Champs jaunes, carton jaune?

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Voir l'offre d'abonnementJe suis vraiment reconnaissante envers Marc Assin pour la teneur de sa Voix de la Terre publiée dans Le Sillon Belge du 9 mars. Il rendait justice – si l’on peut dire – à nos animaux domestiques pour ce qu’ils nous dispensent.
Un conte de fée commence par « Il était une fois… » et se termine le plus souvent par « Ils vécurent heureux très longtemps et eurent beaucoup d’enfants… ». Hélas, à la fin, si les héros n’en ont plus pour longtemps, et perdent leurs enfants, il devient un « conte défait ». L’aventure de notre élevage bovin répondrait plutôt aux critères de cette deuxième histoire, avec une perte d’effectif en 25 ans de 30 % en Belgique, 40 % en Ardenne, excusez du peu… Comment en sommes-nous arrivés là ? Où sont passés vaches et veaux ?
Ils s’appellent Poulou, Bobby, Sam, Sultan, Lisette…, ou encore Mistigri, Poussy, Chanou, Chaussette…, et nous n’en parlons jamais dans les colonnes du Sillon Belge ! Ils occupent pourtant une place de choix dans nos quotidiens à la ferme. Je parle de nos animaux familiers, nos meilleurs amis à quatre pattes, les chiens et les chats ! Ils méritaient bien quelques lignes, pour les aides diverses qu’ils nous apportent, l’amitié fidèle qu’ils nous témoignent sans rien demander en retour, ou si peu…
S’il existe une qualité reconnue depuis très longtemps chez les agriculteurs, c’est bien « le bon sens paysan ». En effet, l’agriculteur travaille et sème ses terres quand la terre est « amoureuse » et pas dans de mauvaises conditions.
Voilà des décennies que les modifications génétiques font débat, non pas en médecine où elles sont bien nécessaires, mais essentiellement en agriculture.
J’ai souvent envie de me pincer pour y croire, tant cette aventure est surréaliste, inimaginable, inconcevable au 21e siècle, tragiquement stupide et destructrice… Je vous parle évidemment de la guerre en Ukraine, qui souffle sa première bougie, à défaut de souffler un vent de paix retrouvée. Le chemin vers celle-ci se perd dans un avenir nébuleux, couleur sang. Avant ce conflit meurtrier, le nom « Ukraine » évoquait surtout un pays agricole par excellence, avec ses terres exceptionnelles, déployées sur des étendues défiant nos imaginations de petits fermiers wallons, coincés sur nos parcelles exiguës. Les agriculteurs ukrainiens sont passés du paradis à l’enfer. En ce beau printemps qui s’annonce, ils préféreraient mille fois faire du labour, pas la guerre…
En observant le monde agricole autour de moi, les uns et les autres fermiers, j’ai pu constater que nous sommes à la fois tous semblables et tous différents, selon notre nature et notre vécu, selon notre âge et les particularités de notre région. Sur le mode humoristique, je me suis amusé à définir et classer différents types d’agriculteurs. Au cours de notre carrière, nous passons de l’un à l’autre, et souvent cumulons plusieurs modèles…
Ce doit être angoissant, consternant, affolant pour une entreprise de voir ses fidèles clients cesser leurs activités, l’un après l’autre, de se voir grignoter inexorablement son fonds de commerce ! Dès lors, je plains sincèrement les nombreuses officines administratives para-agricoles en perte d’affiliés ; elles sentent leur base s’effriter sous leurs pieds ; elles constatent avec (un possible) effroi la disparition des fermes, l’une après l’autre, tic tac, tic tac, sans que l’hémorragie ne donne des signes tangibles de se tarir… Que vont devenir les employés de la Fwa, la Fugea, Natagriwal, Protect’eau, l’Arsia, l’Awe et toutes les autres, quand le dernier fermier aura glissé sa clef sous le paillasson ?
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