de plastique à partir de méthane et de bactéries méthanogènes.

Les capteurs biodégradables sont des composants électroniques capables de se dégrader à une échéance donnée, par hydrolyse ou autres réactions biochimiques. En alimentation, ils pourraient servir de garantie de traçabilité ou qualité sanitaire, sous la forme de labels millimétriques « quasi invisibles ». La technologie est encore peu mature (2/5), mais dynamique (4/5 en 2038), et l’UE est bien positionnée dans ce domaine (3,5/5).

Luminescence

Les recherches sur la bioluminescence et notamment les « plantes luminescentes » se situent probablement aux marges de l’horticulture ; elles visent à remplacer des éclairages à incandescence ou électroluminescence. Il s’agit de conférer à des plantes une fonction luminescente existante chez certains insectes, en y insérant des nanoparticules. L’UE serait très en retard sur cette technologie (0/5).

Autoguidage

Les technologies de pilotage sans conducteur seraient également bien maîtrisées par les Européens (4/5). Elles seraient moyennement matures à l’heure actuelle (3/5), davantage à l’horizon 2038 (4/5). L’agriculture n’est pas mentionnée par les auteurs du rapport, pourtant de nombreuses expérimentations ont lieu, notamment aux États-Unis, ou en Australie. Le développement dans l’Union européenne, notamment de l’Ouest, paraît lié au devenir des réseaux routiers grand public.

Assistance et robotique

De même, l’agriculture n’est pas citée comme un secteur pouvant être concerné par les technologies d’exosquelettes (vêtements-automates assistant les gestes et déplacements). Pourtant, le Japon, dont la main-d’œuvre agricole est âgée, a développé des applications à l’agriculture (ex : le bras Arm-1 de Kubota). La technologie est peu mature (2/5), mais dynamique (4/5) à horizon 2038. L’UE est relativement bien placée (3,5/5).

Édition de gènes

L’édition de gènes est évidemment vue comme un secteur prometteur pour l’agriculture, même si les auteurs n’oublient pas de mentionner les débats actuels sur l’association ou non à la réglementation sur les OGM. L’UE serait moyennement bien positionnée (3/5), les industriels pourraient toutefois souffrir de l’incertitude réglementaire au sein de l’Union.

L’imagerie hyperspectrale permet d’accroître significativement la quantité et la qualité des informations recueillies par des capteurs optiques. Les auteurs donnent l’exemple d’une récente étude chinoise parue dans Nature. Les chercheurs ont réussi à évaluer la quantité de nutriments présents dans un kiwi à partir d’une simple analyse d’image (hyperspectrale). La technologie est encore peu mature (2/5), mais dynamique (4/5) d’ici 2038 et bien maîtrisée par l’UE (3,5/5).

Piles microbiennes

Les prospectivistes rapportent d’importants travaux de recherche pour remplacer l’usage du platine – extrêmement coûteux – dans les piles à combustible, par des bactéries nourries de substrats organiques (sous-produits agricoles par exemple). Le développement des piles à combustible serait encore freiné par son coût de production. Ces piles « microbiennes » sont encore au stade du développement (2/5), l’UE est moyennement bien positionné dans ce domaine (3/5).

Signal d’alarme

L’étude relève que le département de recherche militaire américain (Darpa) s’intéresse à la « communication des plantes » comme moyen de défense. Un programme actuel porterait sur la façon dont les plantes pourraient servir de détecteur d’attaques biologiques, chimiques, électromagnétiques, par leur simple observation par satellite ou drone. La technologie est encore à l’état de recherche (1/5). En France, la start-up EchoGreen étudie le stress des plantes en captant les ondes électromagnétiques qu’elles émettent.

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