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Les faits marquants de la saison, les variétés et la protection fongicide

Le Carah – Centre pour l’agronomie et l’agro-industrie de la province de Hainaut – organisait, le jeudi 21 juin dernier, la visite de champs d’essais mis en place à Ath sur le thème du renouvellement variétal et de la protection des orges et froments contre les maladies. L’occasion pour Olivier Mahieu, responsable des expérimentations, d’évoquer aussi les particularités de cette saison culturale

Temps de lecture : 8 min

Parmi les thèmes explorés chaque année par le Carah en province de Hainaut, l’évaluation des fruits de la sélection génétique figure systématiquement en bonne place. Il est vrai que l’amélioration variétale en orge et en froment d’hiver met au jour chaque année des innovations. En outre, il est également très utile de suivre au fil des ans l’évolution du comportement des variétés déjà connues.

En escourgeon, 26 variétés sous la loupe…

Sur les 26 variétés d’escourgeon testées cette année à Ath, figurent pas moins de 9 nouveautés et 4 lignées résistantes à la jaunisse nanisante de l’orge (Domino, Rafaela, Novira et une variété encore sous code). Les lignées de cet essai ont été semées le 28 septembre 2017 à la densité de 265 grains/m², contre 200 grains/m² pour les hybrides.

La levée a été très bonne, commente Olivier Mahieu. La culture a passé un automne plutôt doux et pluvieux. La fin de l’hiver a été marquée par des températures particulièrement basses. Les céréales, bien que marquées, n’en ont pas gardé de séquelles notables.

Ensuite les températures printanières particulièrement douces ont donné un gros coup d’accélérateur à la montaison si bien que le stade dernière feuille était déjà atteint fin avril. Cette avance est toujours bien visible actuellement.

Sur le plan phytotechnique, le désherbage a été effectué avant l’hiver avec Herold 0,6 l/ha le 12 octobre. Un complément a suivi au printemps avec l’application de Starane Forte 0,3 l /ha + Allié 20 g/ha le 7 avril. L’azote a été appliqué à la dose totale de 168 unités/ha en 3 fractions. Deux régulateurs ont été appliqués : Medax Top suivi d’éthephon au stade dernière feuille.

Sur le plan sanitaire, l’expérimentateur attire l’attention sur le retour de la rhynchosporiose, et surtout de l’helminthosporiose et de la rouille naine qui ont été au rendez-vous alors que la ramulariose est restée plus discrète que de coutume.

La protection contre les maladies a consisté en un ou deux traitements actifs contre l’ensemble des maladies citées ci-avant, à base de Fandango 0,8 l/ha le 11 avril au stade 1-2 nœuds, suivi de 1 l/ha Aviator + 1 l/ha de Bravo le 27 avril au stade dernière feuille (39).

« La combinaison SDHI + triazole + chlorothalonyl préconisée ce printemps a bien protégé le feuillage contre les maladies et les grillures. Néanmoins l’helminthosporiose a pu prendre le dessus début juin », observe encore Olivier Mahieu.

L’heure n’est pas à la présentation des caractéristiques des nombreux hybrides et lignées testés. Les résultats de cette expérimentation variétale feront l’objet d’une publication dans nos colonnes, à l’issue de la récolte.

… et des essais de protection fongicide

Le Carah a également mis en place cette saison des essais consacrés à la lutte contre les maladies cryptogamiques, respectivement à Ath et Molembaix. Sur le premier site, la variété choisie est KWS Tonic, sensible à la rouille naine, à la ramulariose et aux grillures, et secondairement à l’helminthosporiose et à la rhynchosporiose. À Molembaix, l’expérimentation porte sur la variété Rafaela qui a jusqu’ici principalement montré de la rouille naine et des taches de léopard, et secondairement de la ramulariose en fin de saison.

L’itinéraire phytotechnique mis en place est identique à celui des essais variétaux.

De nombreux programmes fongicides sont mis en comparaison, avec des applications au stade 1-2 nœuds, le 11 avril, et au stade dernière feuille, le 27 avril. Par ailleurs, trois nouveautés déjà testées l’an dernier l’ont été à nouveau : Elatus Era (75 g/l benzovindiflupyr + 150 g/l prothioconazole) ; Perseo (azoxistrobine + chlorothalonyl) et Zaindu (200 g/l époxiconazole + 100 g/l azoxistrobine).

Concernant les maladies observées dans cet essai, Olivier Mahieu cite la présence de l’helminthosporiose et de la rouille, et un peu de ramulariose, de même que des taches de léopard. Au moment de la visite des parcelles, le 21 juin, l’escourgeon était très avancé, ne laissant pratiquement plus de symptômes bien nets sur le feuillage, si ce n’est les stigmates des maladies.

« Sur la base des observations du 27 mai et du 6 juin, en traitement unique à la dernière feuille, ressortent les traitements à base de Ceriax, Ceriax + Bravo, et Aviator Xpro + Bravo, bien que l’Aviator ait laché, fin mai, sur l’helminthosporiose », signale le responsable de l’expérimentation. Le 6 juin, le Velogy Era manifestait une efficacité du même niveau qu’Aviator Xpro.

