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‘Golden delicious’, la «Miss Univers» des pommes

Trouvant son origine aux États-Unis, où elle fut découverte vers la fin du 19è  siècle, ‘Golden delicious’ s’est rapidement imposée partout dans le monde. Si son image a quelque peu été écornée dans les années ‘60, elle demeure la variété dominante en Europe de part ses qualités. Qualités qui en feront également une belle et bonne pomme à cultiver dans votre jardin.

Temps de lecture : 8 min

L’histoire de la « Délicieuse dorée » a ceci de fascinant que découverte fortuitement dans un sous-bois, dit-on, à la fin du 19è  siècle, elle devint au milieu du 20è  siècle, de loin, la première variété de pommes cultivée dans le Monde, et ce dans une grande diversité de climats et de sols. Certes, depuis lors, sa position dominante s’est érodée quelque peu au profit d’autres variétés qui ont trouvé çà et là des conditions de culture qui leur convenaient particulièrement bien, mais ‘Golden delicious’ reste toujours dominante sur le marché mondial des pommes. À ce jour, rien ne laisse penser que les choses devraient changer d’ici peu.

Le marché des pommes : un cas de mondialisation

Dans le passé, chaque région productrice de pommes avait un assortiment variétal qui différait de celui des régions voisines. Cet assortiment était le reflet d’une diversité des utilisations et des préférences des consommateurs pour des qualités intrinsèques différentes. Ainsi, en Europe, le Nord préférait des pommes au goût équilibré (sucré-acidulé-aromatique) tandis que le Sud avait une nette préférence pour une dominante « sucre ».

Vers le milieu du 20è  siècle, les choses ont changé : les variétés « de terroir » ont régressé au profit d’une variété « mondiale » qui s’est imposée partout en raison de la somme de ses qualités ; ce fut ‘Golden delicious’.

Alors que dans les années 1940-50, les étudiants en horticulture de l’école de Vilvorde (Prof. E.Van Cauwenberghe) devaient connaître et reconnaître 56 variétés de pommes (et ‘Golden delicious’ n’en faisait pas partie !), dans les années 1975-2000 où nous étions professeur à Grand-Manil, ce nombre était descendu à 15, dont une partie de variétés pour amateurs. Ceci reflète bien l’évolution que l’assortiment avait connue. Même si d’autres variétés comme ‘Jonathan’ avaient aussi joué un rôle dans ce processus, celui de ‘Golden delicious’ fut essentiel.

‘Golden delicious’ : caractéristiques générales…

Son fruit est calibre gros ou moyen. En coupe transversale, sa forme est symétrique ; en coupe longitudinale, elle est ovale large ou conique. Le pédoncule est long, mince et ligneux. Son épiderme est lisse et sec, de couleur jaune vif à jaune verdâtre ; lavis orange clair au soleil. La chair est crème ou blanc-verdâtre, sucrée, légèrement acidulée, parfois faiblement anisée.

‘Golden delicious’ atteint sa maturité entre début etmi-octobree. Le fruit se conserve en cave jusque janvier, en frigo jusque fin février, en A.C. jusque juin.

C’est une pomme très polyvalente : fruits de table, transformation en jus, cidre, compotes, tranches ou quartiers…

‘Golden delicious’ se caractérise par un épiderme lisse et sec,  de couleur jaune vif à jaune verdâtre avec lavis orange clair au soleil.
‘Golden delicious’ se caractérise par un épiderme lisse et sec, de couleur jaune vif à jaune verdâtre avec lavis orange clair au soleil.

L’arbre est de vigueur moyenne à forte, avec une bonne ramification des branches. Sa productivité est bonne à très bonne, précoce, peu alternante si un éclaircissage est pratiqué. Il fleurit en moyenne saison (durée moyenne = 17 jours : bois âgé puis bois d’un an) ; fécondation croisée avec la plupart des autres variétés diploïdes à floraison synchrone.

Il présente une forte sensibilité à la tavelure et une faible sensibilité à l’oïdium et au chancre.

