Mon ex-mari peut-il m’obliger à lui laisser notre ferme ?

Votre question relève du cadre de la liquidation-partage d’un régime de communauté. Lorsqu’un couple divorce, l’étape de liquidation-partage est un passage obligé. La liquidation consiste en un acte établissant les comptes entre les parties (les ex-époux) et tranchant les litiges. Le partage, quant à lui, constitue la fin d’une indivision entre deux ou plusieurs personnes (in casu, les ex-époux) par la création de lots et l’attribution de ceux-ci à chacun des co-indivisaires.

Partage de la communauté

Dans le cadre d’un régime de communauté, chaque époux reste propriétaire de ses biens personnels et les biens communs appartiennent aux deux époux. Si le mariage se dissout par divorce, chaque époux pourra reprendre ses biens personnels, et la communauté sera partagée en deux, chacun pouvant reprendre (sous certaines conditions) la moitié de cette communauté. Toutefois, dans le cadre d’un calcul de récompenses, il faudra tenir compte de ce que chacun a fait rentrer dans la communauté à partir de son patrimoine personnel, ou de ce que chacun a prélevé du patrimoine commun au profit de son patrimoine propre. Le partage s’effectuera dans le cadre de la convention préalable (s’il s’agit d’une procédure de divorce par consentement mutuel) ou dans le cadre des opérations de liquidation de la communauté (dans le cadre des autres procédures).

Le droit de reprise

L’époux qui a apporté un bien propre au patrimoine commun (art. 1452 du Code civil) a la faculté de le reprendre en nature lors du partage, en l’imputant sur sa part à la valeur au moment du partage (art. 1455). C’est l’exercice du droit de reprise au moment de la liquidation de l’indivision consécutive à la dissolution de la communauté.

L’attribution préférentielle

L’attribution préférentielle est « un droit de préférence demandé ou accordé par jugement à l’un des copropriétaires, qui aura donc une priorité pour racheter la part de l’autre ou des autres ». Ce droit est fondé sur les articles 1446 et 1447 du Code Civil.

L’article 1446 du Code civil vise le cas où le régime légal prend fin par le décès d’un des époux. En ce cas, le conjoint survivant peut se faire attribuer par préférence, moyennant soulte s’il y a lieu, un des immeubles servant au logement de la famille et l’immeuble servant à l’exercice de sa profession.

L’article 1447 du Code civil vise la situation où le régime légal prend fin par le divorce, la séparation de corps ou la séparation de biens. En ce cas, chacun des époux peut exercer le même droit d’attribution préférentielle au cours des opérations de liquidation.

Intéressons-nous plus en détail à ces articles. L’article 1447 du Code civil prévoit que lorsque le régime légal prend fin par le divorce, la séparation de corps ou la séparation de biens, chacun des époux peut, au cours des opérations de liquidation, demander au tribunal de faire application à son profit des dispositions visées à l’article 1446. Cet article 1446 du Code civil dispose que lorsque le régime légal prend fin par le décès d’un des époux, le conjoint survivant peut se faire attribuer par préférence, moyennant soulte s’il y a lieu, un des immeubles servant au logement de la famille avec les meubles meublants qui le garnissent et l’immeuble servant à l’exercice de sa profession avec les meubles à usage professionnel qui le garnissent.

Ces articles permettent donc à l’un des époux de faire mettre dans son lot, au moment du partage, tout ou partie des biens meubles et immeubles qu’ils décrivent. Le droit d’attribution préférentielle porte aussi sur les meubles meublants qui garnissent cet immeuble.

Le tribunal statue en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause et des droits de récompense ou de créance au profit de l’autre époux.

L’époux qui peut faire valoir ces intérêts peut se faire attribuer, dans sa part, le logement familial ou professionnel. Il nous semble que votre ex-mari peut effectivement profiter de cette possibilité vu le fait qu’il a à titre professionnel besoin de l’immeuble commun.

Pas gratuit !

L’attribution préférentielle ne méconnaît pas l’équilibre économique du partage car il y aura lieu au paiement d’une soulte si la valeur des biens attribués par préférence excède la valeur des droits de l’attributaire dans la masse. Le tribunal fixe la date de l’exigibilité de la soulte éventuelle.

Le droit de reprise l’emporte

Si le droit de reprise vient en conflit avec l’attribution préférentielle sur le logement familial, ce sera le droit de reprise qui l’emporte. Si l’épouse veut se faire attribuer l’immeuble familial par préférence selon l’article 1447, son droit sera neutralisé par le droit de reprise dans la part de l’époux.

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