Ces observations trouvent confirmation dans les programmes à plusieurs traitements, puisque les combinaisons les plus efficientes sont : Palazzo suivi de Ceriax + Bravo, Palazzo suivi de Priaxor + Caramba + Bravo.

En programme, les mélanges 3 voies – SDHI + triazole + strobilurine – font à la différence sur helminthosporiose.

Le froment aussi

Après les orges d’hiver, place au froment d’hiver. Olivier Mahieu fait un rapide point de la situation localement : « les semis se sont déroulés aisément jusqu’en novembre. On a ensuite connu un hiver pluvieux et une fin de saison hivernale très froide, mais sans conséquence fâcheuse pour les cultures. Le printemps très doux a alors conférant à la culture une avance qui est encore visible ».

Sur le plan sanitaire, face à la rouille jaune apparue en avril, certaines variétés réputées sensibles ont montré beaucoup de symptômes alors que d’autres, contre toute attente, se montrent tolérantes, phénomène vraisemblablement lié aux races présentes en 2018. D’où l’importance de contrôler son champ pour lutter à bon escient contre cette maladie.

Le temps pluvieux de la 2e moitié du mois de mai a favorisé la septoriose bien présente actuellement. Le temps humide survenu durant la floraison a également créé des conditions favorables à la fusariose que ce soit sur feuilles ou sur épis, mais la situation n’est en rien comparable avec celle de 2016.

Comme l’an dernier, la rouille brune figure parmi les maladies de l’année 2018. Elle aussi a profité des températures élevées du mois de mai mais avant d’exploser littéralement en juin.

Quelques pucerons de l’épi et des lémas ont été observés au moment de l’épiaison des blés.

Les cécidomyies oranges étaient bien au rendez-vous dans le sud est du pays. En Hainaut occidental, elles semblaient beaucoup plus discrètes durant l’épiaison, sorties vraisemblablement plus tôt durant la montaison car favorisées par des pluies initiatrices qui auraient entre autres concerné cette région. Dans les parcelles expérimentales à Ath, l’observation des épis confirme cette hypothèse, vu l’absence de larves et de dégâts significatifs.

Un grand nombre de variétés sous la loupe

L’évaluation des progrès de la sélection génétique fait également partie des priorités de l’expérimentation menée par le Carah sur le froment. Aux côtés d’un essai plus spécifiquement réservé à une douzaine de variés précoces, prend place la mise en comparaison d’une cinquantaine de variétés plus « classiques » dans différents programmes de protection contre les pathogènes.

Protection fongicide

En la matière, des essais sont menés à Ath et Melles, respectivement sur les variétés Henrik et KWS Ozon. Une partie de cette expérimentation s’intègre dans un réseau plus large en partenariat avec d’autres centres (Cra-w, Ulg Gbx Agro bio tech et Cpl-Végémar) sur plusieurs sites en Belgique.

À Ath, au 20 juin, Olivier Mahieu observait beaucoup de maladies, à commencer par une forte pression de septoriose, mais aussi de rouille brune avec un peu de fusariose de l’épi.

De multiples combinaisons sont mises en comparaison, avec des applications éventuelles au stade 1er nœud (19 avril), 2e nœud (27 avril), dernière feuille (15 mai), épiaison (25 mai) et floraison (30 mai).

« À Ath, où la septoriose domine à côté de la rouille brune, les traitements uniques de dernière feuille maîtrisent difficilement la septoriose en fond de végétation. C’est encore plus nettement le cas des traitements uniques d’épiaison qui laissent aussi passer de la rouille brune sur F2 et F3 », commente poursuit l’orateur.

« De manière générale, en traitements uniques de dernière feuille ou d’épiaison, que ce soit sur rouille ou septoriose, se distinguent : le Ceriax et le Velogy Era. Les doubles traitements tenaient bien jusqu’au 12 juin, mais les dernières cotations effectuées le 20 juin donnent des résultats plus mitigés. Certains lâchent. »

« Dans l’essai en réseau, les doubles traitements (2e nœud, puis épiaison) les plus performants sont : Opus Team + Bravo, suivi de Aviator Xpro ; Opus Team + Bravo, suivi de Velogy Era ; Kestrel + Bravo, suivi de Adexar. »

À noter qu’en absence de chlorothalonil en T1, la surface des F2 et F3 touchée par la septoriose a généralement tendance à augmenter nettement.

« Les doubles traitements (2e nœud, puis épiaison) sans matière active à mode d’action SDHI sont à la traîne. Concernant les applications de dernière feuille + floraison, on identifie davantage de septoriose en fond de végétation sur F3, mais ils finissent bien sur les deux dernières feuilles et sur l’épi. »

Enfin, les triples traitements à doses réduites (1er nœud, 2e nœud, épiaison) et (2e nœud, dernière feuille, floraison) sont ceux qui, cette année, maîtrisent le mieux l’ensemble des maladies pour l’instant. Ces traitements ont l’avantage de bien protéger l’ensemble du feuillage tout en sécurisant l’épi mais sont plus coûteux en passages de pulvérisateur.

Propos recueillis par

M. de N.

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