À propos de l’accompagnement des producteurs, ensemble contre la listeria

Les bactéries sont de minuscules êtres vivants faits d’une seule cellule, présents un peu partout dans l’environnement : l’air, les sols, l’eau, la peau. Certaines sont utiles à l’homme. Présentes dans l’intestin, elles aident à digérer. Dans la production de denrées, elles sont utilisées pour fabriquer des yaourts, de la choucroute ou de la bière… Mais d’autres bactéries provoquent des maladies : elles sont pathogènes. C’est le cas de la Listéria, cette bactérie qui est l’ennemi des producteurs, des distributeurs mais aussi – et surtout – des consommateurs les plus fragiles. Listéria n’est donc pas un ingrédient : c’est un agent pathogène.

Les YOPI, un groupe de personnes à risque

Si la consommation d’un aliment contaminé par la Listéria provoquera généralement une gastro-entérique chez une personne en bonne santé, elle peut avoir des conséquences bien plus graves chez les personnes à la santé fragile. Ce sont les YOPI, les jeunes enfants (Young), les personnes âgées (Old), les femmes enceintes (Pregnant) et les personnes dont l’immunité est affaiblie (Immunocompromised – p. ex. les patients qui suivent un traitement de chimiothérapie). Ces personnes font partie d’un groupe à risque auxquelles les médecins préconisent d’éviter certains aliments plutôt sensibles à la Listéria : produits au lait cru, légumes crus, certaines charcuteries et produits de la mer…

Une maladie sous-estimée

En octobre, un foyer de listériose est détecté aux Pays-Bas. Trois personnes décèdent après avoir consommé de la charcuterie contaminée. Une femme a, quant à elle, subi une fausse couche. Chez nous, la presse avait d’ailleurs relayé l’événement car des produits potentiellement contaminés avaient été vendus en Belgique.

Une contamination isolée ? Les chiffres issus du dernier rapport de l’EFSA et de l’ECDC sur les zoonoses [1], publié le 12 décembre 2019, parlent d’eux-mêmes. Au cours de la période 2009-2018, on a constaté une tendance à la hausse statistiquement significative du nombre de cas confirmés de listériose au sein de l’Union européenne. En 2018, 2.549 cas de listériose ont été notifiés dans l’UE, dont 229 décès.

Malheureusement, il n’est pas toujours évident de faire le lien entre la maladie et le produit incriminé. La raison principale en est la longue période d’incubation de la bactérie : les premiers symptômes de la maladie peuvent apparaître jusqu’à 90 jours après la consommation des aliments contaminés. Difficile de se souvenir précisément de ce qu’on a mangé il y a 3 mois…

Qui dit bactérie imprévisible dit contaminations accidentelles

La grande majorité des producteurs belges ne connaît pas de soucis, mais personne n’est à l’abri d’une contamination ponctuelle.

Listeria peut se développer à basse température, dans l’entrepôt frigorifique chez le producteur, dans le secteur de la distribution et même dans le réfrigérateur du consommateur. La croissance de la bactérie dépend en outre des caractéristiques de la denrée alimentaire dans laquelle elle se trouve, comme le degré d’acidité ou d’activité de l’eau.

Certaines denrées, comme le lait cru, les fromages au lait cru, les légumes crus et le poisson fumé peuvent présenter un risque plus élevé de présence des bactéries pathogènes, car ils ne sont pas ou pas suffisamment chauffés pendant la production. En chauffant (au moins en pasteurisant) pendant la production ou avant la consommation de l’aliment, la bactérie est éliminée. Cependant, Listeria monocytogenes est une bactérie qui peut bien survivre dans l’environnement de production alimentaire. C’est pourquoi la bactérie peut également se trouver sur des produits chauffés en raison de la contamination de l’environnement (par ex. la bactérie peut être présente sur les machines de découpe). Ici, l’application de bonnes pratiques d’hygiène est le seul moyen d’éviter une infection à la listériose.

