Epiées au plus près… 35 variétés

de blé disponibles sur le marché belge

Le réseau du Groupe des expérimentateurs céréales (GEC) compte en effet pour sa première année d’existence concrète pas moins de 18 sites expérimentaux portant sur les variétés commercialisées en froment, orge, épeautre, répartis géographiquement en fonction des conditions pédoclimatiques et de la charge en céréales.

Chacun des essais consacrés au froment dans ce réseau comprend 35 variétés communes aux 4 partenaires (reprises également dans Le Livre Blanc des céréales) provenant de 7 semenciers actifs sur notre territoire. Ce panel commun est souvent accompagné de variétés récentes ou présentant un intérêt plus localisé. L’objectif : cerner au mieux les atouts et faiblesses des variétés commercialisées en Belgique afin de dresser la description complète de celles-ci et présenter tout cela sur un site internet ouvert à tous l’hiver prochain : fiche technique, résultats d’essais et autres conseils pour choisir et cultiver idéalement les variétés retenues dans chaque terroir en particulier.

Parmi les nombreuses visites organisées par les quatre partenaires, le site de Gembloux avait fixé rendez-vous aux agricultrices et agriculteurs le jeudi 17 juin. L’occasion pour la rédaction du Sillon Belge de parcourir les parcelles d’essais. Au commentaire, le régional de l’étape, Guillaume Jacquemin, du Centre wallon de recherches agronomiques.

Une météo peu propice aux maladies…

Les données météo recueillies à la station de Ernage (Gembloux) confirment que de septembre à novembre 2014, la température fut bien supérieure à la normale et que le mois de novembre fut très sec. Ces conditions apparemment largement favorables aux semis des céréales ont cependant été précédées de mois de juillet et août extrêmement arrosés localement : 350 l d’eau /m2. L’hiver a connu des températures normales et des précipitations supérieures aux normes saisonnières. Au final, dans ce contexte, les escourgeons ont eu les pieds dans l’eau durant tout l’hiver et ont abordé la reprise printanière avec un développement racinaire superficiel. Or, avril et mai ont été plus secs, avec des températures inférieures aux normales : les plantes ont eu faim et soif. Cette météo printanière n’a pas eu que des désavantages puisque d’une manière générale, la pression parasitaire fut souvent bien plus faible qu’en 2014. Sur le site expérimental visité à Gembloux, par exemple, les maladies se sont manifestées dans la discrétion. À noter que la fraîcheur anormale du mois de mai explique en partie le manque d’étages (remplissage des grains défaillant) que l’on peut observer régulièrement au niveau inférieur des épis, sur tous les sites à travers le pays, dans de nombreuses variétés tant en escourgeon qu’en froment.

… sur le site de Gembloux

Le champ d’essai variétal visité à Gembloux a été semé dans le domaine du Cra-w, le 23 octobre, à une densité de 250 grains/m2, après des betteraves. Côté fumure azotée, 185 unités ont été apportées dans les parcelles « traitées », contre 160 unités dans les parcelles « non traitées » (absence de protection fongicide…). Deux traitements fongicides ont été appliqués dans les parcelles traitées : le T1 au stade 32 et le T2 au stade épiaison. Il n’en fallait pas davantage vu la pression parasitaire globalement (rouille jaune comprise) modérée sur ce site. À noter qu’au sein du réseau GEC, les sites de Roux-Miroir et Mettet ont requis un traitement supplémentaire contre la rouille jaune.

L’essai mis en place à Gembloux a également fait l’objet d’une protection contre la cécydomie orange à la fin mai : des insectes étaient présents au moment le plus délicat, soit au début de l’épiaison ; « on ne pouvait risquer que s’établisse une concentration de cécidomyies sur les variétés les plus sensibles. » Certains agriculteurs de la région ont aussi été contraints de traiter en raison de populations importantes de cet insecte, qui rencontre pour la 3e année successive des conditions favorables à sa reproduction.

