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Des actinidias à cultiver en Belgique ?

Fruits aux allures exotiques par excellence,

les kiwis et kiwaïs peuvent très bien se cultiver en Belgique, moyennant

une conduite adéquate

et un soin attentif. De quoi apporter un peu d’originalité au jardin !

Temps de lecture : 8 min

L’assortiment des fruits cultivés dans notre pays compte des espèces qui y sont présentes depuis l’Antiquité comme les pommiers, depuis les Croisades comme certains pruniers, ou depuis la Renaissance comme les abricotiers.

Quant aux Actinidias, bien qu’ils soient connus et ont été décrits par les botanistes qui prospectaient en Extrême-Orient depuis le 19è siècle, leur culture pour la production commerciale de fruits ne s’est développée en Europe qu’à partir du milieu du 20è siècle, après que ces plantes aient fait un passage par la Nouvelle-Zélande. Leur culture y occupe plus de 12.000 ha pour une production de 450.000 t. C’est là également que le « Yang-tao » a été dénommé « Kiwi » par analogie avec l’oiseau ratite emblématique du pays.

Comment peut-on réussir la culture des Actinidias en Belgique ? Parmi les conditions à remplir, nous développerons : le choix des espèces et variétés en fonction des conditions climatiques, le choix des emplacements qui satisfont le mieux les exigences, et les techniques culturales qui correspondent le mieux à la physiologie de la plante.

Carte d’identité

Le genre botanique Actinidia compte une quarantaine d’espèces, toutes originaires d’Extrême-Orient, où elles sont présentes sous des conditions climatiques très différentes en fonction de la latitude : depuis l’île de Sakhaline jusqu’à l’île de Java, et en longitude, depuis les contreforts de l’Himalaya jusqu’au Japon.

La dénomination de l’espèce fait allusion à l’image que donne un fruit coupé transversalement, où de nombreux rayons partent du cercle central formé par les graines.

Nous nous limiterons ici à présenter les trois espèces principales présentes en Belgique pour l’ornement et pour la production de fruits comestibles.

Ce sont des plantes sarmenteuses à rameaux volubiles qui portent des feuilles simples, alternes, caduques. La floraison est généralement dioïque : les fleurs unisexuées sont portées par des plantes différentes. Il existe quelques cas où les fleurs sont hermaphrodites. Après fécondation par des insectes butineurs, les fleurs femelles et les fleurs hermaphrodites évoluent en une baie charnue comestible contenant un très grand nombre de graines très petites.

 Actinidia chinensis et Actinidia deliciosa : les kiwis, sont deux espèces très semblables de grande vigueur ; la seconde porte des rameaux velus atteignant 10 m de long, tandis que la première est un peu moins vigoureuse ; les feuilles sont grandes, ovales, plus velues chez A.déliciosa que chez A.chinensis.

Les fleurs sont généralement unisexuées (hermaphrodites chez quelques variétés), grandes, parfumées, de teinte blanc-crème ; elles apparaissent en juin sur des pousses de vigueur modérée se développant sur les rameaux de l’année précédente.

Les fleurs mâles ont de très nombreuses étamines, tandis que l’ovaire des fleurs femelles évolue en une baie sphérique velue (A.chinensis) ou plus grande, oblongue et plus velue (A.deliciosa) à chair verte (il existe quelques variétés à chair jaune). Les fruits mûrissent fin octobre ; ils contiennent 150 à 300 mg de vitamine C pour 100 g.

 Actinidia arguta, le kiwaï ou mini-kiwi est une plante à rameaux de 5 m de long non velus. Les feuilles cordiformes sont dentées, de teinte vert clair. Petites fleurs en grappes denses, blanches, odorantes, généralement unisexuées apparaissant en juin. Fruits ovoïdes, verts ou rouges, de 2 cm, mûrissant en début d’automne, contenant 50 à 200 mg de vitamine C pour 100 g.

 Actinidia kolomikta est le kiwi de Sibérie. La plante porte des rameaux peu volubiles, de 2 à 3 m de long, non velus. Les feuilles sont glabres, ovale-allongé, finement dentées, dont une partie se colore au printemps de blanc ou de rose. Petites fleurs blanches odorantes en grappes, unisexuées ou hermaphrodites. Fruits globuleux de 2 cm en fin d’été, jaune-verts, très riches en vitamine C (de 675 à 1.200 mg/100 g !).

Des plantes frileuses

Les Actinidias demandent un sol de bonne qualité : profond, à texture limoneuse ou argilo-sableuse, avec une structure grumeleuse, et surtout un bon drainage naturel de l’eau en excès. Une teneur moyenne en matière organique et une richesse minérale modérée sont souhaitables afin de freiner la vigueur et d’améliorer la résistance des plantes au froid hivernal.

En Belgique, le climat est le principal facteur déterminant pour la réussite de la culture des Actinidias. Les trois espèces proviennent d’Extrême-Orient mais de latitudes différentes ; leur résistance au froid hivernal dépend de leur origine. A.deliciosa et A.chinensis, les kiwis, sont les plus sensibles ; si le bois bien aoûté de plantes adultes peut résister à -15ºC pendant le repos hivernal, nous avons observé à Wépion en février 2012 avec un minimum de -17ºC la mort de tous les kiwis qui avaient été plantés un an plus tôt.

