Passer à côté d’une opportunité

par frilosité, dommage !

Il y a quelques semaines, dans la rubrique « voix de la terre », un agriculteur s’inquiétait des risques liés à la nouvelle sucrerie de Seneffe. Certes, il s’agit d’un pari sur l’avenir (normalement la consommation mondiale de sucre devrait augmenter !) et ça pourrait ne pas aller aussi bien que prévu. Mais si du côté de Seneffe, il y a une incertitude, de l’autre (Südzucker), il n’y en a pas. On est de toute façon tondu ! Il s’agit d’une multinationale allemande. Elle a pour objectif de maximiser les bénéfices à verser aux actionnaires (elles fonctionnent toutes comme ça !) et de favoriser les betteraviers allemands (s’ils signaient leur contrat 2019, ils recevaient 4 euros/t de plus pour 2017 !). Et nous ? Il nous laisse à peine de quoi vivre! Malgré de bons rendements, mes revenus bruts pour 2015, 2016 et 2017 (!) sont respectivement de 2.282 euros/ha, 2.553 euros/ha et 2.580 euros/ha, faites le prix de revient vous-même ! Je n’ose imaginer celui de 2018. Faut-il encore cultiver la betterave ou des céréales à 1,40 euro ?

Il faut revoir notre modèle agricole et la Sucrerie coopérative de Seneffe est peut-être une opportunité. Oui, il faut construire une nouvelle usine. Iscal l’a fait il y a peu et ne s’en porte pas plus mal ! N’oublions pas que Südzucker paye des impôts (en Allemagne !) sur bénéfices, plus le précompte sur les dividendes des actions (environ 50 % en tout). Seneffe n’en payera pas. Le groupe Südzucker a annoncé des économies d’environ 100 millions d’euros… Cela ne nous concerne pas, paraît-il. Mais, des travaux ne semblent pas non plus prévus à Leuze Longchamp… Et donc ? Si le groupe construit une nouvelle sucrerie se sera très probablement en Allemagne !

J’entends à gauche et à droite : « oui, mais il faut payer pour Seneffe et la trésorerie est basse ». On parle de 30.000 pour 1 million de kg. Une nouvelle batteuse qui travaille 3 à 4 jours par an, c’est 150 000 euros ; un tracteur, 100 à 150 000 euros ; une benne, 30 à 40 000 euros ; un robot de traite, 150 000 euros. La majorité de ces engins finiront à mitrailles. Ils n’améliorent pas forcément les rendements mais, ils nous facilitent le travail et nous font gagner du temps. Ma vieille 80/60 ne laissait pas un grain par terre et avait un prix de revient imbattable. Elle faisait un ha/heure et il me fallait un jour de plus.

30. 000 euros ? un peu plus d’un demi hectare en région de culture et ce quota garde sa valeur. Je crains que par frilosité nous ne passions à côté d’une opportunité, mais il est vrai que le fermier wallon n’est pas très coopérateur !

Alain Prévost

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