
C’est absolument ahurissant ! Dans les années 1980 et ’90, les délégués de laiterie nous exhortaient à acheter du quota, à augmenter notre cheptel, à investir massivement dans des étables performantes. Aujourd’hui, c’est tout le contraire : ils tirent sur le frein à main ! J’ai eu l’occasion, dernièrement, d’en parler avec un jeune exploitant, 32 ans à peine, et déjà endetté à plus de deux millions d’euros ! « On est foutu, on emprunte trop ! », écrivait la semaine dernière Manou de Warneton dans le Sillon… Trop d’agriculteurs tournent dans leur roue-cage comme des hamsters dopés aux amphétamines : plus vite, encore plus vite, toujours plus vite ! S’ils s’arrêtent de courir, ils trébucheront ; la roue va les emporter et leur briser les reins. Avez-vous déjà observé ces pauvres petites bêtes, prisonnières de leur folle manie ?
En fait, tous les êtres humains agissent un peu comme des souris dans leur roue-cage, toujours à se précipiter vers ce qu’ils appellent le bien-être, le plaisir, le bonheur. Dans leur perpétuelle fuite en avant, ils courent en déséquilibre pour ne pas tomber. Gagner des sous, et vite les dépenser. Voyager, s’amuser, partir en vacances, boire et manger au resto, s’étourdir dans des paradis artificiels, comme si la vie n’était qu’un vaste jeu virtuel… Être riche, de plus en plus riche, écraser tout le monde pour y parvenir. Les animaux sont plus intelligents que nous. C’est nous qui plaçons un hamster ou un écureuil dans cette prison qui les rend fous ; eux n’ont rien demandé. Mais c’est nous-mêmes qui nous construisons notre propre roue-cage, cette sacro-sainte croissance économique qui nous pousse à produire, à consommer toujours davantage, à investir sans limite, à transformer les belles petites fermes léguées par nos parents, en mastodontes industriels qu’aucun de nos enfants ne pourra reprendre sans s’endetter à mort. À mort !