Aux côtés du tableau 1 qui dresse une rapide fiche identitaire, le tableau 2 présente une série de données propres aux 3 dernières années d’essais (2012, 2013, 2014), voire aux 2 dernières ou à la seule année 2014, qui sont compilées dans une nouvelle base de données commune aux quatre partenaires du Groupe des expérimentateurs céréales (GEC) évoqué ci-avant : rendements moyens, caractéristiques technologiques, comportement à l’égard des maladies cryptogamiques et à la verse, précocité à l’épiaison. Les observations réalisées tout au long de cette saison culturale 2014-2015 permettront d’actualiser lesdites données à l’issue de la toute prochaine moisson.

Quant au tableau 3, il indique, pour les variétés testées au moins depuis 2013, les besoins en traitements fongicides et régulateurs : 0 à 1 traitement : variétés ne présentant pas de gros défauts ; 1 ou 2 traitements : variétés sensibles à la rouille brune, mais pas trop à la rouille jaune ou à la septoriose ; 2 traitements : variétés classiques à rendement régulier ; 3 traitements : variétés très sensibles à la rouille jaune, peu d’avenir. Les « couleurs » traduisent la sensibilité à la verse et le nombre de traitements nécessaires.

35 variétés sous la loupe

Expert : croisement Baltimore x code, fait partie du cercle très restreint des variétés qui ont obtenu, dans les essais traités, un rendement très élevé et très régulier au cours des 3 dernières années. Score moins reluisant en conditions non traitées car est sensible à de nombreuses maladies. Cette année, cette variété est davantage atteinte par la septoriose, mais étonnamment très peu par la rouille jaune (qui était pourtant présente tôt sur le site). Il est vrai que la rouille jaune est très différente de celle rencontrée l’an dernier. Entre Tournai et Liège, sous une pression parasitaire identique, les variétés manifestent des spectres de sensibilité très différents. Cette maladie est décidément très complexe et les points d’interrogations s’accroissent avec le temps ; alors que la maladie se déclarait toujours d’abord dans l’ouest du pays, aujourd’hui, les nouvelles races sont adaptées à l’ensemble du territoire. Un peu de rouille brune au moment de la visite. Précocité à l’épiaison (5) moyenne entre les variétés précoces (Cellule et Rubisco = 2) et les tardives (Sahara = 8).

Terroir : Robigus x Prémio. Ce type de croisement témoigne d’une grande partie de la sélection qui provient de France actuellement. Le nombre de blés barbus (via Premio) est en nette augmentation dans l’Hexagone. La génétique française est actuellement largement barbue et a pour origine Premio. La variété Terrour est parfaitement résistante à la rouille jaune et à la rouille brune. Rendement très élevé au cours des 2 dernières années en conditions traitées et non traitées. Bon comportement à la verse (8,3) : à souligner que les variétés qui présentent une cote > 8,5, permettent quasiment de faire l’impasse sur le régulateur.

Sy Epson : Zebedee x Robigus. Pur fourrager (Z/P très faible), poids de l’hl très faible, résistante à la verse (8,8), très saine, très tolérante aux deux rouilles, tolérante à la septoriose. Peut se satisfaire d’un seul traitement. Rendement stable dans le temps, très élevé en conditions non traitées, variété tout-terrain.

Reflection : Denman x Oakley. Un essai sur un seul site l’an dernier, donc les informations sont à prendre avec les réserves indispensables. Rendement extrêmement élevé en situation traitée et non traitée. Petite sensibilité à la rouille jaune (lien avec un des parents du croisement), moyenne à la septoriose. Fourrager.

Graham : Expert x Premio. Non barbu. Ne verse pas (8,8). Très bon rendement. Fourrager. Sensible à la septoriose.

