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L’euphorie sur le beurre est terminée

La reprise de la collecte laitière européenne et océanienne a relancé les fabrications de commodités laitières qui détendent d’un côté le marché du beurre et de l’autre alourdissent davantage celui des protéines laitières. Au 1er semestre 2018, les cours pourraient encore se dégrader et déprécier de nouveau le prix du lait.

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La forte croissance de la collecte européenne a relancé les fabrications de commodité laitières (beurre et poudre maigre). Celles de fromages retrouvent une croissance plus tendancielle après la forte hausse observée en juillet et août. Les fabrications de produits de grande consommation évoluent diversement : faible croissance des laits liquides, tassement de la crème conditionnée, décrochage brutal des yaourts dans plusieurs pays, à l’échelle de l’UE-28.

Détente sur le marché du beurre

Les disponibilités en beurre ont fortement progressé cet automne grâce à la reprise de la collecte européenne et la hausse saisonnière très prononcée de la production laitière océanienne. Elles ont détendu les cours du beurre. La cotation Atla du beurre cube échangé sur le marché spot a chuté de 1.900 €/t en octobre, puis s’est stabilisée 4 semaines durant à 5.000 €/t avant de céder 100 €/t fin novembre, passant ainsi sous la cotation des contrats (5.350 €/t). Le prix du beurre exporté d’Europe de l’Ouest sur le marché mondial s’est encore déprécié en novembre de 320 €/t à 4.900 €/t, tiré par le beurre néo-zélandais encore moins cher à 4.755 €/t le même mois.

Face à une demande internationale toujours forte, les échanges internationaux ont retrouvé les niveaux de 2016 en août et septembre. L’UE-28 est logiquement le principal artisan de ce rétablissement. Malgré cela, les exportations européennes accusent depuis janvier un fort retrait (-20 % sur 9 mois) et les échanges internationaux ont reflué de 15 % sur la même période.

Si tous les clients n’ont pu être servis, et que certains ont dû se retirer compte tenu des prix records, la Chine, la Russie, l’Australie, les Philippines et le Canada ont sensiblement accru leurs achats de beurre et butter oïl.

L’envolée des cours du beurre a eu des répercussions diverses sur la consommation. En France, le refus des distributeurs d’augmenter les tarifs demandés par les fabricants a provoqué un sursaut passager d’achats par les ménages. Certains ont constitué des stocks de précaution à la vue de rayons en GMS peu garnis, contribuant ainsi à l’ambiance de pénurie, plus médiatique que réelle. En septembre, les ventes de beurre ont bondi de 2 % par rapport à 2016 en volume, rompant ainsi la tendance baissière à l’œuvre depuis la mi 2014. En Allemagne, la forte hausse des prix au détail a provoqué une chute de 13 % des volumes achetés l’été dernier et de 11 % depuis janvier.

Marché des protéines toujours plus déprimé

Le dynamisme de la demande internationale en protéines laitières ne parvient plus à absorber la reprise des fabrications européennes et océaniennes de poudre de lait. Les fabrications européennes de poudre maigre ont rebondi au 2nd semestre. Outre-Atlantique, les fabrications états-uniennes poursuivent leur croissance au même rythme que la collecte.

Malgré la reprise des fabrications européennes, les échanges internationaux ont été moins dynamiques au 3e trimestre (+9 % par rapport à 2016) qu’au 1er semestre (+14 %). L’UE-28 a fortement accru ses expéditions au 3e trimestre alors que les exportations états-uniennes ont fléchi, malgré la dépréciation du dollar sur l’euro. Sur 9 mois, ces deux fournisseurs ont renforcé leur prédominance sur le marché des poudres maigres.

Le marché mondial des poudres grasses est en revanche peu animé. Les échanges internationaux sont ralentis malgré le dynamisme de la demande chinoise et algérienne. L’Australie et l’Argentine en sont les principales victimes, probablement faute de disponibilités. La Nouvelle-Zélande a conforté sa position dominante (+2 % sur 9 mois) avec 2/3 de part de marché, tandis que l’UE-28 a repris quelques positions notamment en Algérie.

Aux États-Unis, les stocks de poudre maigre, qui n’ont pas connu la baisse saisonnière habituelle fin 2016, s’étoffent toujours. Début octobre, ils atteignaient 146.000 t, soit +50 % par rapport à 2016 à pareille époque et le niveau le plus haut depuis 10 ans.

Malgré le dynamisme des exportations et la fermeté de la demande intérieure, la reprise des fabrications européennes de poudre maigre a stoppé la résorption des stocks, amorcée un an auparavant. Encore très étoffés, ils sont estimés à plus de 400.000 t en septembre dont 376.000 t stockés à l’intervention. La Commission européenne n’arrive toujours pas à commercialiser des volumes significatifs de poudre maigre âgée d’au moins deux ans.

Après avoir décroché de 200 €/t en septembre et octobre, la cotation ATLA s’est stabilisée en novembre à 1.450 €/t, soit 230 €/t sous le prix d’intervention. Elle peut encore se déprécier au 1er semestre 2018 si la demande internationale ne suit pas la forte hausse saisonnière des fabrications européennes. Fermée jusqu’au 1er mars prochain, l’intervention sera ensuite très contenue. La Commission européenne propose de ramener de 109.000 t à néant le plafond actuel des achats automatiques. Auquel cas, elle limitera les entrées grâce à des achats par adjudication et devra à l’inverse, sauf à les détruire, brader des volumes de poudre âgée sans risquer de déstabiliser complètement le marché.

Marché des fromages désormais contrasté

Globalement solide, le marché européen des fromages connaît cependant une évolution contrastée depuis septembre. D’un côté, le cours des spécialités fromagères, peu exposé à la concurrence internationale, se tient bien : la cotation de l’emmental en Allemagne est demeurée stable à 4.490 €/t en novembre (+20 % /2016). De l’autre, celle du gouda a décroché de 300 €/t en un mois, dans le sillage du cours du beurre. À 3.180 €/t en novembre, elle est repassée sous son bon niveau de 2016 à pareille époque, soit 600 €/t sous le niveau record de janvier 2014.

Au 3e trimestre, les fabrications européennes, notamment de fromages ingrédients, ont été sensiblement plus dynamiques qu’au 1er  semestre. Les volumes supplémentaires ont surtout abondé les stocks des fabricants, tombés au plus bas au 1er semestre. Dans le même temps, les exportations européennes de fromages ont marqué le pas, après avoir été très dynamiques au 1er semestre, sous l’effet d’un arrêt de la croissance des échanges internationaux.

Malgré cela, elles ont progressé de 5 % par rapport à 2016 sur 9 mois. Seuls les États-Unis, qui ont accru de près de ¼ leurs exportations, n’ont pas subi le trou d’air grâce à des disponibilités abondantes et surtout compétitives du fait de la dépréciation du dollar sur l’euro.

Chute des cours de la poudre de lactosérum

Le dynamisme des fabrications fromagères pèse sur la valorisation de la poudre de lactosérum dont la demande internationale semble plafonner au 2nd semestre. Le cours de la poudre destinée à l’alimentation animale se déprécie mois après mois depuis le haut niveau atteint en juin 2017. En 5 mois, elle a décroché de 40 % à 550 €/t fin novembre.

L’UE-28 subit l’agressivité des États-Unis qui ont accru leurs expéditions (+9 % sur 9 mois) grâce à des disponibilités également abondantes et plus compétitives.

D’après Tendances Lait et Viande (Idele)

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