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Produire des vins de fruits : plus facile que l’on croit

La production familiale ou artisanale de vins de fruits fait partie des traditions et du savoir-faire dans le monde des horticulteurs. Il existe un grand nombre de techniques différentes. Toutes sont valables… pour autant que le résultat final soit agréable à déguster !

Temps de lecture : 9 min

Les années où la production fruitière est abondante, comme c’est le cas en 2018, un certain nombre de personnes néophytes en la matière se renseignent en vue de transformer une partie de leur récolte de fruits en boissons fermentées.

Différentes associations d’amateurs de vins et des cercles horticoles organisent à ce sujet des conférences, démonstrations et visites, ou des ateliers pratiques. Il existe aussi une très abondante documentation diffusée soit sur papier, soit via les médias. Souvent, elle rebute les néophytes par son caractère technique trop approfondi.

L’expérience nous a montré qu’un vinificateur débutant a intérêt à commencer par la production de vin de pommes, mousseux ou non. C’est le vin le plus simple à réaliser et le plus facile à réussir. Ensuite, après avoir acquis une expérience de base, il pourra diversifier sa production en se documentant et en effectuant différents essais avec d’autres fruits ou des mélanges de fruits différents.

Le point de départ : des pommes !

Le choix des variétés est très important pour la qualité finale du vin. Chaque variété de pommes présente un goût qui est déterminé par quatre éléments : les sucres, les acides, les arômes, et les tanins. Pour obtenir un vin au goût agréable, il faut un équilibre harmonieux entre ces quatre éléments. Lors de la fermentation, les sucres vont se transformer en alcool éthylique : 17 g de sucres totaux (glucose + fructose + saccharose) par litre de jus génèrent 1 % d’alcool.

Puisque les variétés de pommes dont la composition est équilibrée sont peu nombreuses (‘Elstar’ par exemple), il est recommandé d’associer plusieurs variétés différentes qui ont chacune une note dominante différente. Par exemple, à ‘Jonagold’, très aromatique et très sucrée, on associera 25 % de ‘Belle de Boskoop’, plus acide et tannique.

Le degré de maturité des fruits lors de la transformation est un critère important : des fruits en sur-maturité produiront moins de jus, tandis que des fruits encore trop peu mûrs seront très acides, peu sucrés et sans arômes.

Les fruits doivent être lavés à l’eau et débarrassés des parties gâtées.

Produire…

Un broyeur à moteur électrique ou manuel, et une presse à vis représentent un investissement important. Pour un premier essai, il est préférable de les emprunter à une connaissance, de les louer, ou de faire presser ses pommes par une entreprise qui travaille à façon.

Le rendement en jus est de l’ordre de 50 % avec une presse à vis, et nettement plus élevé dans le second cas, où le coût est de l’ordre de 0,4 €/l. L’agenda « Au fil des Saisons » publie une liste des entreprises qui réalisent le pressage de fruits livrés par des particuliers (voir aussi : www.fwhnet.be).

Pour des petites quantités de fruits, il est aussi envisageable d’utiliser une centrifugeuse de ménage : on produira 5 à 7 l de jus de pommes par heure.

. et caractériser le jus

Un densimètre (15 à 20 € avec le verre gradué) permet de connaître approximativement la teneur du jus en sucres, et donc le degré d’alcool en fin de fermentation. Ainsi, s’il indique à 15ºC une densité de 1,054, le taux de sucre voisine 119 g/l, ce qui correspond à 7 % d’alcool ; les valeurs varient en fonction de la température. Un réfractomètre (que l’on peut emprunter) donnera une indication plus précise.

Le plus souvent, les jus de pommes contiennent de 100 à 130 g de sucre par litre. Pour arriver à 10 % d’alcool, ce qui garantit une bonne conservation du vin, il faudra donc ajouter du sucre pendant la fermentation (lire ci-après).

Dans le cas de jus de pommes, la mesure de l’acidité n’est pas indispensable car elle se situe entre les limites favorables (entre 6 et 10 g/l ; optimum : 8 g/l). Pour les jus d’autres fruits, cette mesure est nécessaire afin de corriger avec précision leur acidité.

Quels récipients choisir ?

Les fûts en bois ne sont plus que très rarement utilisés en raison de leur poids, de la difficulté de les entretenir et parfois de défauts d’étanchéité. On optera soit pour des dames-jeannes en verre ou pour des récipients en matériau synthétique alimentaire. Il en existe de toutes formes et de toutes capacités.

Nous conseillons de ne pas dépasser 25 à 30 l pour une facilité de manipulations et de transport. Leur entretien est simple, et dans le cas de récipients en verre transparent, la surveillance du déroulement de la fermentation est aisée.

À l’inverse, le verre est très fragile lors des manipulations et sensible aux chocs thermiques : par exemple les rinçages à l’eau très froide !

Amorcer et gérer la fermentation

La fermentation du jus implique la présence et l’activité de levures. Soit on laissera se développer les levures naturellement présentes sur les fruits (= fermentation sauvage), soit on ajoutera une levure sélectionnée (= fermentation dirigée). Dans le premier cas, la nature et la quantité de levures sont très variables selon la provenance des fruits, tandis que dans le second cas, le caviste vous conseillera utilement dans le choix d’une souche bien adaptée à votre cas.

Un jus qui aurait été pasteurisé doit obligatoirement être ensemencé par une levure sélectionnée. L’emploi de levure de boulanger est à proscrire !

