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Une récolte hétérogène en colza d’hiver: regard sur la saison culturale 2019-2020 et les rendements

L’hétérogénéité des rendements n’épargne pas le colza. Le potentiel génétique des variétés est bien présent, encore faut-il que les conditions favorisent son expression !

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A vant de faire le point sur les rendements, il est bon de revenir sur le déroulement de la saison en épinglant quelques faits remarquables. Marquée par plusieurs mois de sécheresse avant et lors de l’implantation à la fin de l’été 2019, la culture de colza a encore terminé son cycle en pleine sécheresse des sols. Seul l’hiver particulièrement doux a connu une pluviométrie abondante surtout en février et début mars.

Certaines parcelles de colza ont connu un excès en eau lors de cet hiver très arrosé. Vue prise le 10 décembre, l’an dernier.
Certaines parcelles de colza ont connu un excès en eau lors de cet hiver très arrosé. Vue prise le 10 décembre, l’an dernier. - Appo

Au départ, la levée a été influencée par les faibles réserves hydriques du sol mais surtout par l’arrivée de quelques pluies juste avant ou après le semis. L’attente des pluies a été longue, ce qui a retardé, voire annulé certains semis. L’eau a été un facteur très limitant, hormis les excès connus lors du repos végétatif de la culture.

L’automne a connu l’arrivée de grosses altises qui ont eu un impact essentiellement sur les petits colzas dont la croissance était freinée par le manque d’eau. La présence de larves d’altises dans les plantes en automne jusqu’au printemps indique que des pontes ont eu lieu à l’automne. Pour rappel, il n’y a plus de protection insecticide via les semences, avec l’interdiction des néonicotinoïdes. Seuls 3 pyréthrinoïdes sont autorisés en végétation sur altises adultes.

Les contrastes de développement des plantes étaient manifestes à l’automne, entre les levées rapides et les levées plus tardives. Le retour des pluies à l’automne a fait du bien à la culture. Elles étaient également bien accueillies pour reconstituer les réserves en eau après plusieurs saisons déficitaires.

La fréquence et l’abondance des pluies en fin d’hiver ont rendu l’accès au champ impossible pour les premiers apports d’azote au printemps. Ceux-ci ont donc été retardés à la mi-mars. Certains colzas ont souffert de l’excès en eau dans les sols asphyxiques, laissant apparaître une coloration rougeâtre des feuilles.

L’hiver a été tellement doux que les couverts associés au colza lors du semis, en principe gélifs, n’ont pas été détruits durant cette saison.

Printemps sec et ensoleillement record

Après cette période très humide, le retour d’un temps sec accompagné d’un vent d’est a permis de réaliser les divers travaux au champ. L’élongation des plantes a été rapide au printemps mais avec une faible production de biomasse en général. Le colza présentait une taille plus courte que la normale.

Les insectes ravageurs ont posé moins de problèmes que lors des deux années précédentes qui avaient connu des attaques graves de méligèthes et de charançons de la tige ayant sérieusement impacté le rendement final de la culture. Le vent d’est très présent a fortement contrarié les insectes.

Le mois d’avril a connu une météo exceptionnelle avec un ensoleillement record, des températures élevées en journée et une sécheresse déjà pénalisante pour l’assimilation des engrais azotés apportés à la culture. Des pertes précoces de feuilles de colza ont exceptionnellement été observées dès la fin avril, traduisant déjà une situation de stress hydrique.

On distingue des tiges dans un sol très sec (crevasses), de l’engrais azoté non fondu totalement... et déjà des pertes de feuilles, au 21 avril dernier.
On distingue des tiges dans un sol très sec (crevasses), de l’engrais azoté non fondu totalement... et déjà des pertes de feuilles, au 21 avril dernier. - Appo

La floraison s’est déroulée dans de très bonnes conditions d’ensoleillement en avril et mai, avec toutefois des écarts de températures très importants : négatives la nuit et très élevées la journée. La luminosité exceptionnelle a été profitable à l’activité des abeilles. La fécondation du colza a généralement été bonne sauf en situations stressantes.

Du côté des maladies, la situation sanitaire des plantes a également été bonne cette année. Il n’y a pas eu de verse.

Maturation rapide, récolte étalée

Après un coup de chaleur en juin, la culture du colza d’hiver a mûri rapidement. La récolte a été étalée en fonction de la précocité des variétés et surtout en fonction des sols ayant plus ou moins subi les stress hydriques. Les résultats de rendement en colza sont très hétérogènes, avec des déceptions pour les rendements de 2 à 3 tonnes par ha et des niveaux de rendement proches de 4 tonnes en moyenne. Les rendements supérieurs à 5 tonnes par ha sont plus rares en 2020. L’hétérogénéité des résultats en colza est identique à celle rencontrée en céréales.

L’innovation génétique et résultats des essais

Un large éventail de variétés européennes de colza d’hiver a été testé à Gembloux ( tableaux 1 et 2 ) et à Dinant. L’évolution génétique est rapide et dynamique car de nombreux sélectionneurs inscrivent chaque année de nouvelles variétés. Parmi celles-ci, il faut épingler l’arrivée récente de variétés qui peuvent tolérer la présence d’un virus transmis par des pucerons verts à l’automne, TuYV (Turnip Yellow Virus = virus de la jaunisse du navet).

COLZA1

COLZA2

Toutes les variétés testées sont des hybrides restaurés et de type « double zéro », c’est-à-dire sans acide érucique dans l’huile et à faible teneur en glucosinolates dans les tourteaux.

Avec le changement climatique, il est intéressant de pouvoir comparer des variétés avec celles inscrites dans les pays d’Europe de l’Est connaissant un climat habituellement différent du nôtre.

Si le potentiel de rendement des variétés a bien pu s’exprimer à Dinant, il a par contre été fortement pénalisé par des attaques sévères de pigeons ramiers sur la plateforme de Gembloux. Le confinement obligatoire imposé à partir du 18 mars a empêché le chasseur de poursuivre la surveillance des parcelles d’essais au printemps. La récupération de la culture a été rendue particulièrement difficile en raison de la sécheresse qui s’est installée au printemps. En conséquence, la hauteur des plantes touchées était faible et la biomasse formée limitée. La floraison a été retardée ainsi que la récolte. Entre les zones ravagées et les zones non attaquées, la perte de rendement s’élève à quelque 1.700 kg/ha. À noter que plusieurs variétés se sont bien défendues, prouvant la capacité du colza à récupérer même dans des conditions très difficiles.

COLZA3

Les résultats pluriannuels ( tableau 3 ) confirment les progrès génétiques en colza d’hiver et leur variabilité d’une année à l’autre, en fonction des conditions climatiques.

Christine Cartrysse

, Cepicop

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