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Quelques chiffres de suivis en ferme sur le semis de prairie au printemps sous couvert d’une plante abri

Cela fait maintenant 5 ans que l’asbl Fourrages Mieux réalise un suivi agronomique sur plusieurs parcelles de prairies semées sous couvert en province de Luxembourg et ce, dans le cadre d’un projet européen Leader initié par le Gal (groupe d’action locale) haute Sûre forêt d’Anlier. L’article présente quelques données relatives à ces prairies sous couvert de printemps suivies depuis 2017.

Temps de lecture : 8 min

Chez les éleveurs suivis, le mélange le plus couramment utilisé comme couvert lors de semis de prairie est composé de 50 à 70 kg/ha d’avoine de printemps et de 30 à 40 kg/ha de pois fourragers. Le pois protéagineux est également utilisé le plus souvent en pure à raison de 120 à 140 kg/ha en fonction de son poids de mille grains avec pour objectif une dose de 50 grains/m2. Les mélanges de couverture rencontrés contiennent généralement entre 2 et 4 espèces différentes maximum.

Les prairies sous couvert de printemps suivies ont généralement été semées avec l’itinéraire cultural suivant :

Labour – roulage du labour – rotative + semis du couvert – semis du mélange prairial – roulage du semis.

En ce qui concerne le semis

Par rapport au semis de prairie classique, le semis sous couvert nécessite un passage de semoir en plus mais il est utile de préciser que certains entrepreneurs disposent de combinés de semis permettant un semis simultané du couvert et du mélange prairial via deux trémies différentes et donc 2 profondeurs différentes. La période de semis pour des prairies semées sous couvert débute généralement au mois d’avril lorsque le sol est réchauffé et ressuyé. Un apport d’engrais organique peut-être apporté avant le semis sauf derrière une prairie permanente où la quantité d’azote libérée est largement suffisante pour combler les besoins d’installation de la prairie. Aucune fertilisation minérale azotée n’est nécessaire avant la 1ère coupe, surtout dans les cas de figure où le couvert est composé de légumineuses ou bien après retournement de prairie ou encore lorsque des engrais organiques ont été épandus avant le semis (compost, fumier…).

Aucun désherbage n’a été nécessaire sur les parcelles suivies. Il est d’ailleurs très rare de voir des parcelles semées sous couvert infestées d’adventices pour autant que le semis ait été réussi. Il est important de souligner que le désherbage chimique des prairies sous couvert de mélange « céréale/légumineuse » est impossible à ce jour car aucun herbicide n’est agréé en Belgique à la fois sur céréale et sur légumineuse (pois, féverole ou vesce). Si des adventices vivaces comme le rumex posent problème dans vos prairies sous couvert et ce malgré la fauche du couvert, nous vous conseillons d’attendre la repousse de fourrage après cette 1ère fauche afin d’utiliser une solution herbicide agréée sur les prairies.

En ce qui concerne la profondeur de semis, la composante céréale se sème à 2-3 cm de profondeur à une densité de 40 à 60 kg/ha maximum dans le but de limiter la concurrence. Le choix d’une semence de céréale fermière ou de triage permet de réduire fortement les coûts au semis surtout si cette céréale est récoltée en fourrage comme c’est le cas pour la grande majorité des prairies sous couvert.

Le nombre moyen de jours entre le semis et la récolte est de 85 jours. 70 % des prairies sous couvert suivies ont été récoltées sous la forme d’ensilage, le plus souvent en combinaison avec le chantier de récolte de la deuxième coupe des prairies permanentes. Les 30 % restants ont été récoltés en enrubanné.

Quid des rendements ?

Le tableau 1 présente les rendements moyens à la fauche obtenus en 1ère coupe pour les différents mélanges de prairies sous couvert semés au printemps durant la période 2017-2020 ainsi que les qualités correspondantes (valeurs à la récolte).

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Ces parcelles suivies sont aussi bien cultivées en agriculture conventionnelle que biologique. Les rendements en 1ère coupe varient presque du simple au double mais ce constat ne signifie pas que le moins productif est le moins intéressant. En effet, les conditions pédoclimatiques de l’année, les densités de semis, le type de plante utilisé et bien sûr le stade de récolte (vert ou immature) vont inévitablement faire varier les rendements récoltés. De plus, la qualité du fourrage produit diminue à mesure que le rendement augmente. Plus les plantes qui composent les couverts avancent en maturité, plus leur taux de matière sèche et de fibres augmente avec pour conséquence une diminution des teneurs en énergie et protéines. Le même mélange peut donc être récolté avec un objectif de rendement quantitatif (ex : vache allaitante ou sécheresse printanière) ou bien dans un objectif de qualité de fourrage (ex : vache laitière).