… et origines

Comme souvent en histoire, il y a la réalité ainsi qu’une part de légendes qui se sont construites au fil du temps. Il est vrai que ‘Golden delicious’ trouve son origine aux États-Unis vers la fin du 19è  siècle ; qu’il s’agit d’un semis du hasard trouvé dans un sous-bois et remarqué à cause de la couleur jaune doré des fruits ; par conséquent ses géniteurs sont inconnus. Le « découvreur » serait soit une personne inconnue qui aurait apporté l’arbre à A.H. Mullins à Clay County (Virginie-Occidentale) en 1890, soit A.H. Mullins lui-même. Elle a été diffusée par les pépinières Stark Brothers en Louisiane à partir de 1914.

Ce qui est hypothétique : la mère de ‘Golden delicious’ pourrait être ‘Grimes golden’, une variété à fruits jaunes très cultivée aux États-Unis au 19è  siècle, et le père ‘Golden Reinette’. L’arbre d’origine pourrait aussi être un semis spontané dans le jardin de A.H. Mullins…

Une famille nombreuse

‘Golden delicious’ a été souvent utilisée dans les programmes d’hybridation en raison de la somme de ses qualités et du fait que son principal problème en culture, la tavelure, est contrôlable par des traitements fongicides.

De nombreuses variétés commerciales nées au 20è  siècle comportent donc ‘Golden delicious’ parmi leurs ascendants directs ou indirects. D’autre part, un certain nombre de mutations à croissance faible, les « spurs », ou à épiderme moins sujet à la rugosité, ont été sélectionnées. Lorsque la variété fut assainie par thermothérapie, un certain nombre de clones exempts de viroses ont été diffusés à leur tour. La liste qui suit est loin d’être exhaustive !

Hybrides à fruits jaunes :

–‘Earlygold’ (‘Saygold’) (U.S.A., 1971) ;

–‘Golden extreme’ (‘Gradigold’) (U.S.A., 1960) ;

–‘Primgold’ (‘Delgeni’) (France, 1969) ;

–‘Ozark gold’ (U.S.A., 1970) ;

–‘Newgold’ (‘Newaphough’) (U.S.A.) ;

–‘Delblush’ (‘Tentation’) (France, 1971) ;

–‘Mutsu’ (‘Crispin’) (Japon, 1930) ;

–‘Delbardestivale’ (‘Delcorf’) (France, 1956).

Hybrides à fruits bicolores :

–‘Jonagold’ (U.S.A., 1943) ;

–‘Elstar’ (Pays-Bas, 1955) ;

–‘Gala’ (Nouvelle Zélande, 1939) ;

–‘Pinova’ (Allemagne) ;

–‘Delbardjubilé’ (Delgollune) (France, 1968) ;

–‘Fallstaff’ (Royaume-Uni, 1971) ;

–‘Florina’ (‘Querina’) (France, 1970) ;

–‘Fuji’ (Japon, 1931).

Mutants « spurs » :

–‘Auvil super’ (U.S.A.) ;

–‘Starkspur’ (U.S.A.) ;

–‘Yellospur’ (U.S.A.) ;

–‘Testerspur’ (Pays-Bas).

Mutants à faible rugosité :

–‘INFEL 972’ (France) ;

–‘Smoothee’ (U.S.A.) ;

–‘Reinders’ (Pays-Bas) ;

–‘Lysgolden’ (France) ;

–‘Belgolden’ (France).

‘Elstar’ est le fruit du croisement ‘Golden delicious’ X ‘Ingrid Marie’  effectué en 1955 aux Pays-Bas.
‘Elstar’ est le fruit du croisement ‘Golden delicious’ X ‘Ingrid Marie’ effectué en 1955 aux Pays-Bas.

À la conquête du Monde

Après la Seconde Guerre Mondiale, l’arboriculture fruitière professionnelle a connu une évolution profonde. Partant d’une activité agricole mixte (vergers extensifs haute-tige avec bétail pâturant), de grands vergers intensifs basse-tige se sont constitués en suivant le modèle américain : densité de plantation de plus en plus forte (plus de 2.500 arbres/ha), arbres basse-tige conduits en fuseaux, greffés sur des SPG faibles, nombre limité de variétés.