Comme mesures préventives, on protégera les racines en plaçant une couche de paille ou de compost brut sur 1 à 2 m², et on emballera le tronc par une gaine de calorifugeage ou un voile de protection.

Les deux autres espèces ne demandent pas de protection particulière : elles résisteraient à des températures hivernales inférieures à -25ºC ! À Wépion, les plantes ont bien résisté au gel qui avait détruit les kiwis.

Par contre, comme tous les Actinidias débourrent très tôt au printemps, le gel tardif peut endommager très sérieusement les jeunes pousses tendres. Ce fut le cas à Wépion avec la gelée à -7ºC du 21 avril 2017 : tous les kiwaïs ont été touchés, puis les plantes ont repercé mais la floraison fut pauvre.

Pendant la belle saison, une atmosphère très chaude et sèche peut provoquer des brûlures marginales du feuillage.

Plantation et conduite

Dans un jardin, l’emplacement le plus favorable aux Actinidias sera de les adosser à un mur bien exposé : sud-est, plein sud ou sud-ouest. Ils seront ainsi protégés des vents du nord et de l’est, et le mur leur apportera un peu plus de chaleur la nuit.

Les plants fructifères (femelles ou hermaphrodites) seront conduits en palmette horizontale à deux étages palissés à des fils horizontaux : le premier à 1 m du sol, et le second 1 m plus haut. Les plants mâles seront conduits en T jusqu’au second fil.

Pour les kiwis, il faut disposer d’un espace d’au moins 6 à 8 m en largeur pour un seul plant femelle ou hermaphrodite ; pour les kiwaïs, 3 m suffisent. Les kiwaïs hermaphrodites peuvent aussi être conduits en palmettes obliques.

Pendant la formation du tronc et des charpentières, il est impératif d’attacher et de dérouler les pousses lorsqu’elles partent en spirale : lorsqu’elles s’épaissiront, il sera trop tard et elles risquent de se briser.

Les plants d’Actinidias sont commercialisés en pots de 2 l ; ils ont été multipliés par bouturage semi-ligneux. Il est conseillé de planter au printemps, lorsque la végétation démarre, d’arroser et d’épandre un paillis au pied afin de maintenir le sol frais. Les troncs doivent être protégés contre les griffures des chats.

Veiller aux soins d’entretien

Tout au long de l’année, les kiwis et kiwaïs demandent une certaine attention.

 Fumure :

Fin mars, épandage d’un engrais composé pour jardins N + P + K pauvre en chlore sur 1 à 2 m² ; éviter les apports d’azote en été pour éviter une mauvaise lignification, une croissance tardive et des dégâts de gel hivernal.

 Taille d’hiver des plants

fructifères :

– supprimer les pousses qui ont produit et qui ne portent pas de nouveau(x) rameau(x) ;

– conserver intacts les nouveaux rameaux de vigueur moyenne sur les charpentières ou sur les pousses ayant produit ;

– supprimer les pousses très faibles ;

– supprimer totalement les gourmands ou les rabattre à 2 yeux.

 Taille d’été des plants fructifères :

– pincer les pousses fructifères à quelques yeux au-dessus des fruits ;

– enlever les gourmands, et les pousses superflues et mal placées.

 Taille des plants mâles :

– en hiver : laisser un maximum de rameaux de l’année précédente ;

– après la floraison, éliminer les rameaux qui ont fleuri et conserver quelques rameaux nouveaux.

 Entretien du sol :

Désherbage manuel et épandage d’un mulch.

 Pollinisation :

La qualité des fruits et leur calibre dépendent d’une bonne pollinisation des fleurs ; celles-ci sont dépourvues de nectar, et donc peu attirantes pour les abeilles domestiques. Les abeilles sauvages ont une plus grande efficacité ; on les favorisera en plaçant des nichoirs et « hôtels à insectes ».

 Récolte et conservation

des fruits :

La maturité est difficile à estimer visuellement, faute d’une modification de couleur ; on récoltera les fruits avant ramollissement. Manipuler les fruits avec douceur.

Conservation des kiwis : plusieurs mois en frigo à 0ºC ; en cave, éviter la proximité de fruits qui dégagent de l’éthylène (les pommes, par exemple).

Conservation des kiwaïs : courte durée.

 En cas de culture sous abri :

Opter pour une serre-verre, une véranda ou un tunnel plastique suffisamment spacieux en fonction de la vigueur des plants. Prévoir une période de froid afin de lever la dormance hivernale.

Quelles utilisations ?

Kiwis et kiwaïs sont consommés principalement comme fruits frais, les kiwis après épluchage, et les kiwaïs entiers. Les kiwis entrent dans la composition de salades de fruits et de sorbets ; coupés en tranches, ils décorent des pâtisseries. Non encore mûrs, ils contiennent de la pectine et peuvent être transformés en gelées et marmelades. Par pressage, on extrait un jus qui peut être consommé tel quel, ou transformé en un vin très apprécié au Japon, aux États-Unis et en Nouvelle-Zélande.

Les enzymes qu’ils contiennent permettent d’attendrir de la viande ; on place des tranches de kiwi pendant 10 minutes sur la pièce de viande.

Ir. André Sansdrap

Wépion

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