Apport de lisier : tout ce qu’il faut savoir sur les différents types d’équipement

Le lisier est un fertilisant abondant, bon marché et intéressant car riche en matière organique, azote, phosphore, potasse, magnésium,... L'azote y est présent sous différentes formes, parmi lesquelles figure l'azote ammoniacal. Cette forme est problématique du fait qu'elle est particulièrement volatile. Le taux d'ammoniac dans un lisier est variable mais peut représenter un fort pourcentage de l'azote total contenu dans celui-ci.

Si les caractéristiques du lisier influencent sa teneur en azote ammoniacal, les conditions d'épandage sont aussi un facteur déterminant en ce qui concerne les pertes par volatilisation. A ce niveau, les conditions météorologiques pendant et après l'épandage mais aussi le matériel utilisé se révèlent cruciaux. En effet, la volatilisation de l'azote ammoniacal est favorisée par le contact entre le lisier et l'air.

Le matériel d'application du lisier favorise plus ou moins fortement ces pertes par volatilisation selon qu'il engendre ou non un contact avec l'air. Ce dernier dépend de la hauteur de projection et du fractionnement du lisier en gouttes plus ou moins fines. Il est par ailleurs vivement recommandé d'épandre le lisier par temps frais, pluvieux et calme. Plus l'air est sec, chaud et en mouvement (vent), plus la volatilisation est importante. Il faut cependant éviter l'épandage lorsque le niveau d'humidité du sol est très élevé : en sus d'un risque d'orniérage conséquent, du lisier peut rester stagnant à la surface, engendrant alors un contact prolongé avec l'air.

Outre l'impact financier négatif inhérent, les pertes d'azote ammoniacal représentent aussi un souci environnemental majeur. Le législateur s'est d'ailleurs emparé de cette problématique il y a quelques temps déjà en restreignant les périodes d'épandage et en interdisant certains outils d'application en fonction de la capacité du tonneau.

L'épandage classique: en nappe

L'éparpilleur constitue le système d'épandage traditionnel : il comporte une buse projetant le lisier contre un déflecteur (palette). Le jet de lisier ainsi éclaté retombe ensuite sur le sol.

L'éparpilleur conventionnel dispose d'une buse orientée vers le bas et d'une palette par-dessous. De ce fait, la nappe de lisier est projetée vers le haut. Ce dispositif crée dès lors un important contact avec l'air, d'autant plus néfaste que la taille des gouttes de lisier est faible.

D'autres éparpilleurs reposent sur le même principe mais avec, cette fois, une buse vers le haut et une palette par-dessus, réduisant alors le contact air-lisier par une projection de la nappe plus proche du sol. Il en est ainsi de l'éparpilleur exact, qui dispose par ailleurs d'une palette en V pour une meilleure répartition de la nappe sur les côtés.

L'éparpilleur col de cygne ou l'éparpilleur pendulaire représentent deux autres alternatives. Le premier dirige le flux de lisier à la verticale vers le sol, tandis que le second oscille pour envoyer le lisier alternativement vers la gauche et vers la droite. L'éparpilleur pendulaire autorise un épandage à faible pression, favorisant ainsi la formation de gouttes de lisier de plus grande taille, moins sensibles au contact avec l'air.

Les éparpilleurs font parfois l'objet de critiques, non seulement en ce qui concerne les désagréments olfactifs occasionnés, mais aussi du fait de la répartition transversale du lisier lors de l'épandage qui n'est pas optimale et dépend du recouvrement des nappes de deux passages successifs.

Les rampes multibuses sont un concept d'épandage en nappe permettant d'accroître la largeur de travail en plaçant plusieurs éparpilleurs sur une rampe. Certains de ces dispositifs réduisent aussi partiellement les émissions d'azote ammoniacal grâce à un positionnement des éparpilleurs plus proche du sol.

