Le Programme de France Sélection Limousin: maintenir l’équilibre entre les aptitudes bouchères et qualités maternelles

Les trois totem limousins qui trônent fièrement au pôle de Lanaud.
Les trois totem limousins qui trônent fièrement au pôle de Lanaud. - P-Y L.

«   En France, le cheptel limousin est celui qui a connu l’augmentation la plus fulgurante de son effectif depuis la seconde guerre mondiale », assure Julien Mante. En effet, si on ne recensait en 1965 que 285.000 vaches mères chez nos voisins, leur nombre s’est porté début 2022 à 1.102.097 unités. Les effectifs ont donc été multipliés par 4 en un demi-siècle. Elle est désormais la seconde race allaitante en France, derrière Charolaise

5 % des éleveurs français certifient leurs animaux

Si l’on s’intéresse à la constitution du cheptel français limousin vis-à-vis de l’implication des éleveurs par l’amélioration génétique. Sur les 100 % des éleveurs producteurs de viande, 80 % n’enregistrent pas de données supplémentaires par rapport au cadre légal de l’amélioration génétique. Ils déclarent la naissance du veau, son sexe, le nom de la mère ainsi que la date de naissance. « Parler de la génétique quand il manque 50 % de la généalogie devient dès lors compliqué. »

Ensuite, les 11 % suivant enregistrent quelques données supplémentaires comme le nom du père – pour ainsi avoir la généalogie complète – , les performances au niveau des conditions de naissances (vêlage avec ou sans aide, des poids de naissance et les tours de poitrine). Des informations qui permettent de choisir des reproducteurs sur des aptitudes à produire des veaux légers pour les mâles, des aptitudes à bien vêler pour les mères.

Quatre autres pourcents d’éleveurs adhèrent au programme « Bovins croissance » qui consiste en un suivi des croissances des veaux de manière à évaluer le potentiel des animaux au sevrage, le potentiel laitier des vaches ainsi que la morphologie des broutards. Des informations qui permettent d’en venir à l’indexation.

Enfin 5 %, soit 1.394 éleveurs limousins, en plus d’adhérer à Bovins croissance, sont membres du Herd-book limousin, grâce auquel ils font certifier les animaux au livre généalogique et font commerce de leurs reproducteurs.

Le pôle de Lanaud

Créé en 1991, le pôle de Lanaud est un lieu au service de la race, rassemblant sous un même toit l’ensemble des acteurs de la filière de la Station nationale de qualification, en passant par l’Organisme de sélection (France Limousin Sélection), le Herd-book Limousin et Ingenomix (qui propose des tests génomiques permettant de prédire dès la naissance le potentiel génétique), jusqu’au Limousine Park, le parc de loisirs agro-touristique.

Julien Mante : « L’une des missions de France Limousin Sélection : définir les orientations raciales, soit définir la limousine que l’on veut pour aujourd’hui et pour demain. Et la première chose à faire est de maintenir l’équilibre entre les aptitudes bouchères de la limousine et ses qualités maternelles. Tirer le tout vers le haut est non seulement compliqué mais demande du temps. Comme tous les critères ne peuvent être améliorés en même temps, des choix ont été posés pour améliorer les potentiels d’allaitement et de croissance, le développement musculaire tout en maintenant les facilités de naissance. »

Un programme de sélection sur trois niveaux

Si on s’intéresse au programme de sélection, il se base sur trois niveaux :

– la sélection réalisée au niveau des cheptels adhérents au Herd-book limousin. C’est 1.394 éleveurs, 107.000 vaches mères et 3.000 taureaux évalués par Iboval ;

– les jeunes mâles sont évalués sur leurs performances propres avant d’être soumis à une analyse génétique qui leur permet d’être hiérarchisés selon leur génomie pour être vendus ensuite ;

– la partie insémination constitue le dernier étage du programme avec le testage sur descendance des taureaux de Crealim, un organisme indépendant qui a la charge de conduire le schéma de sélection sur descendance en station.

Les outils

Trois outils principaux servent le pôle de Lanaud :

– le programme Iboval qui permet l’indexation des bovins allaitants en ferme. Quelque 2.400 élevages y adhèrent, cela représente 130.000 vaches et 6.000 taureaux ;

– la station d’évaluation : Près de 700 des taureaux les plus prometteurs font leurs classes chaque année à Lanaud. Ils seront conduits pendant cinq mois dans les mêmes conditions. Près de la moitié sera qualifiée de reproducteurs jeunes, 40 % espoir et 10 % sont non qualifiés pour les quatre ventes aux enchères annuelles programmées  en novembre, janvier, mars et juin. Les ventes permettent aux éleveurs de continuer à renouveler les troupeaux avec des reproducteurs équilibrés ;

– Crealim évalue chaque année 10 taureaux d’insémination sur descendance pour n’en qualifier qu’entre 3 et 5 sur les qualités maternelles. L’outil permet une diffusion large des meilleurs taureaux.

P-Y L.

Densifier nos échanges avec la France

Pour Loïc Lejeune, technicien Eleveo en races allaitantes, le programme belge est fort similaire à celui de la France en termes de suivi et d’outils proposés aux éleveurs. « Nous avons des échanges vu que toutes les analyses génétiques des animaux y sont réalisées. »

Actuellement, le contrôle de performances est proposé aux éleveurs, comme en France. Si une vingtaine de Wallons y participe pour le moment, une dizaine d’autres semble s’y intéresser. Tous les veaux sont pesés entre 2 et 10 mois et ensuite classifiés selon différents points. « Cela se fait comme chez nos voisins. J’y vais d’ailleurs deux fois par an pour me tenir à jour et continuer à coter comme eux. » À noter que le caractère et la docilité des veaux ne sont pas encore évalués mais cela devrait bientôt pouvoir se faire.

Pointage et qualification

Ce qu’on ne fait pas chez nous ? « Le pointage adulte, c’est-à-dire la cotation des bovins sur la taille, les largeurs, qui doit être réalisée entre 1 et 3 ans. C’est en discussion avec France Limousin Sélection afin de voir comment le mettre en place chez nous. »

On attend de pouvoir développer le pointage adulte, tant mâles que femelles, pour développer les autres points comme la qualification des espoirs, reproducteurs jeunes, reproducteurs reconnus… Une fois la qualification possible, les éleveurs pourront demander à ce qu’un veau qui a de bonnes origines, de bons index et qui croît bien, puisse entrer en station de sélection.

Vu le développement de la race en Belgique, avancer dans cette direction est une suite logique mais c’est aussi d’un point de vue financier que le bât blesse. « Avant, nous travaillions sur le programme français mais les complexités administratives qui en ont découlé nous ont poussés à préférer un programme propre à Elevéo. Et c’est ce qui limite aussi les échanges avec nos voisins. »

« Mis à part cela, notre travail est en adéquation avec celui du Herd-book français. Nous serions même plus perfectionnistes d’un point de vue des confirmations des mises au Herd-book. On refuse beaucoup plus vite des animaux qui ont des défauts, mais nous sommes en Belgique où on a toujours voulu laver plus blanc que blanc. » Rires.

P-Y L.

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