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Chez Gérald et Béatrice Martin, à Erpion en Hainaut: le bois plutôt que le mazout pour chauffer les poulaillers

L’élevage de poulets de chair est thermiquement très énergivore : le bien-être des poussins exige une température ambiantede 35ºC. Aujourd’hui, c’est au bois et plus au mazout que le couple réchauffe ses protégés. Bilan : une facture énergétique et des émissions de CO2 en nette baisse !

Temps de lecture : 6 min

Le couple Martin élève des poulets de chair standard depuis 22 ans à Erpion, village de Froichapelle, dans la botte du Hainaut. Cette activité se déploie dans deux bâtiments de 1.200 m2 chacun, ce qui représente 25.000 individus par poulailler. « C’était les dimensions standards de l’époque », précise Gérald.

Concrètement, Gérald et Béatrice achètent des poussins d’un jour à des couvoirs professionnels et les élèvent pendant quelque 40 à 42 jours, le temps nécessaire à l’obtention de poulets d’un poids moyen de 2,6 à 2,7 kg. Ils partent alors à l’abattoir. Suit un vide sanitaire d’une semaine, et un nouveau cycle de 6 semaines peut recommencer. Il faut donc compter 7 semaines pour l’accomplissement d’un lot complet. Au total, sur une année, cela représente 7,5 cycles par poulailler.

La responsabilité de la vente de la volaille produite est du ressort du fabricant de l’aliment. En la matière, la distribution automatisée d’aliments pour les poulets peut monter à 4.000 kg par jour et par poulailler, en pointe dans le cycle de production.

À noter qu’une deuxième activité d’élevage est opérée dans l’exploitation sous la forme d’une soixantaine de bovins de race BBB mixte. La surface agricole utile est consacrée entièrement à l’affouragement des bovins : prairies et production de céréales immatures.

La chaleur, le point sensible de l’activité !

Les deux poulaillers représentent ensemble un volume d’environ 7.200 m3 à chauffer, entre 35ºC, durant les premiers jours de l’élevage des poussins, et 18ºC, en fin du cycle.

Avant l’installation d’une chaudière au bois, la consommation de pétrole, d’abord, puis de mazout, pour le chauffage intérieur des deux bâtiments pouvait grimper jusqu’à près de 30.000 litres par an, lors d’hivers très rudes. Un volume considérable et un coût exorbitant !

Le choix en faveur du bois de chauffage

Il y a une dizaine d’années, la recherche d’une alternative moins coûteuse et plus écologique à cette consommation énergétique s’est imposée au couple Martin, avec une réflexion sur l’énergie renouvelable. « Notre choix s’est porté sur le bois, car le bois de déchet convient parfaitement. En outre, qu’il s’agisse de bois vert – à laisser sécher quelques années avant utilisation – ou de bois sec, l’alimentation d’une chaudière au bois ne souffre d’aucun problème de disponibilité de matières premières, car les sources sont multiples. »

Avant de se décider, Gérald n’a pas hésité à se rendre en France pour visiter quelques installations. La chaudière à plaquettes de bois Heizomat 500 kW actuellement en activité pour le chauffage est deux poulaillers a été installée en 2013. Elle fournit annuellement quelque 230.000 kWh d’énergie thermique, et pour ce faire, elle ingère environ 400 m3 apparents de plaquettes par an, soit 80 tonnes de bois sec.

Pour son financement, notre hôte a bénéficié de la prime régionale « utilisation durable de l’énergie », représentant 40 % de l’investissement total. Le temps de retour simple sur investissement est évalué à 6,5 ans.

Sources multiples et variées

Quelles sont les matières combustibles utilisées ? « J’ai commencé avec des plaquettes de bois issues de troncs broyés, etc. achetées au Luxembourg. Ensuite, avec le bouche-à-oreille, je suis passé à des briquettes réalisées à partir de copeaux et de déchets de sciage d’une menuiserie sise à Chimay. Pour combler les besoins, je me suis aussi fourni en déchets de sciage de planches d’aubier de chêne (en ballots de 2 m3). Je réceptionne beaucoup de matières premières « en vert » dans des semi-remorques. S’ajoutent à cela, de temps en temps, des grumes entières de résineux impropres à la commercialisation ou issus de tempêtes, du bois de casse, des déchets d’élagage, etc. », explique Gérald.