Les rampes à pendillards

La rampe dispose de pendillards, des boyaux flexibles espacés le plus souvent de 25 à 30 cm, par lesquels transite le lisier et permettant de déposer l'effluent en ligne au pied des végétaux. De cette façon, le ralentissement de la croissance est limité, de même que les pertes en éléments nutritifs.

Si la plupart des rampes à pendillards déposent le lisier à la surface du sol, certaines sont dotées d'un patin à l'extrémité de chaque pendillard traçant un léger sillon dans le sol. Le lisier s'immisce alors partiellement dans celui-ci, réduisant d'autant le contact avec l'air et avec la couverture végétale de la parcelle.

Cette technique d'application a fait ses preuves depuis plusieurs années et tend à devenir plus fréquente. Le point critique de ce dispositif reste le risque d'obstruction des pendillards en cas d'utilisation de lisiers chargés. Il est dès lors fondamental d'opter pour un répartiteur adapté et performant, en fonction des lisiers rencontrés. Pour rappel, le répartiteur est l'organe situé juste à la sortie de la cuve et ayant pour rôle de distribuer uniformément le lisier à l'ensemble des pendillards.

La majorité des répartiteurs du marché sont de type circulaire. Certains sont passifs, d'autres sont actifs (ces derniers jouent alors aussi un rôle de broyeur plus ou moins actif selon que les couteaux sont eux-mêmes mobiles autour de leur axe ou fixes). Ils peuvent être placés horizontalement ou verticalement sur la machine, seuls ou à plusieurs, et disposer ou non d'un inverseur. Lorsque le lisier s'avère particulièrement chargé, il peut être pertinent d'équiper la tonne à lisier d'un broyeur supplémentaire. A cet égard, il reste toutefois nécessaire de rappeler que le bon usage vis-à-vis des lisiers chargés reste de le mixer correctement dans la fosse, de manière à éliminer les résidus les plus volumineux et à homogénéiser le produit à épandre.

Un autre type de répartiteur existe également : le dispositif à vis sans fin. Avec celui-ci, les pendillards sont connectés à une sorte de gouttière dans laquelle le lisier est réparti grâce à la rotation d'une vis.

Dans tous les cas, il y a lieu de nettoyer régulièrement le répartiteur, de l'inspecter pour déceler d'éventuels dégâts ou problèmes, d'en extraire les corps étrangers et d'en assurer la bonne lubrification.

Les rampes à pendillards permettent d'accroître la largeur d'application et améliorent considérablement la répartition transversale de l'épandage. De plus, il est à noter que la pression à la sortie de chaque pendillard est fortement réduite. Ceci a pour conséquence une réduction des émissions et des odeurs.

Les injecteurs : le must !

Les injecteurs, ou enfouisseurs, sont les outils réduisant le plus les impacts environnementaux et olfactifs. Contrairement aux rampes à pendillards qui s'utilisent en toutes conditions, il y a lieu ici de distinguer les injecteurs pour prairies et les injecteurs pour terres de cultures.

Les injecteurs de prairies

L'injection du lisier s'y fait dans l'horizon superficiel du sol ; la profondeur d'application du lisier est souvent comprise entre 0 et 6 cm en fonction du type d'injecteur et du réglage retenu. La préservation de l'intégrité de la couverture végétale de la prairie est un leitmotiv fondamental pour les concepteurs de ce type de matériel ; c'est la raison pour laquelle les outils les plus performants disposent à ce titre d'éléments injecteurs suiveurs, en tout cas ceux travaillant aux profondeurs les plus importantes.

Il faut veiller à ce que les éléments d'épandage bénéficient de débattements importants de façon à suivre les irrégularités du sol le plus fidèlement possible, y compris à des vitesses d'avancement élevées. Un autre point d'attention important lors du choix d'un tel équipement réside dans le système de réglage de la pression d'application de l'élément sur le sol et le réglage de la profondeur. Il peut notamment s'agir de systèmes par ressorts ou de dispositifs hydrauliques.