Lyrik : Apache x code. Variété à capacité de tallage beaucoup plus élevée que la moyenne, dont il faut tenir compte dans son itinéraire cultural. Si on la sème trop tôt : risque d’excès de talles en sortie d’hiver ; si on lui apporte trop d’azote en sortie d’hiver, ce nombre de talles explose et alors les deux points faibles de la variété (oïdium et verse) la fragilisent. Dans des conditions standards de l’expérimentation, l’atout d’un fort tallage peut devenir un handicap, ce qui explique des rendements en dents de scie entre les années et entre les sites. Bien conduite (semis pas trop tôt, pas trop d’azote après l’hiver), elle se montre très performante. Sensible à une des rouilles. Demi-précoce (4). Très bonne en essais non traités sur 3 ans.

Diderot : Secobra x Nirvana. Secobra Recherches, initialement axée sur la sélection des orges de brasserie, s’intéresse désormais aussi au blé avec des résultats très prometteurs. Variété barbue mais pas précoce : original, car la plupart des blés barbus sont aussi précoces (caractères liés, sur le même chromosome). Tolérante (présence mais pas handicapante) aux rouilles et à la septoriose : rendement moyen en essais traités, bons en conditions non traitées ; PS très élevé, Z/P faible.

Pionier : (Solitär x Chevalier) x Chevalier. Testée pour la première fois en 2014. PS, protéines et Z/P très élevés. Pur panifiable, avec un rendement « logiquement » inférieur à la moyenne. A manifesté cette année une sensibilité à la rouille jaune avant montaison qui s’est estompée, voire a quasiment disparu ensuite.

JB Diego : 3315B x Stru 2374. Variété ancienne. A connu un très grand développement en Angleterre. Bon comportement à la verse. Assez tardive. Son comportement faiblit vis-à-vis des maladies : cela se traduit par des rendements faibles en essais non traités. Bien protégée, les rendements restent satisfaisants.

Matrix : Hattrick x Turkis. En 2012, elle obtenait encore un rendement relatif de 112 % des témoins, en 2013, elle a chuté à 103 %, en 2014 à 93 %. Pourquoi? Très sensible à la rouille jaune.

Valdo : une seule année d’essai.

Boregar : très sensible à la rouille brune. Fait de la rouille jaune tardive : pas de jaunisse à la montaison, et ensuite à l’épiaison elle s’y montre assez fortement sensible : cela se manifeste par ses faibles rendements en non traité. Bon comportement à la septoriose. Dans le tableau 3 résumant les stratégies de protection contre les maladies, on peut s’interroger sur la nécessité de faire un T1 à condition de faire un bon « T2 » assez tôt (dernière feuille). Très tardive à montaison, mais très précoce à l’épiaison.

JB Asano : Stamm2158 x Record. A connu un grand essor en Allemagne. Plus sensible encore que Matrix à la rouille jaune. Rendements catastrophiques en essais non protégés. PS et protéines très élevés. Fin de carrière.

KWS Ozon : (LP 296.4.96 x tambor) x Denver. Inscription belge. Belle carrière. En 2012 : 103 % des témoins, puis 99 % en 2013 et 2014, ce qui reste très honorable. Elle prend de l’âge mais ne «recule» que lentement car elle compense par un PS et un Z/P très élevés ; blé panifiable. Requiert deux traitements fongicides.

Edgar : Drifter x NIC97-306-B. Inscription belge. Variété très résistante aux maladies, dont les rouilles, et en même temps très productive en essais traités et plus encore en non traités. PS et protéines élevés.

Atomic : Aardvark x Transit. Inscription belge. Tolérant aux maladies, mais septoriose et rouille jaune bien présentes en province de Liège. Rendement très régulier. PS moyen, teneur en protéines élevée.

Limabelle : Bristol x S9378 B. Barbue mais pas précoce. Inscription belge. Très résistante aux maladies. Stabilité de rendement au fil des ans. Petit souci : lors des années à rendements très élevés, son rendement relatif est inférieur à 100 %. Cette année, elle manifeste des petites décolorations sur les feuilles, qui ne sont pas l’expression d’une maladie. Bon PZ, bonne teneur en protéines. Très bon en essais non traités.