Parfois, il est conseillé à ce stade d’ajouter au jus un « sel nutritif » composé d’éléments minéraux destinés à alimenter les levures : par exemple, du phosphate d’ammonium et/ou du phosphate de potassium, et parfois de la vitamine B1. Si cela se justifie pour des jus très acides qui ont été additionnés d’eau, nous n’avons jamais dû en ajouter à du jus de pommes pour un bon déroulement de la fermentation.

On placera initialement les récipients dans un local où la température est de 15ºC à 18ºC. Après quelques jours, la fermentation démarre : la levure se multiplie par bourgeonnement ; on observe un dégagement de bulles de CO2 qui entraîne vers la surface les impuretés présentes. Le phénomène s’intensifie, puis il ralentit après quelques jours ; on installe un barboteur.

On place alors les récipients dans un local où la température est plus basse : idéalement 10ºC. Après 4 à 6 semaines, la fermentation est très ralentie et il se forme une lie au fond des récipients ; le moût tend à se clarifier quelque peu.

Faire deux soutirages successifs

À ce moment, il faut siphonner le moût dans un autre récipient de même capacité ; la lie est rejetée. On la remplace par de l’eau additionnée d’une quantité de sucre qu’il convient de calculer. Si par exemple la mesure initiale du taux de sucre aboutit à 7 % d’alcool et que l’on désire arriver à 10 %, gage d’une bonne conservation, il faudra ajouter au total 3 x 17 = 51 g de sucre par litre (17 g de sucre générant 1 % d’alcool). Nous en ajouterons la moitié au premier soutirage et l’autre moitié au second.

Après cela, la fermentation reprend grâce à cet apport de nourriture pour les levures, puis elle s’atténue à nouveau ; le moût devient beaucoup plus limpide. On fera alors le second soutirage avec ajout de l’autre moitié du sucre prévu. La fermentation reprend.

Lorsqu’elle s’atténue, ce que l’on remarque par la très faible apparition de bulles de CO2 en surface, si le vin est parfaitement limpide, il est prêt pour produire un vin mousseux (voir point suivant). S’il n’est pas limpide, il faudra ajouter un clarifiant : par exemple du blanc d’œuf.

Mettre en bouteilles un vin effervescent…

La prise de mousse se fera en bouteilles champenoises de 75 cl avec bouchon en plastique et muselet lorsque la fermentation est devenue très peu active, dont l’indice est la présence en surface d’un liseré d’une ou deux rangées de bulles.

On ajoute dans chaque bouteille un morceau de sucre (= 5 g) qui réenclenche la fermentation. Comme à ce moment le CO2 ne peut plus s’échapper, il se dissout dans le vin, et la pression augmente ; il se forme une lie. Les bouteilles sont stockées couchées.

Après quelques semaines, le vin mousseux peut être consommé. Un ou deux jours au préalable, les bouteilles sont redressées afin de faire glisser la lie dans le fond, et placées au frigo. Toute la bouteille doit être servie dans les verres en une seule fois pour éviter de troubler le vin.

On pourrait aussi procéder à un dégorgement comme pour les champagnes et les crémants. Cette technique suppose une habileté certaine et de pouvoir congeler les goulots après avoir amené la lie contre le bouton par une série de remuages sur un pupitre.

… ou un vin tranquille

Lorsque plus aucun bulle de CO2 n’est visible à la surface du vin depuis plusieurs jours (ou semaines), on peut penser que la fermentation est terminée. Le vin peut être mis en bouteilles, mais des variations de la pression atmosphérique peuvent cependant vous induire en erreur, et des redémarrages de fermentation ne sont pas exclus.

Par précaution, on utilisera également des bouteilles champenoises muselées puisque des bouteilles ordinaires pourraient se transformer en grenades explosives.

Du pressage des pommes à la mise en bouteilles, il s’écoulera environ six mois. Il est conseillé de conserver le vin quelques mois avant de le consommer (toujours avec modération…). La conservation d’un vin de pommes titrant 10 % d’alcool peut dépasser dix ans.

Vinifier d’autres fruits ?

Après avoir fait son écolage avec des pommes, il est possible de passer à la vinification d’autres fruits ou de mélanges de fruits.

Pour les poires, le processus est identique à ce qui a été dit.

Pour la rhubarbe, les pétioles sont lavés puis découpés en tronçons et placés au congélateur. Après dégel, ils sont pressés. Le rendement en jus est très élevé, mais comme ce jus est riche en acide oxalique, il convient d’éliminer celui-ci par addition de chaux et précipitation d’oxalate de chaux.

Le raisin doit être égrappé et foulé, pressé immédiatement pour produire du vin blanc, cuvé pour produire du vin rosé à partir de raisin noir, ou macéré pour produire du vin rouge.

Le jus de groseilles rouges devra recevoir de l’eau en fonction de la mesure de son acidité par un kit « acidomètre ».

Les prunes, les cerises et les pêches doivent être foulées puis pressées sans écraser les noyaux, ce qui libérerait de l’acide cyanhydrique, avec addition éventuelle d’eau si l’acidité est trop forte.

La fabrication artisanale d’un vin de fraises limpide est compliquée ; au départ, il faut ajouter au jus la même quantité d’eau, un quart de sucre et de l’acide citrique (3 g/l) ; le premier soutirage doit intervenir très tôt.

Ir. André Sansdrap

Wépion

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