Curieusement, ce mouvement intègre l’agriculture dans ses slogans. Wouah ! Super, si tous les jeunes pouvaient se donner la main pour défendre l’agriculture… avant qu’il ne soit trop tard, ce serait formidable. Il y a effectivement urgence !
En fait, de quelle agriculture parle-t-on ? Est-ce l’agriculture paysanne traditionnelle qui est concernée ou plutôt le style « barbu, poilu, chevelu, pieds nus dans les sandales » comme à Notre Dame des Landes ? Et pourquoi pas les deux ?
Ceci dit, ils durcissent le ton pour se faire entendre. On peut les comprendre. Il y a quelques mois, les dizaines de milliers d’étudiants manifestant pour le climat faisaient deux minutes au JT alors que dix fois moins de casseurs recevaient une couverture médiatique dix fois plus importante.
D’autre part, on l’a compris, ce n’est pas l’urgence concernant l’extinction du monde agricole pour lequel ils se rebellent mais l’urgence climatique. Aujourd’hui, même les banques proposent de faire un geste pour la planète en sollicitant notre argent. Comme c’est beau. Même les constructeurs automobiles et l’État nous proposent de faire un geste pour la planète en passant du diesel à l’essence, donc en consommant plus de carburant et plus de taxes. C’est encore plus beau !
Bref, entre l’Agri-bashing (ceux qui discréditent l’agriculture pour vendre quelque chose) et le Green-washing (ceux qui font mine de soutenir l’environnement pour vendre autre chose), l’agriculture n’a pas facile à trouver sa voie, encore moins à donner de la voix.
C’est le grand paradoxe : dans les années 70-80, il y a… cinquante ans (!), l’agriculture (et l’industrie) polluaient mais tout le monde s’en foutait. Aujourd’hui, on ne pollue quasi plus mais tout le monde s’inquiète, voire condamne.
Tout est cyclique. Prendra-t-on conscience de tout cela avant qu’il ne soit trop tard. Mais comment faire entendre sa voix ? Les syndicats agricoles en sont conscients. Marianne Streel a imaginé ce que serait la Wallonie avec « zéro agriculteur », paraphrasant le fameux slogan d’un ministricule que les électeurs ont remballé dans les coulisses.
Toutes nos campagnes sont emblavées en engrais verts. Plein de grands gestes pour la planète, pour l’environnement, pour la bio-fertilité des sols et pour la rentabilité, donc la survie de l’agriculture. Y aura-t-il une ONG pour en parler » ? Ah, oui, Protect’eau, en proposant 40 panneaux CIPAN explicatifs pour mettre dans les champs en bord des routes. Mais ce sont des milliers de panneaux qu’il faudrait mettre.
Aujourd’hui, il faut taper fort pour se faire entendre. Les fermiers n’ont ni le temps, ni le virus informatique pour occuper la toile Internet. Ils sont d’ailleurs moins nombreux pour nourrir la population que les policiers pour la surveiller ou les coiffeurs pour l’embellir.
Par contre, les agriculteurs occupent 50 % du territoire. C’est énorme. Alors, s’il faut se rebeller pour ne pas s’éteindre, c’est peut-être de ce côté-là qu’il faut se bouger. Planter un panneau, c’est inutile. Planter 10.000 panneaux, chacun un ou deux, c’est énorme.