« Je laisse sécher toutes ces sources de bois vert, sur place, pendant quelques années ; cela ne coûte rien. Et lorsque le bois est bien sec, je le fais broyer et il pourra alors alimenter la chaudière. »

Le combustible est essentiellement du résineux, mais comme la température dans le foyer de la chaudière monte facilement à 900-1.000ºC, cela ne pose pas de problème.

« Le meilleur combustible, qualitativement, c’est le bois sec, le plus sec possible. C’est le plus efficace en termes de rendement, et de toute manière, l’humidité est nocive pour les briques réfractaires. Le rendement de la chaudière avec du bois suffisamment sec atteint 96 % »!

Grands gagnants en termes économiques

L’économie réalisée par rapport à une chaudière au mazout est évidemment fonction du prix du combustible ligneux utilisé. Au prix actuel du mazout, la solution est largement gagnante. Toute provenance confondue, le bois énergie utilisé fournit l’équivalence de 1.000 l de mazout, à un coût de quelque 250 euros seulement.

« Historiquement, c’est lorsque le prix du mazout a grimpé jusqu’à 1 euro/litre, que nous avons réalisé la plus grande économie depuis l’adoption du chauffage au bois. Mais même à un prix du mazout de 0,5 euro/l, nous sommes largement gagnants. »

Du silo aux aérothermes…

Les plaquettes de bois et autres ressources ligneuses destinées à alimenter la chaudière sont stockées dans un silo sous toiture, mais ouvert sur l’extérieur, « ce qui est bien pratique pour estimer les réserves disponibles », assure Gérald.

Aisé à surveiller, le silo est aussi facilement accessible pour le chargement et l’alimentation de la chaudière située dans un local tout proche érigé entre les deux poulaillers. Au niveau de la chaudière, les plaquettes, briquettes et autres pellets de copeaux et sciure compressés sont pris en charge par un désileur (diamètre fermé : 1,5 m), muni d’un bras extensible jusqu’à 5 m. La matière combustible est ensuite reprise par une vis sans fin qui la conduit jusqu’à une écluse rotative – dotée de 4 pales munies de couteaux (permettant de couper les broyats de bois trop longs ou trop épais). Ladite écluse est une pièce qui régule le débit d’amenée du combustible et constitue en même temps un obstacle au retour de feu vers le silo.

Après le passage par l’écluse, la matière ligneuse aboutit dans la dernière vis qui la pousse à l’intérieur du foyer de la chaudière, par un système de « taupinière ». À l’issue de la combustion, les cendres sont évacuées sur un tapis dans un processus continu jusqu’à finir leur course dans un cendrier disposé à l’extérieur.

La chaleur produite passe dans tous les échangeurs de la chaudière de 500 kW pour élever la température de ses 3.600 litres d’eau. Et lorsqu’une demande de chaleur est faite dans les poulaillers, cette eau circule dans les deux circuits secondaires (environ 300 m au total pour les deux poulaillers) jusqu’aux 6 aérothermes qui équipent les deux bâtiments. Il y a 3 aérothermes de 60 kW dans chaque poulailler et un circulateur par poulailler.

La conduite de la chaudière est gérée par un ordinateur disposé dans chaque poulailler. L’ordinateur commande la vitesse des circuits d’eau, l’ouverture des vannes d’envoi, de même que la mise en route des aérothermes disposés dans le bâtiment. Cela en fonction des températures de consignes recommandées tout au long du cycle d’élevage des poulets.

Outre l’automatisation de la température, l’ordinateur gère l’alimentation des poulets, l’éclairage du poulailler, etc. et génère de multiples informations : consommation en aliments, en eau, nombre d’heures de chauffage… Depuis 5 ans, Gérald Martin dispose de la possibilité d’agir sur certaines commandes de l’ordinateur à distance via son smartphone. « C’est un grand confort. Les alarmes arrivent sur mon GSM et à distance, je peux rectifier le tir, dans certaines situations. »

M. de N.

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