Quand l’élevage rime

avec diversité et originalité

Pour Stéphanie Vandesteene, l’élevage et les animaux, c’est l’histoire d’une passion révélée dès son plus jeune âge. À 5 ans, elle reçoit de la part de ses parents sa première chèvre naine. Le début d’une activité qui la passionne encore aujourd’hui, à 37 ans, comme au premier jour.

Le charme des chèvres naines

La première chèvre naine n’est pas restée très longtemps seule. Durant toute sa jeunesse, l’éleveuse en a toujours eu 5-6. Elle est aujourd’hui passée à l’échelon supérieur avec une vingtaine de sujets. Les jeunes sont vendus à 4 mois à des particuliers. Cela ne pose pas de problèmes car les chèvres sont très petites et ont des couleurs particulières. « Généralement, ils sont réservés dès la naissance », explique l’éleveuse. Son statut de vétérinaire n’y est peut-être pas étranger. « Cela rassure les gens », dit-elle. « S’ils ont un problème, ils téléphonent et savent que je les aiderai volontiers ».

La passion des moutons

C’est chez ses grands-parents maternels, Gaston Nicolay et son épouse à Chatelet, que Stéphanie fait ses premières armes en élevage ovin. Les éleveurs ovins d’un certain âge se souviendront certainement de ce juge et spécialiste de la race Hampshire. Il était un des premiers à introduire cette race anglaise en Belgique et faisait partie de la commission Hampshire. Il a aussi pris part, il y a 25 ans environ, à la sauvegarde de la race Entre Sambre et Meuse, en se rendant chez des éleveurs qui avaient des moutons ressemblant à la race pour en rechercher les caractéristiques. Les plus beaux sujets ont été multipliés à Faux-les-Tombes.

Boucher et éleveur à Mont sur Marchienne, les parents de Stéphanie l’encouragent également dans ses activités. Sa première brebis, un mouton Jacob, elle l’a reçue pour son anniversaire. « On ne pouvait pas me faire plus plaisir », se souvient-elle avec bonheur. « On a eu la chance de trouver un bélier dans une foire à Ath car ces animaux étaient rares il y a 25 ans ». Durant plusieurs années, la jeune éleveuse s’est donc occupée de ses 5 brebis Jacob et du troupeau Hampshire de son grand-père, soit une trentaine d’animaux.

De tous les horizons

La rencontre avec un marchand d’animaux de parcs animaliers et exotiques fut déterminante dans le choix des races élevées par Stéphanie. C’est ce marchand qui proposa 2 béliers du Cameroun – des moutons à poils et ressemblant à des chèvres — à son grand-père. Il les achète pour Stéphanie sans beaucoup hésiter. L’élevage s’agrandit grâce à l’acquisition de 2 brebis. Le goût de Stéphanie pour des races inhabituelles trouve là son origine. Aujourd’hui, elle détient toujours 5 brebis et un bélier de cette race de mouton à poil, très rare dans nos contrées.

Viennent ensuite d’autres races tout aussi rares et sortant de l’ordinaire : la Thônes et Marthod, une race française originaire de Savoie et la Racka (encore appelé mouton de Valachie), une race hongroise, unique en son genre car les 2 sexes possèdent des cornes en forme de spirale. Si l’achat des moutons du Cameroun s’est fait de manière impulsive, le choix des autres races a été très réfléchi. « J’ai consulté de nombreux livres spécialisés », explique Stéphanie.

Actuellement, l’éleveuse détient toujours ces races d’ornement. 5 brebis et un bélier de chaque race, pas davantage pour maîtriser les frais et trouver des débouchés hors boucherie. Ces moutons originaux et rustiques sont vendus comme tondeuse écologique à des amateurs de races sortant de l’ordinaire. L’éleveuse ne compte pas en rester là : elle envisage d’acheter prochainement des moutons Kerry Hill, une race typée originaire du Pays de Galles.

Moutons de rapport

Le cheptel ovin s’est encore agrandi il y a deçà 6 ans avec l’achat d’une dizaine de brebis Rouge de l’Ouest et Texel français. 20 brebis Entre-Sambre et Meuse sont également venues renforcer les effectifs il y a 2 ans. Ces 3 races sont élevées pour la production d’agneaux de boucherie. La Rouge de l’Ouest associe une bonne prolificité, 2 agneaux en moyenne, à la facilité d’agnelage car les agneaux sont très fins. Le Texel français est un peu moins prolifique mais présente un bon gabarit. Comme l’éleveuse n’a pas de bélier Texel, elle produit des agneaux croisés avec du Rouge de l’Ouest. Enfin, l’Entre Sambre et Meuse a été choisie pour sa prolificité et ses qualités maternelles. Son rendement carcasse est moindre mais elle produit une viande avec une fibre et un goût plus fins.