Alcides : LW-F96Z012-05 x Boisseau. Dernière variété d’une sélection belge (Clovis Matton). Très résistante aux maladies. Très bon comportement en essais non traités. La plus flatteuse sur le plan sanitaire parmi les variétés inscrites. Fourragère.

Faustus : comportement aux maladies en retrait par rapport à ses bons résultats de l’an dernier.

Sahara : Savannah x Claire. Variété la plus ancienne (2005) de la gamme testée dans le réseau de base du GEC. Elle surprend encore positivement chaque année ! Productive et bonne tolérance aux maladies. Très tardive. Fourragère, mais PS élevé. Bonne tenue à la verse.

Henrik : Drifter x Biscay. Inscription belge. Très productive et régulière à travers les années, avec un double traitement fongicide. Fourragère. Parmi les plus commercialisées.

Forum : en essais depuis 2013. Epis très glauques. Surveiller la verse. Bon comportement aux maladies, à l’exception de la rouille brune ! Le T1 n’est pas indispensable. Mais bien raccourcir. Bon PS et bonne teneur en protéines.

Avatar : (Claire x Wasma) x Istabraq. Très sensible à la septoriose (5), d’où un faible rendement en conditions non traitées. Tardive. Fourrager. Rendement stable dans le temps.

Bergamo : bonne tolérance aux maladies, rendement très élevé. Sensible à la verse, donc bien la réguler. PS très élevé.

Mentor : bon comportement vis-à-vis des maladies, hormis la septoriose. Rendement élevé, PS et protéines élevés.

Gedser : Robigus x (Stakado x Kris) : rendement très élevé… mais observations dans 1 seul essai dans un site unique en 2014. Cotation rouille brune : 4 (!) en 2014, 9 en 2015. Prometteur.

Lithium : une première année d’essai en 2014. Précoce. Bon comportement aux maladies. Rendement élevé. Fourrager.

Anapolis : Arden x Skameje : rendement très élevé. Teneur en protéines très élevée, PS élevé. Résistant à la rouille jaune, moyen à la septoriose, présence de rouille brune. Fourrager. Tardif à maturité.

Cellule : Altamira x Nogal. Très précoce. Une des variétés les plus cultivées en France. Bon rendement. Très résistante à la septoriose. Présence de rouille jaune cette année, alors qu’elle n’en montrait pas l’an passé. Sensible à la rouille brune. PS très élevé. Pour les terres difficiles.

Elixer : (Semper x Bristol) x Tulsa. Sensible à la verse (itinéraire adapté). Très productif et très bonne résistance aux maladies. Fourrager.

Intro : Tommi x Opis x Akzento. Panifiable (bons PS, protéines, Z/P). Tardive. Sensible à la septoriose. Sensible au froid. Rendement régulier.

RGT Reform : Boomer x Opus x Hermann. Première année d’essai en 2014. Plutôt tardive avec un bon comportement aux maladies. PS, teneur en protéines et Z/P élevé : reconnu panifiable en Allemagne.

Rubisko : Robigus x Mercato. Concurrent de Cellule en France. Bon départ en 2013 (en Belgique : 102 %), puis déception l’an dernier (97 %). Semble prometteur cette année. Variété précoce, donc rendement plus dépendant des conditions météo. PS faible. Bonne teneur en protéines. Bon comportement aux maladies.

Tobak : (Elvis x Drifter) x Koch. Variété très productive et régulière. Résistante à la rouille jaune, bonne tenue à la septoriose. Sensible à la rouille brune. On peut tenter l’impasse sur le T1, mais ne pas négliger le « T2 ». Fourrager.

RGT Sacramento : Premio x 02ST2037. Une première année d’essais et 3 essais seulement en 2014 ; donc informations sous réserves. Très sensible à la septoriose, mais tient bien à la rouille jaune.

Propos recueillis par M. de N.

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