Dans tous ces vergers, ‘Golden delicious’ est devenue la variété de pommes dominante, en raison de sa parfaite adaptation à ce genre de conduite. Et ce dans le Monde entier, sous des climats totalement différents : en Europe par exemple, de la Scandinavie aux rives de la Méditerranée. Les différences de saisons entre les deux hémisphères garantissaient un meilleur approvisionnement des grands marchés de consommation.

Ce que l’on pressentait arriva ! Dès le début de la décennie 1960, il y eut une surproduction structurelle mondiale de pommes ‘Golden delicious’ qui se traduisit par une saturation des marchés et un écroulement des prix. Simultanément son image de marque s’était détériorée : trop de fruits de petit calibre, cueillis trop tôt et conservés dans de mauvaises conditions, dont la qualité gustative était déplorable, inondaient le marché ou étaient détruits.

Afin d’assainir le marché, des mécanismes d’arrachage avec primes furent mis en place en Belgique puis dans l’ensemble de l’Union européenne. Ils n’eurent pas l’effet escompté puisqu’il n’y avait pas d’interdiction de replanter. On peut penser qu’un certain nombre de vergers extensifs non rentables ont été remplacés par de nouveaux vergers intensifs plus productifs !

‘Supergold’ est issue de ‘Golden delicious’ X ‘Red delicious’.
‘Supergold’ est issue de ‘Golden delicious’ X ‘Red delicious’.

Depuis les années 1970, en Belgique, la diffusion et le développement de ‘Jonagold’, dont le prix de vente les premières années représentait le décuple des derniers prix de ‘Golden delicious’, une pomme plus productive et de meilleure qualité gustative, permit une relance de notre arboriculture fruitière professionnelle, où elle devint et est encore la pomme dominante. La production belge de ‘Golden delicious’ représente actuellement à peine 5 % du total.

D’autres pays misèrent sur d’autres pommes : ‘Elstar’ aux Pays-Bas, ‘Gala’ et ‘Braeburn’ dans le Sud de l’Europe. Mais ‘Golden delicious’ reste la variété dominante en Europe, avec 22 % du total, suivie de ‘Gala’ (14 %), des Rouges américaines (8 %) et de ‘Jonagold’ (6 %).

Dans les jardins ?

Cette belle et bonne pomme peut valablement faire partie de l’assortiment des jardins fruitiers où elle donnera satisfaction pour autant que l’on respecte quelques conditions :

– la cultiver en petit fuseau basse-tige (et pourquoi pas en forme palissée si une paroi est disponible ?) dans un endroit bien aéré et bien ensoleillé ; chaque arbre doit disposer de 5 à 6 m² (3,5 x 1,4 à 1,65 m) ; choisir des scions de deux ans bien ramifiés, greffés haut sur ‘Malling 9’ ;

– pratiquer une taille hivernale qui permet à l’air et à la lumière de pénétrer aisément dans la ramure ;

– pratiquer à la fin mai un éclaircissage manuel des fruits en excès en respectant les jeunes fruits les plus gros, et maximum 2 fruits par 10 cm de branche ;

– contrôler la tavelure dès le mois de mars si le climat est humide : un traitement préventif au débourrement, à répéter avant la floraison ; après floraison en fonction de la pluviométrie… ;

– récolter à maturité optimale : la coloration de l’épiderme doit passer du jaune verdâtre au jaune vif, avec même un lavis orange clair sur la face exposée au soleil. À ce stade, la richesse en sucres est élevée et les composés aromatiques se sont développés. Selon le microclimat de la parcelle, ce stade est atteint habituellement dans la première moitié d’octobre en Moyenne Belgique ;

– conserver dans une cave fraîche, en surveillant périodiquement les fruits. L’apparition de rides sur l’épiderme indique que l’atmosphère est trop chaude et trop sèche ;

– consommer sans modération !

Ir. André Sansdrap

Wépion

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