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Aucune prescription sur le droit de les couper

L’article 37, alinéa 4, du Code rural dit « le droit de couper les racines ou de faire couper les branches est imprescriptible ». Celui-ci a fait l’objet d’une question préjudicielle sur laquelle la Cour Constitutionnelle a dû trancher. Selon elle, dans un arrêté du 5 juillet 2018, cet article ne viole en aucun cas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Temps de lecture : 4 min

La Cour Constitutionnelle dispose du monopole pour le contrôle des normes ayant force de loi au regard des dispositions constitutionnelles et des dispositions législatives pour lesquelles elle est compétente. Si, pour un litige qui lui est soumis, une juridiction est confrontée à une question de conformité de lois, de décrets et d’ordonnances au sujet de certains articles de la Constitution, elle doit en principe poser une question préjudicielle à la Cours constitutionnelle. Lorsqu’une juridiction pose une question, la procédure devant cette juridiction est suspendue dans l’attente de la réponse de la Cour.

Le Juge de paix du canton d’Ath-Lessines a récemment interrogé la Cour sur la possibilité que l’article 37, alinéa 4, du Code rural ne viole les articles 10 et/ou 11 de la Constitution. Plus précisément, il souhaitait savoir si la règle de l’article 37, alinéa 4 du Code rural, prévoyant le droit de couper les racines ou de faire couper les branches n’est pas discriminatoire par rapport aux règles fixées dans l’article 35 du Code rural et dans les articles 675 à 680 du Code civil. Le droit garanti par l’article 37 du Code rural est imprescriptible (c’est-à-dire qu’il ne peut pas être supprimé par un délai, une prescription) contrairement aux droits garantis par l’article 35 du Code rural et les articles 675 à 680 du Code civil.

Les règles en bref

Dans son arrêt la Cour Constitutionnelle considère que l’article 37 fait partie des dispositions qui règlent la distance prévue pour les plantations. Elle commence donc par un récapitulatif des règles les plus importantes.

L’article 35, alinéa 1er, du Code rural consacre l’obligation légale de planter les arbres de haute tige à une distance de deux mètres de la ligne séparative de deux héritages (Cass., 16 octobre 2014, Pas., 2014, nº 613).

En vertu de l’article 36 du même Code, le titulaire d’un droit réel portant sur le terrain voisin peut exiger que les arbres plantés à une distance moindre qu’à la distance légale soient arrachés.

En vertu de l’article 37 du même Code, celui-ci a le droit de couper lui-même les racines des arbres du voisin qui avancent sur son héritage (alinéa 3) et le droit d’exiger du voisin qu’il coupe les branches qui empiètent sur son héritage (alinéa 1er). Les fruits tombés naturellement sur son terrain lui appartiennent (alinéa 2). Le droit de couper les racines ou de faire couper les branches est imprescriptible (alinéa 4).

Les articles 675 à 680 du Code civil règlent la distance à respecter par le propriétaire qui ouvre des jours et des vues sur la propriété du voisin.

Prescription acquisitive selon le cas

En vertu de l’article 690 du Code civil, les servitudes continues et apparentes s’acquièrent par la possession de trente ans.

Le propriétaire d’un arbre planté depuis plus de trente ans à une distance non conforme et le propriétaire d’un ouvrage muni depuis plus de trente ans d’une vue non conforme avec surplomb, par un balcon, une saillie ou autres, sur le fonds contigu, peuvent acquérir l’un et l’autre, par prescription trentenaire, le droit de maintenir, selon le cas, l’arbre ou la construction concernée.

La servitude acquise par prescription par le propriétaire de l’arbre est toutefois restreinte, en ce sens qu’en consacrant le caractère imprescriptible du droit du voisin de couper les racines ou de faire couper les branches, la disposition en cause exclut que la servitude acquise par le propriétaire de l’arbre s’étende aux branches et aux racines qui avancent sur le fonds voisin.

Décision de la Cour

Finalement la Cour décide qu’il n’y a pas une infraction aux articles 10 et 11 de la Constitution lesquels garantissent l’égalité et la non-discrimination.

Selon la Cour « Eu égard aux caractéristiques différentes, d’une part, d’un ouvrage muni d’une vue non conforme qui empiète matériellement sur le fonds voisin et, d’autre part, d’un arbre doté de branches ou de racines qui avancent sur le fonds voisin, la différence de traitement entre les propriétaires respectifs repose sur un critère de distinction objectif et pertinent en ce qui concerne la restriction apportée, par la disposition en cause, à l’étendue de la servitude acquise par prescription ».

Le droit de couper les racines ou de faire couper les branches reste donc imprescriptible.

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