Si la présence de Listéria peut résulter d’accident de production, elle n’a pas, vu les risques qu’elle représente, sa place chez le consommateur.

Des normes pour protéger les consommateurs

C’est pour protéger le consommateur que l’Europe a fixé des normes, notamment pour les aliments prêts à être consommés. Lorsqu’un producteur peut démontrer – par exemple via un test de vieillissement sur le produit – que la Listeria ne dépassera pas la limite de 100 unités formant des colonies (ufc) par gramme d’aliment pendant la durée de conservation de l’aliment, la limite de 100 ufc peut être utilisée en production. Si cette garantie n’est pas présente, l’entreprise doit alors s’assurer de l’absence de la bactérie dans 25 g du produit prêt à consommer.

Cette législation européenne ne cible ni production ni produit spécifique : elle couvre tous les produits prêts à être consommés, qu’ils soient issus de la production artisanale ou industrielle, qu’ils soient bio ou traditionnels, que l’on parle de fromages au lait cru ou lait pasteurisé.

Et l’Afsca dans tout ça ?

L’Afsca est un organisme de contrôle. L’Agence alimentaire est chargée de veiller à ce que les exploitants de la chaîne alimentaire respectent les prescriptions légales. Mais au-delà du contrôle, l’information, la prévention, et la sensibilisation font également partie de nos objectifs. C’est en ce sens que, depuis plusieurs années, nous avons mis en place une cellule de formation et d’accompagnement qui aide les établissements à comprendre la législation et à s’y conformer en vue d’allier production artisanale et protection du consommateur. En 10 ans, nos formateurs ont formé gratuitement 75.000 professionnels en contact direct avec le consommateur.

Cette équipe est également chargée d’accompagner les petites entreprises telles que des agriculteurs qui souhaitent transformer et commercialiser leurs productions, des établissements de petite taille qui fabriquent du chocolat, de la bière artisanale, des biscuits, du miel… En 2018, 200 exploitations agricoles en phase de diversification ont ainsi été accompagnées. Nos formateurs travaillent également en étroite collaboration avec des associations du terrain, comme DiversiFerm en Wallonie.

Nous avons toujours été sensibles aux difficultés rencontrées par certains pour satisfaire à la législation relative à l’hygiène. L’incident survenu dans une bergerie à Cognelée révèle ces difficultés. Nous sommes bien conscients qu’il n’est pas toujours possible pour un producteur de produits fermiers de financer lui-même une étude sur le potentiel de croissance de Listeria monocytogènes dans les fromages fabriqués à la ferme. C’est dans cet esprit que nous avons financé une étude en 2017 de 270.000 euros qui porte sur une large gamme de fromages fabriqués en Belgique par des petits producteurs (agriculteurs et petits fromagers). Son objectif est de pouvoir déterminer si oui ou non – ou dans quelle mesure –, la Listéria peut se développer dans les différentes catégories de fromages. À ce stade, l’étude est terminée et est soumise au Comité Scientifique indépendant, institué auprès de l’Afsca, pour évaluation et avis.

Les conclusions du Comité Scientifique sont attendues pour la fin du premier trimestre 2020. En fonction de ces conclusions, nous soutiendrons la limite de 100 ufc/g sur la durée de conservation du produit au stade de la production, si les garanties scientifiques permettent de conclure à l’absence de risque pour le consommateur. L’Afsca contrôle, forme et informe. Les producteurs de fromages seront invités à des séances de formation et d’information et la cellule d’accompagnement de l’Afsca sera à leurs côtés pour les aider à comprendre et à appliquer cette législation, dans une volonté commune : un consommateur en bonne santé.

Pour plus d’informations, contactez la cellule d’accompagnement via accomp@afsca.be

Afsca

, Service communication

[1] The European Union One Health 2018 Zoonoses Report, Scientific Report of EFSA, European Food Safety Authority and European Centre for Disease Prevention and Control (EFSA and ECDC) in EFSA Journal 2019 ; 17(12) : 5926.

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