Deux grands types d'injecteurs pour prairies sont proposés par les constructeurs : les injecteurs à patins et les injecteurs à disques.

Dans le premier cas, des patins tranchants ouvrent une saignée de faible profondeur dans le sol dans lequel s'écoule la veine de lisier. En cas de couvert végétal abondant, les patins peuvent être précédés de petits disques. Les injecteurs à patins sont conçus pour déposer le lisier à faible profondeur (en général, entre 0 et 3 cm).

Les injecteurs à disques, quant à eux, travaillent à des profondeurs plus importantes (jusqu'à 6 cm). Leur fonctionnement repose sur l'utilisation de disques lisses suivis chacun d'un cône d'injection déversant le lisier dans le sillon ainsi ouvert. Sur certains modèles, les disques peuvent être permutés avec d'autres, de profil ou de diamètre différent, de manière à satisfaire à tous les besoins et conditions rencontrés. Certains injecteurs à disques pour prairies peuvent aussi être employés dans des cultures levées ou après récolte.

Les injecteurs de cultures

Les techniques mises en œuvre ont recours à l'utilisation d'un outil de travail du sol incisant la terre, suivi par un conduit injectant le lisier dans le sol à une profondeur de plusieurs centimètres (de 10 à 20 cm).

Comme pour les injecteurs de prairies ou les rampes à pendillards, les remarques avancées plus haut concernant le répartiteur restent d'application afin de limiter le risque d'obstruction de chaque élément d'injection.

En fonction des conditions, de la couverture végétale et du travail souhaité, il existe des injecteurs à dents rigides ou flexibles et des injecteurs à disques. Au rayon des avantages, il est évident qu'il s'agit de la solution optimale pour minimiser les pertes d'azote ammoniacal par volatilisation puisqu'il n'y a pas de contact direct lisier-air. Pour autant que l'organe répartiteur remplisse correctement son office, la répartition transversale de l'épandage est également irréprochable. De plus, certains utilisateurs avancent qu'il peuvent, dans certains cas, économiser un passage d'outil de travail du sol grâce au travail d'ameublissement effectué par l'outil d'injection. Cependant, cet appareillage se révèle plus coûteux à l'achat et requiert une puissance de traction supérieure. La largeur de ces outils est par conséquent réduite et limite donc le débit de chantier.

Les injecteurs à dents rigides sont généralement munis de socs de type patte d'oie dans le but d'ouvrir une galerie importante dans le sol dans laquelle pourra s'écouler le lisier sur une grande largeur (15 à 25 cm). Ce type de dents procure également un bon effet de déchaumage et génère une certaine constance au niveau de la profondeur d'application du lisier.

Les injecteurs à dents flexibles sont eux pourvus le plus fréquemment de dents droites plus étroites. L'effet vibrant de ces dents ameublit davantage le sol, améliore le mélange entre les résidus végétaux et la terre, et offre une meilleure préparation du lit de semence. L'effet de désherbage mécanique est lui aussi supérieur. .

Qu'il s'agisse d'injecteurs à dents rigides ou à dents flexibles, il faut veiller à ce que l'intervalle entre les dents mais aussi l'inter-rang (si plusieurs rangées de dents sont présentes) non seulement conviennent à une bonne distribution du lisier mais offrent également le dégagement nécessaire pour éviter l'accumulation de végétaux et de pierres.

En ce qui concerne les injecteurs à disques, ils permettent d'évoluer à des vitesses plus rapides et offrent une incorporation du lisier efficace grâce à son mélange homogène avec le sol. Il s'agit le plus souvent de disques incurvés et crénelés de grand diamètre incisant avec facilité les résidus végétaux en surface. Certains dispositifs sont dotés de deux rangées de disques travaillant en opposition : la première rangée ouvre le sol tandis que la seconde recouvre et enfouit le lisier injecté juste derrière la première rangée.

N. H.

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