En 2021, les rendements des prairies sous couvert de printemps (Cf. tableau 2) ont été plus faibles par rapport aux années précédentes en raison de plusieurs facteurs. D’une part, les dates de semis ont pour certains agriculteurs été reportées au mois de mai ce qui a eu pour effet de réduire la période de croissance totale, d’autre part, les conditions météorologiques du printemps ont été très fraîches et humides. Ces conditions ont ralenti la pousse des prairies sous couvert mais également augmenté la teneur en eau dans ces fourrages. Plusieurs prises de rendements ont été réalisées sur du fourrage mouillé ce qui engendre in fine une petite sous-estimation de la matière sèche du fourrage. De plus, trois des 7 parcelles suivies en 2021 (« Orge – trèfle d’Alexandrie + PT », « Orge – trèfle de Perse + PT » et « Avoine – trèfles annuels + PT ») ont été échantillonnées 10 jours avant leur date de fauche réelle afin de s’assurer, dans un souci d’organisation, d’obtenir des chiffres de rendement au vu de la météo changeante du mois de juillet 2021.

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Cependant, il est intéressant de noter dans le tableau 2 que la qualité protéique des premières coupes 2021 fût excellente (moyenne de 15,6 % de MAT/kg MS) entre autres par le fait de la présence marquée des légumineuses dans les mélanges de couverture (25 % de présence à la récolte en moyenne avec un minimum de 6 % et un maximum de 57 %). Les rendements moins importants et les stades de fauche moins avancés expliquent également ces teneurs élevées.

Les enseignements du projet

Depuis le début du projet, quelques enseignements ont pu être tirés de ces suivis de terrain :

– il est préférable de ne pas associer le pois fourrager à l’orge de printemps sous peine de voir augmenter le risque de verse en particulier lorsque la récolte est effectuée tardivement (au stade « grains de l’orge remplis ») ;

– l’orge de printemps s’associe très bien avec les trèfles annuels (trèfle de Perse et d’Alexandrie) et convient bien pour une récolte précoce au stade épiaison de la céréale ;

– le stade de récolte conseillé pour des prairies sous couvert à base de céréales se situe entre le stade « début épiaison » de la céréale (environ 65 à 70 jours après le semis, stade vert = fourrage riche) et le stade « grain de céréale laiteux-pâteux » (environ 85 à 90 jours après le semis, stade immature = fourrage volumineux mais plus fibreux). Le choix du stade se fera en fonction des objectifs de qualité du fourrage récolté et également des conditions météo de l’année ;

– il est conseillé de ne pas semer plus de 40 à 50 kg de céréale par hectare (en fonction du type de céréale) afin de ne pas étouffer la jeune prairie en sous étage ;

– dans la mesure du possible, il est conseillé d’utiliser des semences de céréales fermières ou des semences de triage (1ère ou 2e jetée) lors de la confection des mélanges de couverture afin de diminuer fortement le coût des semences (gain financier entre 50 à 60 €/100 kg par rapport à des semences de céréales sélectionnées) ;

– le pois fourrager ne peut être utilisé seul comme plante de couverture car le risque de verse à la récolte est trop important ;

– l’utilisation de protéagineux dans les mélanges de couverture (pois fourragers ou protéagineux, féverole) doit être raisonnée en nombre de grains/m². Il faut absolument tenir compte du poids de mille grains (PMG) de chaque espèce qui peut être très variable d’une variété à l’autre chaque année. Afin d’effectuer la conversion plus facilement, il est possible d’utiliser la formule suivante : Densité de semis en kg/ha = nombre de grains par m² conseillé X (PMG de la variété choisie/100).

Exemple : une prairie semée à 30 kg/ha sous couvert de céréale (40 kg/ha) et de pois fourrager (25 grains/m²) au printemps. Le PMG de la variété de pois choisie est de 180 g. La dose de pois à semer sera de (25 x (180/100) = 45 kg/ha. Si le pois avait eu un PMG de 100 g, la dose à l’hectare aurait été de (25 x (100/100) = 25 kg/ha et ce pour un nombre de pois au m² identique.

A titre informatif, le rendement annuel moyen d’une prairie temporaire à base de légumineuse (3 coupes l’année) mesuré sur la même zone géographique et à la même période est de 9,8 tonnes de matière sèche par hectare. Ces prairies installées sous couverts de printemps peuvent donc produire en une seule coupe entre 45 et 85 % du rendement total annuel d’une prairie temporaire riche en légumineuses démontrant une fois de plus leur intérêt dans les systèmes de production fourragère. Sachant qu’une 2e coupe est toujours au minimum réalisée, il est donc possible d’installer des prairies temporaires au printemps sur cette zone géographique sans pertes de rendement annuel.

Des essais en parcelles d’expérimentation ont été installés en 2021 et seront installés également en 2022 par Fourrages Mieux et ses partenaires afin de tester plus en détail les semis de prairies sous couverts de printemps et d’automne.

Un conseil pour l’implantation, la récolte ou la valorisation de votre prairie sous couvert ? Guillaume Meniger (0472/76.51.56) et David Knoden (0473/53.64.95) ou par mail meniger@fourragesmieux.be et knoden@fourragesmieux.be.

D’après Fourrages Mieux

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