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L’herbe loin devant le soja importé!

Ce n’est pas le soja d’outre-Atlantique, mais l’herbe et les autres fibres cultivées localement qui constituent la principale source de protéines (45 %) pour le bétail européen. En comptabilisant pour la première fois les fourrages grossiers, la Commission européenne a été en mesure de calculer plus précisément le bilan protéique du secteur de l’élevage.

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L ’herbe et le maïs sont entièrement autoproduits par les agriculteurs. L’Europe est également presque totalement autosuffisante en céréales, colza (tourteaux) et autres cultures riches en protéines telles que les féveroles et les lupins. L’industrie alimentaire et des biocarburants apportent une contribution importante à l’équilibre protéique par ses flux résiduels. Sur les 85 millions de tonnes de protéines brutes contenues dans les aliments pour animaux, 79 % proviennent d’Europe. Pour le tourteau de soja – qui correspond à 13 de ces 85 millions de tonnes –, le secteur dépend largement des importations d’Amérique du Nord ou du Sud.

Moins dépendant

au soja qu’il n’y paraît

Pour nourrir son bétail, l’Europe dépend de l’importation de soja, mais moins fortement que ce qu’il n’y paraît. En effet, on oublie que d’autres cultures ainsi que les flux résiduels de l’industrie alimentaire contribuent également à répondre aux besoins en protéines du bétail.

Pour la campagne 2017-2018, le « bilan protéique de l’alimentation animale dans l’UE » de la Commission européenne se base sur 85 millions de tonnes de protéines brutes consommées par les bovins. Bien que les ensilages d’herbe et de maïs ne soient pas particulièrement riches en protéines, ils fournissent tout de même 45 % des besoins totaux en protéines du secteur de l’élevage en tant qu’aliments de base pour les bovins.

Avec plus d’un milliard de tonnes de volume, ce qui correspond à 26 millions de tonnes de protéines brutes, il est impossible d’imaginer les prairies hors du bilan protéique. Toutefois, ce n’est que la première fois que la Commission européenne se penche sur le fourrage grossier. Le Parlement européen et le Copa-Cogeca, l’organisation faîtière de l’agriculture, avaient tous deux appelé à un équilibre protéique plus complet. Jusqu’à récemment, les rapports de la Commission se limitaient aux cultures naturellement riches en protéines. Il s’agit de cultures contenant plus de 15 % de protéines brutes, alors que l’herbe n’est seulement qu’à 2,5 %. À titre de comparaison : le blé contient en moyenne 11 % de protéines, le colza près de 18 %, les tourteaux de colza 33 % et la farine de soja 45 %.

La féverole et le lupin devant le soja

La culture des féveroles et des lupins est encouragée pour une raison qui tient à l’offre de protéines européennes. Celles-ci contiennent respectivement 22,5 % et 35 % de protéines. Avec ces 3,9 millions de tonnes de légumineuses cultivées localement, plus de 1 % des besoins en protéines de l’ensemble du bétail ne peuvent être satisfaits pour le moment. Malgré leur faible teneur en protéines, les céréales ont un bilan protéique beaucoup plus élevé – elles fournissent 20 % de la demande – car le blé, l’orge et le maïs sont utilisés en grande quantité. Ce sont des matières premières de base dans l’alimentation concentrée des vaches, des poulets et des porcs. L’avantage de tous ces grains ? Ils sont principalement d’origine européenne (90 %).

Alors que les tourteaux de colza (83 %) proviennent généralement de la transformation du colza cultivé localement, ce n’est le cas que pour 46 % des tour teaux de tournesol. Bien que du soja soit cultivé en Europe, il ne représente que 2 % des tourteaux de soja (28,5 millions de tonnes) entrant dans l’industrie de l’alimentation animale. Avec ce soja, 15 % de la demande en protéines de l’animal est satisfaite. Cela en fait la troisième source de protéines la plus importante pour l’alimentation animale, après le fourrage grossier et les céréales.

L’élevage peut valoriser en aliments toutes sortes de flux résiduels provenant des industries des biocarburants, de l’alimentation et de l’amidon. Sur une base annuelle, près de 36 millions de tonnes de produits amylacés, de DDGS provenant des usines de bioéthanol, de pulpe de betterave, de drèches de brasserie… sont consommées par le secteur de l’élevage. En termes de volume, c’est plus que tout le soja importé. Pour ce qui est de son importance dans l’approvisionnement en protéines, il est derrière le soja (6 %).

Quid des farines animales ?

À la suite de la crise de l’ESB, une interdiction de réutiliser les farines animales dans l’alimentation animale a été introduite. Puisqu’il s’agit d’une source de protéines de haute qualité, l’Europe fait l’objet de pressions depuis des années pour qu’elle l’autorise à nouveau sous certaines conditions. Compte tenu de l’économie circulaire, certains syndicats agricoles y sont également favorables. Aujourd’hui, celles-ci sont utilisées – « gaspillées », selon certains – comme combustible dans les fours à ciment. Les matières premières protéiques non végétales déjà autorisées pour l’alimentation animale sont les aliments recyclés, les farines de poisson, la poudre de lactosérum, la poudre de lait et les farines animales, dans la mesure où elles sont utilisées dans des aliments pour animaux familiers. Ensemble, ces matières premières locales à haute teneur en protéines répondent à 3 % de la demande.

De nouvelles sources

D’aucuns prédisent que l’équilibre protéique peut encore être amélioré. Les sources de protéines ne peuvent pas seulement être échangées, mais de nouveaux produits se développent. Pensons aux algues et aux insectes. Evidemment, tout cela dépendra de l’évolution du marché qui est de plus en plus influencé par le climat et la géopolitique. Pour preuve, la guerre commerciale imminente entre la Chine et les États-Unis, et l’accord entre l’UE et les États-Unis sur le soja... Notons que les sources de protéines d’origine européenne ne sont pas nécessairement plus durables ou plus respectueuses de l’environnement et du climat, comme l’a démontre le test de recyclage de l’Université de Wageningen & Research.

D’après le Vilt

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