Du côté des vaches

C’est en 1998 que Stéphanie acquiert ses premières vaches. Des Galloway, une race d’origine écossaise, noire, sans corne, docile et rustique. Ces bêtes n’ont pas besoin d’étable. Le petit troupeau pâture à Châtelet dans une zone Natura 2000. Elles disposent de bosquets pour se mettre à l’abri et sont nourries en hiver. L’éleveuse peut compter sur l’aide de ses parents pour la surveillance. Les jeunes sont vendus à des amateurs.

Autre race élevée : la Highland. « La première, je l’ai offerte à mon mari – également vétérinaire – comme cadeau de Noël, il y a 14 ans », explique-t-elle. Et de préciser, sourire aux lèvres, « ce n’était peut-être pas ce qu’il souhaitait le plus… ». Cette vache typée avec ses cornes et ses poils a un côté sauvage mais est très maternelle. Aujourd’hui, les exploitants détiennent 3 vaches, 3 génisses et un taureau. Tout comme les Galloway, les vaches Highland restent constamment à l’extérieur car avec leurs grandes cornes, il n’est pas indiqué de les confiner dans une étable. « Cela pourrait être dangereux pour leurs partenaires », explique l’éleveuse.

Enfin, à l’initiative de son mari, des vaches Parthenaise ont été acquises il y a une dizaine d’années. Cette race viandeuse française est rustique (vêlage naturel) et fournit une viande persillée particulièrement savoureuse. Les jeunes qui ne sont pas commercialisés pour l’élevage sont vendus comme animaux de boucherie. L’éleveuse et son mari envisagent par ailleurs d’ouvrir un atelier de découpe à la ferme en 2017 pour valoriser la viande des moutons et des vaches en circuit court.

Des ânes du Poitou

Les ânes du Poitou, Stéphanie en rêvait depuis l’enfance. Car les ânes, elle connaît également. Chez ses parents, il y a toujours eu des ânes gris de Saint-André… jusqu’à 20 ânesses. Comme on ne peut plus importer de France cette race en voie d’extinction, Stéphanie a attendu pour en trouver. Il y a 10 ans, elle a pu acheter une jument gestante. L’ânesse a pouliné tous les ans… grâce à l’échange d’une saillie d’un étalon contre des chèvres. Aujourd’hui, 3 ânesses et un étalon acheté près de Chimay font le bonheur de toute la famille car ces animaux sont très gentils et placides. « De vraies peluches sur pied », résume l’éleveuse.

Organisation de l’élevage

Les exploitants ont acheté leur ferme à Mellery il y a 6 ans. Ils ne possèdent que quelques hectares autour de l’exploitation. Pas assez pour tous les animaux. Ils exploitent donc d’autres prairies dans la région de Châtelet et Charleroi. Les moutons et les vaches Highland y sont surveillés par les parents de l’éleveuse et des voisins des pâtures occupées. Durant la saison de pâturage, les vaches, les chèvres naines et les ânes demeurent dans les prairies proches de l’exploitation car ces animaux demandent beaucoup de surveillance. En hiver, hormis les vaches, tous les animaux sont logés dans les étables à l’exploitation. C’est là que naissent la majorité des agneaux en hiver. À la fin du printemps, lorsqu’ils sortent en pâture, il n’y a donc pas de problème de prédation.

L’élevage est conduit de manière biologique. « C’est plus contraignant au niveau de l’alimentation et il n’y a pas de traitement préventif comme des vermifugations par exemple. On ne peut intervenir que curativement dès l’apparition des premiers symptômes explique », explique Stéphanie. Pour limiter les charges parasitaires, le pâturage alterné est de mise tout comme le copâturage des ânes et des vaches. L’élevage est conduit de manière extensive : « il y a donc peu de maladies car les races sont rustiques », précise l’éleveuse. Le choix du bio est davantage philosophique que commercial car à l’achat, les marchands ne paient pas beaucoup plus les animaux bio. Côté travail, l’éleveuse y consacre 1 à 2 heures par jour en été et jusqu’à 3heures par jour en hiver. Tout l’aménagement de l’exploitation a été pensé pour que cela prenne le moins de temps possible.

Bientôt des poules

Et les poules dans tout cela ? Il n’y en n’a pas… encore. L’éleveuse prévoit d’élever des Brahma et des Pékin avec l’aîné de ses 3 fils dès le printemps prochain. Ce sera pour elle un nouveau retour à une de ses passions puisqu’elle a démarré l’élevage de volailles à 11 ans. Elle a eu jusqu’à 20 races et variétés qu’elle présentait en exposition. Ses études de vétérinaire l’ont contrainte à abandonner, même si elle a bien essayé de poursuivre : « Je faisais l’aller-retour Liège Châtelet en une soirée pour préparer les sujets à exposer aux concours. Évidemment, ça ne pouvait pas durer » dit-elle. C’est ainsi que le cheptel avicole a régressé pour finalement disparaître. Mais le matériel a été conservé et sera mis à profit dans cette nouvelle activité qui se prépare à Mellery. Et avec la passion qui habite la famille, il y a gros à parier que ce ne sera pas la dernière.

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