Accueil Elevage

Produire la litière pour ses animaux grâce aux haies

Les années sèches, de plus en plus fréquentes, les prix des fourrages et de la paille flambent. Dans les zones herbagères, où la culture de céréales est peu importante et les haies nombreuses, l’utilisation de plaquettes bocagères comme litière en remplacement ou comme complément à la paille permet de réduire le budget litière de l’exploitation. L’achat de paille provenant des régions céréalières pose aussi des problèmes environnementaux du fait des transports que cela occasionne, et aussi par la diminution du taux de carbone des terres de ces régions.

Temps de lecture : 5 min

En France, la technique s’est déjà bien développée dans certaines régions depuis une vingtaine d’années. Cela permet d’émettre des recommandations d’utilisation et de chiffrer l’intérêt.

Selon ces sources, on estime qu’une tonne de plaquettes sèches équivaut à une quantité de paille entre 1 tonne et 1,3 tonne. Une tonne de plaquettes équivaut à 4 mètres cubes. Tout type de bois peut être utilisé, mais les bois moins denses (saule, peuplier, bouleau, noisetier…) sont plus absorbants. Il est préférable de stocker les plaquettes à l’abri pendant 6 à 8 semaines pour qu’elles sèchent. L’utilisation de bâches perméables à l’air et imperméables à l’eau est possible. Ce type de bâche, également utilisé pour couvrir les tas d’engrais de ferme au champ, est réutilisable et coûte entre 1,45 et 2,45 €/m2.

De nombreux avantages

La pratique la plus répandue consiste à apporter une couche de 5 à 10 cm d’épaisseur avant l’entrée des animaux. Après 2 à 3 semaines, lorsque les animaux commencent à se salir, on apporte alors une couche de paille ou une fine couche de plaquettes. Les utilisateurs estiment aussi que la quantité de paille utilisée ensuite est moindre grâce à l’effet drainant de la sous-couche. L’apport d’une couche épaisse (10 cm) n’est pas conseillé car cela entraîne une surconsommation de plaquettes. Le système mille-feuilles (alternance plaquettes/paille) est également utilisé.

Les retours des agriculteurs qui utilisent la plaquette sont généralement très positifs.

À côté de l’économie de paille, d’autres avantages sont fréquemment cités : litière plus saine car fort pouvoir absorbant et drainage efficace, animaux plus propres, moins d’odeurs et de mouches, bonne portance, résiste au tassement, moins d’échauffements, ressource locale, bon marché, la sous-couche non compactée facilite le curage et l’épandage… De nombreux témoignages et données techniques ont été rassemblés dans le cadre du projet Arbele (l’Arbre dans les exploitations d’Élevage herbivore), et peuvent être consultés sur le site « idele.fr ». En France, certains GAEC produisent des plaquettes qu’ils utilisent comme litière et préfèrent vendre la paille.

Cependant, la plaquette n’ayant pas de longs brins, contrairement à la paille, elle ne crée pas de tapis. Et si elle devient trop humide, les animaux s’enfoncent dedans. Il convient donc, dans le cas d’une sous-couche de plaquettes, de ne pas trop tarder à apporter de la paille qui va créer un tapis à travers lequel les animaux ne passeront pas, et la plaquette conservera son caractère drainant. Il ne faut pas se fier à la couleur de la litière plaquette car elle prend un aspect marron sans pour autant que les animaux soient sales.

Actuellement, il est possible de se procurer des plaquettes à un prix très attractif. Environ 40 €/tonne (10€/map) au départ. Ces plaquettes proviennent notamment du broyage d’épicéas scolytés. Comme il s’agit de résineux, l’utilisation en complément de la paille et le compostage avant épandage sont recommandés. Par contre, la disponibilité importante de cette ressource constitue une opportunité pour tester cette litière tout en réalisant des économies de paille cet hiver.

Moins cher que la paille

Les coûts de production des plaquettes bocagères peuvent varier fortement selon le contexte, mais se situent en dessous du prix de revient de la paille, même lorsque celle-ci est autoproduite. Selon La chambre d’agriculture de l’Ain : « Le coût de 10 cm de plaquettes étalées dans la stabulation pour 100 UGB pendant trois semaines est de 600 € (pour de la plaquette produite sur l’exploitation). Ce même apport de paille peut coûter entre 850 € (pour de la paille pressée sur l’exploitation) et 3.365 € pour de la paille achetée à 170 €/t. » Le prix de revient en autoproduction est évalué entre 50 et 70 €/tonne de bois sec. La taille est effectuée d’octobre à février lorsque la sève est descendue ; les branches sont broyées fraîches, et on laisse le broyat sécher sous abris quelques mois avant utilisation. Pour une exploitation tous les 10-12 ans, on peut espérer une production de 8 à 12 tonnes par km par an.

Une ressource fourragère

Le projet du gouvernement wallon de planter 4.000 km de haies est une opportunité pour les agriculteurs qui souhaitent assurer une autoproduction au sein de leur exploitation ou à l’échelle d’un territoire. Les aides à la plantation et à l’entretien permettent d’améliorer encore le bilan financier, déjà positif, par rapport à l’achat de paille. L’asbl Natagriwal peut aider tout agriculteur à monter votre dossier pour bénéficier des aides. Pour la production de bois plaquette, il faut accepter de laisser pousser la haie pendant plusieurs années et accepter une certaine emprise de celle-ci sur la surface du terrain. Il faut privilégier des espèces feuillues à croissance rapide comme le bouleau, le noisetier, le saule… L’exploitation se fait de façon entièrement mécanisée selon une fréquence de 10 à 20 ans, selon les espèces et le matériel disponible.

La haie peut aussi constituer une ressource fourragère permettant de pallier en partie un déficit de production d’herbe en période de sécheresse. Certaines espèces (sureau noir, orme, tilleul, aulne, noisetier…) sont bien appétées et ont une valeur alimentaire appréciable.

Pour aider l’agriculteur à choisir les espèces les mieux adaptées en fonction des objectifs et de la région pédoclimatique, l’Awaf a conçu, dans le cadre du projet « haies multifonctionnelles », et mis en ligne une brochure interactive accessible sur le site mahaie.be.

Pour ceux qui pensent que l’exploitation d’une haie demande trop de travail, Le Centre de Michamps propose une démonstration, dont la date n’a pas encore été fixée. Une partie des plaquettes produites lors de cette démonstration servira à des tests comme litière en exploitations (Bastogne et communes voisines) et, ensuite, la valeur fertilisante du fumier produit sera étudiée.

D’après Richard Lambert

Earth and Life Institute,

Centre de Michamps

A lire aussi en Elevage

Sauvons Bambi: pour repérer les faons avant les fauches

Elevage Sauvons Bambi est une asbl de bénévoles regroupant des pilotes de drones, des agriculteurs ainsi que des amoureux de la nature qui proposent gratuitement leurs services. Leur mission principale est de sauver les faons de chevreuil et les nids d’oiseaux nicheurs au sol au moment de la fauche des prairies sur l’ensemble de la Belgique et du Luxembourg.
Voir plus d'articles