Avec ces importantes contraintes, le maraîcher sera amené à orienter ses choix de culture. En sols secs et excessivement drainants, les légumes exigeants en eau et surtout ceux qui sont sensibles aux déficits hydriques, seront plus difficiles à conduire. En sols lourds, les légumes racines seront difficiles à récolter et à décrotter en automne-hiver.
Décrypter la nature du sol
Le site de cartographie de la Région wallonne nous apporte une foule de renseignements précieux à cet égard (WalOnMap). Ces informations sur la nature du sol sont des critères déterminants dans le choix (limité) de la parcelle. Pour affiner la connaissance du sol, un examen de profil de sol réalisé sur place est précieux.
Les laboratoires du réseau Requasud peuvent donner les coordonnées de personnes compétentes pour nous aider dans cette démarche. Profitons de cette période hivernale pour mieux connaître nos sols.
Le manque d’aération du sol induit des altérations de la disponibilité d’éléments minéraux, ce sont des carences induites par défauts structurels du sol et non par le manque absolu des éléments concernés !
Le sol étant ce qu’il est, nous avons à organiser le travail du sol pour valoriser au mieux son potentiel. L’asphyxie (manque d’aération, manque d’oxygène) et le tassement (lié à la compaction) sont deux défauts que le travail du sol pourra réduire.
La semelle de labour ou de pseudo-labour est provoquée par des travaux réalisés avec des engins trop lourds en conditions trop humides. Le sol se tasse, l’air est expulsé de la zone tassée, une zone imperméable ou peu perméable à l’eau, à l’air, au passage des racines est créée. Un sous-solage permet de briser cette imperméabilité, les racines des légumes et des engrais verts pourront descendre plus profondément.
Mais encore…
Pour du maraîchage efficace, évitons les sols très lourds. Souvent froids, ils sont difficiles à travailler, la croissance végétale est médiocre du milieu de l’automne au début du printemps.
Les sols très légers sont difficiles à conduire pour les cultures exigeantes (choux, etc.) mais conviennent bien pour des cultures peu exigeantes (carottes, racines de chicon, mâche).
Les cailloux fatiguent les récolteuses et blessent les racines et tubercules (carottes, pommes de terre).
Les sols fatigués (nématodes, Sclerotinia, Rhizoctone) ont besoin d’une rotation longue en légumes, éventuellement coupée par des céréales si c’est envisageable.
Les engrais verts
Combinés aux apports de fumiers et de compost, les engrais verts permettent des améliorations rapides de la structure du sol pour autant que les façons aratoires soient adaptées à la texture du sol.
Le choix des outils de travail du sol doit être raisonné. Ce sont les objectifs qui orientent le choix. En cultures maraîchères, les résidus de culture après récolte sont parfois importants en masse (après choux par exemple). Les résidus seront mieux valorisés par le sol s’ils sont incorporés sur une faible profondeur. Les récoltes se font parfois en conditions de sol très humides, mais ce sont les calendriers de livraison et l’état de maturité technologique des cultures qui imposent les rythmes de travail. Il faut pouvoir décompacter le sol jusqu’à la profondeur « matraquée ».
Et surtout, choisissons nos moments pour travailler le sol : il n’est pas question d’une date ou d’une période dans l’année. En Belgique, les pluies tombent en moyenne pluriannuelle avec la même intensité chaque mois. Ce sont les variations annuelles qui déterminent les bons moments d’intervention : ni trop sec ni trop humide à la profondeur travaillée.
La fertilisation organique d’abord !
La fumure minérale vient en complément, éventuellement en complément correctif, de la fumure organique et des amendements. Et non l’inverse. La nature de la fumure minérale diffère selon les cahiers de charge, bio ou pas.
C’est vrai en grandes cultures, c’est encore plus vrai en cultures maraîchères : il est difficile de faire coïncider la disponibilité des minéraux, notamment l’azote, avec les besoins des cultures en place.
En plein air, la minéralisation, dans l’attente du réchauffement printanier du sol, prend du retard, en comparaison avec les besoins des cultures de mars à juin. Elle est ralentie quand la température du sol est faible, l’hiver et au début du printemps. Elle est ralentie également si le manque d’humidité du sol freine l’activité biologique.
Sous serre maraîchère, la température et l’humidité sont propices à une forte minéralisation dès le printemps, le manque de disponibilité en eau en été la freine au détriment des cultures en place.
Les engrais verts
Dans la rubrique maraîchère du Sillon Belge, nous avons souvent évoqué l’importance des engrais verts pour la fertilité des parcelles, tant via la vie dans le sol et le recyclage des éléments en cours de lessivage que via la maîtrise de l’enherbement dans la période séparant la récolte d’une culture et l’implantation de la suivante.
Rotation des cultures et fertilité du sol
Lors de l’installation de parcelles maraîchères sur des champs occupés pendant de longues années par des grandes cultures et des cultures fourragères temporaires, la question du respect de la rotation ne se pose pas vraiment. Ce ne sera qu’après quelques années que se présentent les augmentations de risques liés aux maladies et ravageurs qui survivent dans le sol. Après quelques années également, une rotation basée sur des cultures d’été amène une sélection d’espèces végétales qui peuvent dominer la flore et compliquer la maîtrise de l’enherbement.
Par contre, dès la première année, l’exploration trop superficielle du profil du sol peut augmenter le risque de lessivages des éléments minéraux les plus solubles, d’où l’importance des engrais verts ou des cultures intermédiaires pièges à nitrates (cipans).
Pour résoudre la question de la rotation, nous devons partir des cultures effectivement produites dans la ferme et les faire se succéder au fil du temps en tenant compte des critères ci-dessus. Les rotations types reprises dans les livres de maraîchage sont des exemples mais sont rarement adaptées in extenso à notre propre situation.
La fertilité d’un sol dépend aussi de son environnement et notamment des haies et des parcelles voisines (voir l’édition du Sillon Belge du 19 août 2016).